La Tribune – En marge de l’Africa Investment Forum 2025 tenu la semaine dernière à Rabat, la Banque européenne d’investissement (BEI) a annoncé un prêt de 125 millions de dollars en faveur de la Société nationale industrielle et minière (SNIM) en Mauritanie. Aux côtés de la Banque africaine de développement (BAD), qui débloque 150 millions de dollars, l’institution financière européenne entend accompagner le plan de croissance du principal producteur mauritanien de minerai de fer. La SNIM ambitionne en effet de tripler la production nationale à 45 millions de tonnes d’ici 2031, contre environ 15 millions de tonnes attendues cette année.
Le financement cumulé de 275 millions de dollars, garanti par l’Union européenne, permettra à la SNIM de construire 42 kilomètres de nouvelles voies ferrées, de réhabiliter l’infrastructure existante et d’acquérir locomotives, wagons et équipements de maintenance. S’ils ne sont pas injectés directement dans l’exploitation, ces investissements renforceront néanmoins la chaîne logistique de la compagnie et contribueront à ses objectifs de production, a indiqué son PDG, Mohamed Vall Mohamed Telmidy.
Partenariats et croissance interne
Pour tripler la production de minerai de fer en moins de dix ans, la SNIM ne mise pas uniquement sur ses capacités internes. Son plan stratégique adopté en avril 2024 prévoit de porter sa propre production à 24 millions de tonnes d’ici 2031, contre 14,2 millions vendues l’an dernier, un niveau déjà record. Mais la compagnie s’appuie aussi sur plusieurs partenariats destinés à soutenir la hausse de la production nationale.
Avec le suisse Glencore, la SNIM dispose depuis les années 2010 d’une coentreprise détenue à parts égales pour développer le projet El Aouj, dans le Tiris Zemmour. Doté de réserves de 4,4 milliards de tonnes, le gisement peut produire plus de 11 millions de tonnes par an grâce à deux unités industrielles de 5,65 millions de tonnes chacune. Le financement, estimé à près de 1,4 milliard de dollars, tarde cependant à être finalisé malgré l’intérêt manifesté par des agences de crédit à l’exportation de la Finlande et de l’Allemagne, ainsi que par la SFI et la BAD. Un troisième actionnaire a été annoncé en 2024, sans qu’un accord définitif ne soit publiquement annoncé. Une décision finale d’investissement est prévue d’ici fin 2025.
Le second partenariat majeur repose sur la coentreprise formée avec la société saoudienne Hadeed. L’État mauritanien détient 10 % du capital, contre 45% pour la SNIM et 45 % pour Hadeed. Ce projet concerne le gisement de Guelb Atomai, qui renferme 559,9 millions de tonnes de réserves et peut fournir 10 millions de tonnes de pellets par an, des boulettes destinées à une utilisation directe dans les hauts fourneaux. Une décision finale d’investissement est attendue au premier trimestre 2026, pour une mise en service envisagée au quatrième trimestre 2029.
Un marché à surveiller
Si la SNIM n’en fait pas souvent état publiquement, la concrétisation de ses ambitions de croissance dépendra aussi de l’évolution du marché mondial du minerai de fer. Déjà en 2018, un environnement de prix dégradé avait conduit la compagnie et Glencore à geler El Aouj. Le contexte est aujourd’hui plus favorable – les cours se maintiennent au-dessus de 90 dollars la tonne, contre 60 à 70 dollars en 2018 – mais des pressions baissières persistent. Selon la Banque mondiale, une contraction de 10% en glissement annuel est attendue cette année, suivie de nouvelles baisses de 4 % en 2026 et 2027, sous l’effet de l’entrée en production de Simandou en Guinée et de la hausse de l’offre australienne et brésilienne.
Dans ce contexte, la capacité de la SNIM et de ses partenaires à mobiliser les financements nécessaires restera déterminante. La compagnie, contrôlée à 78,35% par l’État, dispose néanmoins de leviers supplémentaires. Elle veut progresser dans la chaîne de valeur en portant la transformation locale du minerai à 31% de sa production d’ici 2031, puis 45% en 2045. Elle mise également sur une réduction de ses coûts d’exploitation grâce à des sources d’énergie plus compétitives, comme le gaz naturel et l’hydrogène vert.
Emiliano Tossou, Agence Ecofin
Source : La Tribune
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