Si l’ataraxie représente, pour le philosophe, le rivage tranquille de la sérénité, elle devient, dans l’océan du soufisme, un état de grâce nommé « Sakina ». Nous tenterons d’expliquer comment cette absence de trouble n’est plus seulement une discipline de l’esprit, mais une illumination du cœur par la proximité spirituelle. Pour mener à bien cette tentative d’explication, nous utiliserons la question ci-dessous comme passerelle afin d’éclairer notre point de vue : quelle est l’essence même de la quête de sens ? Bien évidemment, la réponse à cette question varie selon nos niveaux d’interprétation, d’entendement et de maturité spirituelle. Pour nous, la quête de sens ne garantit certes pas une vie facile, mais elle permet une vie plus consciente, plus riche et plus sereine. La recherche de sens nous pousse à nous interroger sur nos propres valeurs, nos désirs profonds et ce qui compte vraiment pour nos vies. Par conséquent, elle nous conduit vers une vie plus authentique et alignée avec nous-mêmes, sans être voilée par les illusions, les idées non créatrices de valeur et les mythes de ce monde-mirage. Dans la vie, ce qui importe le plus n’est pas tant la quantité de connaissance acquise ou le travail accompli en lui-même, mais l’impact qu’ils produisent dans notre environnement. C’est en ce sens que Will Durant résume souvent la pensée d’Aristote par : « Nous sommes ce que nous faisons de manière répétée. L’excellence n’est pas un acte, mais une habitude. » Ainsi, pour atteindre l’excellence dans n’importe quel domaine, il s’agit avant tout de transformer nos habitudes afin de tendre vers ce que nous pourrions appeler un « moment de génie ».
Les savoirs livresques et traditionnels, transmis à travers les temples visibles du savoir, nous enseignent l’art de subsister dans le monde. Les épreuves, les échecs, les maladies et la mort, quant à eux, deviennent des maîtres silencieux qui nous initient à la réalité profonde de l’existence. Mais la connaissance gnostique (Al Ma’rifa) des maîtres soufis ouvre une autre porte : elle nous conduit vers la reconnaissance du sens caché, vers la vérité intime de notre véritable Soi. Ainsi, ces trois degrés de l’enseignement sont indispensables à celui qui est véritablement « Mukallaf », c’est-à-dire responsable de sa quête de sens et conscient de son engagement existentiel. Lorsque ce triptyque est incarné en profondeur, le voile du monde se dissipe. Tout ce qui paraît immense aux yeux des hommes, savoir, statut social, élévation spirituelle ou richesse matérielle se révèle n’être qu’un mirage. Dès lors, rien ne peut nous détourner du Réel (la Certitude absolue (Al-Yaqin)), car le cœur demeure établi dans la vérité de l’Être. Nous devons apprendre à examiner nos croyances, à clarifier nos désirs, à accepter nos limites et à démystifier la mort, en l’acceptant et en « mourant avant de mourir ». Ces principes constituent le véritable chemin vers la simplification de nos vies. Ainsi, pour goûter à la sérénité, il est impératif d’emprunter quotidiennement ce chemin. C’est pourquoi nous pouvons affirmer que le véritable soufi n’est pas celui qui se complaît dans les grands discours. Il se révèle dans les décisions silencieuses que personne n’applaudit.
Pourtant, chacun les ressent au fond de lui-même, en silence. Un jour, ils se souviendront alors de ce soufi non pas pour ce qu’il disait ou faisait tout au long de la journée, mais pour ce qu’il était, et pour ce qu’il continue d’incarner silencieusement. Donc, un véritable soufi ne cesse jamais d’être ce qu’il est appelé à être; il arrête simplement de vouloir devenir ce que la société aimerait qu’il soit, à travers des fables, des manipulations et des mythes. Heureusement, la méthodologie de Cheikh Tijani (rta) offre un remède précis : la pratique assidue des litanies quotidiennes agit comme une véritable discipline de l’âme. Pour le disciple fidèle, cette « posologie » spirituelle n’est pas qu’une simple récitation, elle est le chemin direct vers l’ataraxie. Cet état de paix profonde et d’imperturbabilité devient alors le sens même de l’engagement du « Mukallaf », transformant sa quête en une sérénité inébranlable face aux tourments du monde. Avant de conclure, nous allons paraphraser notre maître à penser, Cheikh Ibrahima Niasse (rta), en disant qu’il faut noter que notre tranquillité découle du fait qu’aucun bienfait, matériel ou immatériel, d’une créature ne pourrait nous troubler. Nous sommes convaincus de naviguer en toute sérénité vers l’océan du sens de la vie.
Pour nous, Cheikh Ibrahima Niasse (rta), au-delà de son identité africaine, est un pôle spirituel accompli, un panafricaniste hors pair, un théologien enraciné dans la science sacrée et un soufi authentique ayant atteint les stations les plus élevées de la gnose. Il incarne la synthèse vivante des spiritualités pures, héritées des traditions prophétiques, pleinement réalisées à la lumière de l’islam. C’est pourquoi la profondeur de sa pensée demeure voilée pour ceux qui se limitent aux formes extérieures du savoir. Son enseignement ésotérique, est souvent rejeté par certains pseudo-oustaz, intellectuels ou universitaires, prisonniers d’une lecture superficielle, incapables de goûter à la sève spirituelle qui nourrit l’âme et illumine le cœur. Nous affirmons, avec une conviction profonde, qu’une vie qui ne s’abreuve pas à la sève philosophique et spirituelle s’éloigne de sa Source, stagne dans l’exil intérieur et finit par s’égarer dans l’oubli de sa propre existence. Enfin, à l’adresse des esprits sceptiques qui réfutent tout sans argumenter, rappelons cette pensée de Paulo Coelho: « Rien n’est totalement faux dans ce monde. Même une horloge arrêtée donne l’heure juste deux fois par jour ». Il n’est donc aucune idée dont on ne puisse tirer une leçon. Par la grâce divine, nous avons le privilège d’être guidés par la pendule des maîtres soufis, dont la précision spirituelle nous révèle, à chaque pas, le moment idéal pour progresser vers la « Sakina ». Sur ces mots, nous vous souhaitons une très belle année, santé et longévité entourés de vos proches. A la prochaine, inshaAllah !
@Yoo Alla Faabo en, Suura en.
Abdel GUISSE Informaticien
Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source www.kassataya.com




