Avions au sol, manque de pièces détachées… : l’aviation africaine subit la crise mondiale d’approvisionnement

Agence Ecofin  – Les difficultés actuelles dans la chaîne d’approvisionnement aéronautique mettent en exergue les défis structurels dans l’aviation civile africaine. Selon l’IATA, ils peuvent être relevés avec des politiques de coopération et d’investissement dans une chaîne de valeurs intégrée et résiliente face aux turbulences mondiales.

L’industrie aéronautique mondiale connait depuis quelques mois un déficit de production qui peut coûter plus de 11 milliards USD au secteur en 2025, selon une étude effectuée par l’IATA (Association du transport aérien international) et le cabinet de conseil Oliver Wyman. Une situation qui affecte particulièrement les transporteurs africains, confrontés à de faibles marges et à une dépendance structurelle vis-à-vis des constructeurs et fournisseurs étrangers.

Le rapport intitulé « Reviving the Commercial Aircraft Supply Chain » (Redynamiser la chaîne d’approvisionnement des avions commerciaux), rappelle les retards persistants dans la production de nouveaux appareils et de pièces détachées. Des blocages qui obligent les compagnies aériennes à prolonger l’exploitation de vieux avions, qui consomment plus de carburant et plus coûteux à la maintenance. Pour celles du continent africain, ces perturbations ont des conséquences directes sur les opérations quotidiennes et les plans d’expansion.

1 IATA

 L’IATA estime que 4 facteurs déterminent l’essentiel des pertes : le surcoût du carburant (4,2 milliards USD), la hausse des dépenses de maintenance (3,1 milliards USD), l’augmentation des loyers de moteurs et d’avions (2,6 milliards USD) et les coûts de stockage des pièces (1,4 milliard USD).

Des transporteurs africains contraints de revoir leurs ambitions

Air Algérie, qui avait annoncé un plan d’acquisition de 16 nouveaux avions, n’a toujours pas reçu ses premières livraisons, prévues pour avril 2025. La compagnie les espère désormais pour novembre, et ce décalage affecte d’ores et déjà son calendrier d’ouvertures de lignes internationales. Ethiopian Airlines, considérée comme le leader des transporteurs africains, n’est pas épargné. En août 2024, son DG Mesfin Tasew déclarait à Bloomberg que la compagnie avait dû recourir à la location d’avions supplémentaires pour pallier les retards de production chez le constructeur américain Boeing.

Kenya Airways a attribué une partie de ses pertes au premier semestre 2025 à l’indisponibilité d’une partie de sa flotte. 3 de ses 9 Boeing 787-8 sont en effet restés immobilisés plusieurs mois en raison de la pénurie mondiale de pièces détachées et du manque de capacités de révision des moteurs General Electric GEnx-1B70. Les cas de ces importantes compagnies illustrent l’envergure du problème, dont l’impact pourrait être plus significatif chez les transporteurs d’envergure un peu moindre, comme RwandAir, Air Côte d’Ivoire ou Air Sénégal, qui recourent souvent au leasing pour étoffer leurs flottes.

Une dépendance structurelle qui fragilise l’aviation africaine

Ces exemples mettent en exergue une réalité bien connue dans le secteur : la dépendance de l’Afrique aux chaînes de production et de maintenance extérieures. Peu de pays sur le continent disposent d’infrastructures de production ou de MRO (maintenance, réparation et révision) de standard international, ce qui oblige les compagnies à envoyer leurs appareils en Europe, au Moyen-Orient ou en Asie pour l’entretien. Cette dépendance accroît les coûts logistiques et allonge les délais d’immobilisation, surtout en période de pénurie de pièces et de capacités industrielles.

1 AFRA

Selon l’Association des compagnies aériennes africaines (AFRAA), la flotte commerciale africaine comptait 695 avions en 2023, aucun n’étant fabriqué localement et la plupart étant réparés à l’étranger. D’après ses estimations, 1650 nouvelles livraisons sont prévues au cours des 20 prochaines années.

À cela s’ajoute le prix élevé du kérosène, 17 % plus cher en Afrique qu’ailleurs selon l’IATA, les taxes et redevances 12 à 15 % plus élevées, ainsi que les coûts d’assurance excédant de 6 à 10 % la moyenne mondiale. Un ensemble d’éléments limitant les marges des compagnies africaines, qui en 2024, ont gagné en moyenne à peine 1 $ par passager transporté, contre plus de 27 $ au Moyen-Orient et une moyenne mondiale de 7,2 $.

Des leviers pour renforcer la résilience africaine

Face à la crise, l’IATA invite les acteurs du secteur à ouvrir davantage le marché secondaire, à améliorer la transparence des chaînes d’approvisionnement et à accroître les capacités locales de réparation et de fabrication. Ces recommandations valent particulièrement pour l’Afrique, où plusieurs initiatives émergent déjà. Ethiopian Airlines investit dans son centre MRO d’Addis-Abeba, tandis que le Maroc et l’Afrique du Sud développent des zones industrielles aéronautiques axées sur la sous-traitance et la maintenance.

Lire la suite

 

 

Henoc Dossa

 

 

Source : Agence Ecofin

 

 

Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source www.kassataya.com

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page