En Australie, la pire attaque terroriste de l’histoire du pays a visé la communauté juive et a fait 15 morts

Les deux assaillants, un père de 50 ans, tué lors de l’attentat, et son fils de 24 ans, ont ciblé les célébrations de Hanoukka sur la plage de Bondi, à Sydney. Le plus jeune suspect avait été l’objet d’une enquête des services de renseignement en 2019. Dans le pays, les actes antisémites se sont multipliés depuis le 7 octobre 2023.

Le Monde  – Quelques rayons de soleil tentent de se frayer un chemin à travers les nuages, dans la matinée du 15 décembre, lorsque Murray Gillett, un Australien d’une soixantaine d’années, dépose un bouquet de marguerites jaunes sur le front de mer de la plage de Bondi, à Sydney. La veille, à seulement quelques pas de là, deux assaillants avaient ouvert le feu sur les participants d’un festival annuel célébrant la fête juive de Hanoukka, faisant 15 morts (auxquels s’ajoute l’un des suspects, tué par la police) et 42 blessés. La pire attaque terroriste de l’histoire de l’île-continent.

« Je ne suis ni juif ni musulman. Je ne crois même pas en Dieu. Je suis simplement venu exprimer ma douleur et rappeler que tout le monde est le bienvenu dans notre pays. Il n’y a pas de place ici pour la haine », témoigne l’homme, qui repart en tirant son chien. Derrière les cordons policiers, Bondi Beach est plongée dans un silence inhabituel, presque irréel. Des habitants du quartier, dont certains peinent à retenir leurs larmes, s’échangent les dernières informations, donnent des nouvelles de leurs proches ou partagent leurs histoires.

Il était 18 h 47 lorsque deux hommes ont jailli de leur véhicule, armés de fusils, et ont commencé à tirer. Les témoins parlent d’une trentaine de coups de feu, des chargeurs ont été retrouvés éparpillés sur le sol.

« Une belle journée d’été »

« Il y avait du monde partout. C’était une belle journée d’été. Les bars étaient pleins. On a d’abord cru que c’étaient des feux d’artifice. Puis on a commencé à entendre des cris. Là, on a compris que c’était sérieux », témoigne Merriman, un gestionnaire d’investissement de 37 ans qui, comme beaucoup au lendemain du drame, préfère ne pas donner son nom de famille.

Dans le plus grand désordre et alors que des cadavres jonchent déjà le sol, la foule s’éparpille à la recherche d’un abri. « Nous avons recueilli une trentaine de personnes dans notre jardin : des parents avec leurs enfants en maillot de bain plein de sable, des bébés, des adolescentes en état de choc. Les Australiens ne sont pas habitués à ce type de violence », témoigne un couple de jeunes Français, Elliot Mallézé et Eléonore Bon, installés à quelques encablures de cette plage où se pressent habituellement touristes, sportifs, nageurs et surfeurs.

Après la fusillade survenue à Bondi Beach, à Sydney, le 14 décembre 2025.

 

Les fusillades sont rares dans ce pays, qui affiche l’un des taux de mortalité liés aux armes à feu les plus faibles du monde industrialisé. L’attaque de Bondi constitue la fusillade la plus meurtrière depuis la tuerie de masse de Port Arthur, en Tasmanie, en 1996, qui avait fait 35 morts. Les attentats terroristes meurtriers y sont peu fréquents. Dimanche soir, le directeur de l’Organisation australienne du renseignement (ASIO), Mike Burgess, a indiqué que, pour l’instant, la menace terroriste nationale demeurait au niveau « probable ».

Lundi, des policiers barraient l’accès à une partie de la scène, survolée par un hélicoptère, tandis que les forces de l’ordre avaient renforcé leur présence près des lieux de culte et des endroits fréquentés par la communauté juive. « Aujourd’hui, tous les Australiens l’entourent de leur soutien et lui disent : nous sommes à vos côtés. Nous ferons tout ce qui est nécessaire pour éradiquer l’antisémitisme. C’est un fléau et nous l’éliminerons ensemble », a déclaré, dans la matinée, le premier ministre travailliste, Anthony Albanese.

Sur le petit pont où se tenaient les assaillants, Yousra Metwally, une musulmane de 35 ans, s’avance, elle aussi, un bouquet de fleurs à la main. « Je trouve absolument terrible que des membres de la communauté juive, qui fêtaient Hanoukka, aient vécu une telle épreuve. Ces terroristes ont la même religion que moi, mais ces actes horribles ne reflètent absolument pas les enseignements de ma foi », se désole-t-elle, tout en se raccrochant au rôle joué par un passant, qui serait également musulman.

Ahmed Al-Ahmed, le propriétaire d’origine syrienne d’un magasin de fruits, a fait preuve d’un courage exemplaire en se jetant sur l’un des assaillants pour le désarmer. Sans son intervention, l’attaque aurait très probablement fait davantage de victimes.

Six armes à feu et deux engins explosifs artisanaux

Les deux terroristes ont été identifiés comme Sajid et Naveed Akram, un père et son fils, âgés respectivement de 50 et 24 ans. Le fils, dans un état critique, a été hospitalisé. Le père, tué sur les lieux de l’attentat, était titulaire d’un permis de détention d’armes à feu et possédait six armes enregistrées à son nom retrouvées sur les lieux de l’attaque. Les policiers ont également neutralisé deux engins explosifs artisanaux. « L’un de ces individus était connu de nos services, mais pas comme une menace immédiate », a révélé, dimanche soir, le directeur de l’ASIO.

​De gauche à droite : le premier ministre australien, Anthony Albanese, le premier ministre de Nouvelle-Galles du Sud, Chris Minns, et la ministre de la police et de la lutte contre le terrorisme de Nouvelle-Galles du Sud, Yasmin Catley, lors d’une conférence de presse après la fusillade à Bondi Beach, à Sydney, le 15 décembre 2025. 

Selon les autorités, l’agence de renseignement nationale s’était intéressée à Naveed Akram, il y a six ans, en raison de ses fréquentations, menant une enquête de six mois. Selon les informations de la chaîne publique ABC, c’est l’arrestation, en 2019 à Sydney, d’un homme auquel il était lié, le terroriste Isaac Matari, commandant autoproclamé de l’organisation Etat islamique (EI) en Australie, actuellement derrière les barreaux, qui a déclenché ces investigations. A l’époque, les services ont conclu qu’il ne représentait pas de danger. « C’est le type d’attaque que l’on redoute, mais elles sont très difficiles à prévoir et à empêcher lorsqu’elles sont menées par des acteurs isolés, dans des lieux publics », analyse Greg Barton, spécialiste de l’extrémisme violent à la Deakin University de Melbourne.

Pour la communauté juive australienne, l’Etat aurait pu et dû faire davantage. « Aujourd’hui, nous sommes dévastés mais pas surpris. L’antisémitisme n’a cessé de gagner du terrain en Australie et nous n’avons pas été suffisamment protégés », s’agace Adrian, père de trois enfants, qui se trouvait également, lundi matin, sur les lieux de l’attentat. « Maintenant, nous nous tenons sur un cimetière », se désole, quant à lui, Nick, l’un de ses amis.

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Source : Le Monde 

 

 

 

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