France – Qu’est-ce qui fait lire les ados ?

France Culture – « Le décrochage de lecture à l’adolescence est toujours bien présent et réel » avec un déclin après 12 ans, notait le Centre national du livre dans une étude en 2022. Or, c’est une expérience intellectuelle, psychique et émotive qui peut participer à la construction de l’identité à cet âge.

Certes, 81% des 7-25 ans lisent pour leurs loisirs par goût personnel, selon une étude du Centre national du livre réalisée avec Ipsos et publiée en mars 2022, mais le CNL note que « la lecture ‘loisirs’ décline fortement chez tous après 12 ans et l’entrée au collège, avec une baisse encore plus importante chez les garçons que chez les filles entre 13 et 19 ans ». Les écrans sont souvent pointés du doigt – ils captent l’attention des 15-24 ans pendant plus de quatre heures chaque jour, selon le CNL – mais ils peuvent aussi contribuer à la lecture. En réalité, l’adolescence est une période faite de changements, parfois même de ruptures et la lecture n’y échappe pas. Pourtant, au-delà de l’apprentissage du vocabulaire et de la culture générale, cette activité est un plaisir qui permet aussi l’identification et l’évasion, l’intimité et la sociabilité.

BD, mangas et romans en tête

« J’aime bien imaginer l’histoire, c’est comme un film qu’on se fait dans notre tête. On imagine les personnages, l’ambiance, l’époque. C’est un sentiment d’évasion agréable », raconte Marie-Liesse, 18 ans, en terminale au lycée Mongazon. Parmi les livres les plus lus par les 7-19 ans, la bande dessinée et le manga occupent les première et troisième marches du podium. Le roman figure en deuxième position. La bande dessinée est « un média très accessible, estime Luc Banchereau. Fin mars, ce professeur d’anglais au lycée privé Mongazon à Angers a organisé une rencontre entre l’auteur de BD Julien Moca et ses élèves, dans le cadre du festival 48h BD, un événement qui met en avant la BD sous toutes ses formes.

Luc Banchereau, enseignant et Julien Moca, auteur, devant des élèves du lycée Mongazon à Angers, le 31 mars 2023.

Luc Banchereau, enseignant et Julien Moca, auteur, devant des élèves du lycée Mongazon à Angers, le 31 mars 2023.

© Radio France – Margot Delpierre

« C’est une porte d’entrée en tant que prof d’anglais parce que cette notion de plaisir, par ce visuel parfois associé à l’enfance, peut parler à tout le monde. J’utilise la bande dessinée dans mes cours et j’en fais réaliser par mes élèves dans le cadre du cours d’anglais, mais aussi dans un cours de bande dessinée spécifique à l’établissement, que nous avons mis en place cette année pour développer cette sensibilité chez eux. »

« Je ne vois pas la bande dessinée comme une clé d’entrée à la lecture, lui répond Julien Moca. « Quand j’entends parfois des parents dire : ‘on va intéresser notre enfant à la lecture par la bande dessinée’, cela me fait mal aux oreilles. On sous-entend encore que la bande dessinée serait une sous-littérature. » « C’est vrai que parfois mes parents me disent ‘arrête de lire une BD, lis plutôt un bon roman », se souvient Bérénice, 17 ans, en terminale.

Le manga plaît tant aux ados que des librairies s’équipent pour proposer ces séries souvent longues. Dans le 15e arrondissement de Paris, la librairie spécialisée jeunesse L’Émile a ouvert l’an dernier un deuxième local dédié aux mangas. La première boutique, ouverte il y a près de vingt ans par Naza Chiffert et son mari, propose plutôt des romans. Parmi les genres qui plaisent le plus, il y a « la dystopie, la fantasy ou même des histoires contemporaines », détaille la librairie Pippa Shepherd. Car certains « cherchent des titres pour s’identifier, se sentir à leur place, pour les rassurer dans leur adolescence, se dire qu’ils ne sont pas seuls dans ce qu’ils vivent ». Elle fait une différence entre les livres qu’elle conseille et ceux qui se vendent « tout seuls » grâce au bouche-à-oreille planétaire sur les réseaux sociaux – en particulier TikTok avec le phénomène #BookTok – comme les ouvrages des autrices américaines Madeline Miller, Colleen Hoover ou encore Adam Silvera. Preuve que les écrans, s’ils prennent beaucoup de place dans nos vies, poussent aussi à lire.

La littérature jeunesse, un sujet d’enquête récent

 

« Quand on a créé cette librairie jeunesse en 2005 avec mon mari, il y en avait déjà quelques unes à Paris, mais beaucoup moins qu’aujourd’hui. On a senti une forme de défiance, estime Naza Chiffert. Pas de l’hostilité, mais du désintérêt ou de la défiance de la part des institutionnels et des financeurs institutionnels du monde de la librairie, puisque la jeunesse a longtemps été considérée comme la dernière roue du carrosse » jusqu’au phénomène médiatique Harry Potter, selon elle. Elle s’étonnait de ne pas trouver, il y a encore dix ou quinze ans, en consultant les études du ministère de la Culture sur les pratiques culturelles des Français, de données sur les lecteurs de moins de 18 ans.

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Source : France Culture  – (Le 21 avril 2023)

 

 

 

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