A Londres, les Européens à la recherche d’un plan de paix pour l’Ukraine

Les Français plaident pour une trêve d’un mois dans la guerre opposant Moscou et Kiev, malgré la difficulté de contrôler un cessez-le-feu sur un front aussi vaste.

Le Monde  – Depuis quelques semaines, le premier ministre britannique, Keir Starmer, montre qu’il veut peser dans le débat sur la sécurité du continent européen, qui s’est spectaculairement accéléré depuis que Washington a pris langue avec Moscou pour mettre fin au conflit en Ukraine.

« Nous sommes à la croisée des chemins », a prévenu le leader travailliste, dimanche 2 mars, à l’issue du sommet qu’il présidait à Londres, auquel étaient conviés 18 dirigeants, dont le Français, Emmanuel Macron, l’Italienne, Giorgia Meloni, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte.

Cette réunion avait été convoquée par Downing Street, il y a une semaine, mais elle a pris une tournure dramatique après l’humiliation qu’ont fait subir Donald Trump et le vice-président américain, J. D. Vance, au président ukrainien, Volodymyr Zelensky, dans le bureau Ovale de la Maison Blanche, vendredi 28 février.

Face au duo s’en prenant brutalement à un dirigeant qu’ils considèrent comme un héros, les Européens sont confrontés à l’urgence de sauver ce qui peut l’être de la relation entre Washington et Kiev, et, au-delà, de l’ordre occidental garanti par les Américains depuis quatre-vingts ans. De Londres, Keir Starmer a expliqué que le Royaume-Uni travaillait de concert avec la France à un « plan de paix » en Ukraine, pour « faire cesser les combats », un plan que les deux dirigeants ont l’intention de discuter avec les Etats-Unis, comme esquissé lors de leurs visites respectives à Washington, fin février.

Les Français proposent d’abord une trêve d’un mois – consistant en la fin totale des opérations russes « dans les airs, sur les mers, et les infrastructures énergétiques », a précisé Emmanuel Macron, dimanche soir, au Figaro. Le président français a cependant concédé qu’il serait « très difficile » de contrôler un cessez-le-feu sur le terrain, étant donné la longueur de la ligne de front russo-ukrainienne (1 000 kilomètres). Cette trêve – sur laquelle les Britanniques restent très discrets – devrait donc être entourée de conditions vérifiables, supposant des engagements russes, comme l’arrêt des bombardements sur les structures vitales ou les centres urbains. Dimanche, Volodymyr Zelensky a rappelé son opposition à tout cessez-le-feu qui ne serait pas accompagné de garanties de sécurité.

Un plan qui nécessite un « fort soutien des Etats-Unis »

Le plan franco-britannique, en cours d’élaboration, défendrait un accord de paix crédible et durable, à plusieurs dimensions – des questions territoriales aux garanties de sécurité, en passant par la reconstruction de l’Ukraine. Keir Starmer a rappelé qu’il était prêt, comme les Français, à participer, dans un second temps, à l’envoi « de troupes au sol et d’avions dans les airs » pour constituer une force de maintien de la paix dans l’hypothèse d’un cessez-le-feu consolidé.

« Nous ne pouvons pas accepter un accord de paix faible, que la Russie peut violer facilement, comme celui de Minsk [signé en 2014 pour tenter, en vain, de mettre un terme aux combats entre les séparatistes du Donbass et Kiev] », a expliqué le Britannique. Aux yeux de Londres et de Paris, pour qu’un cessez-le-feu soit crédible, il doit s’accompagner d’un retrait partiel des forces russes, car il s’agit du meilleur moyen pour réduire les risques.

Pour fonctionner, ce plan nécessite cependant un « fort soutien des Etats-Unis », a insisté Keir Starmer : un appui sécuritaire à même de dissuader le président Vladimir Poutine de se lancer dans une nouvelle guerre, quand l’armée russe aura reconstitué ses troupes et ses stocks de munitions. Emmanuel Macron et Keir Starmer sont déjà allés réclamer à Donald Trump ce backstop (« filet de sécurité ») américain, censé éviter une confrontation directe entre les troupes européennes et les forces russes, lors de leurs visites respectives à la Maison Blanche. Sans résultat pour le moment.

Dans le cadre de ce plan de paix, qui doit être suffisamment solide pour convaincre le président américain, « les Européens doivent prendre la principale part du fardeau », a précisé le dirigeant britannique, qui avait annoncé, le 25 février, la hausse des dépenses de défense de son pays de 2,3 % à 2,5 % du produit intérieur brut (PIB) dès 2027. M. Macron suggère que chaque Etat européen consacre entre 3 % et 3,5 % de son PIB à la défense.

Keir Starmer a appelé, dimanche, d’autres pays à former une « coalition des bonnes volontés » pour s’associer à cet effort franco-britannique, sans pour autant susciter de ralliement public de la part des autres dirigeants présents quant à l’idée d’envoyer des troupes en Ukraine. Tous les participants au sommet ont certes accepté la nécessité d’un réarmement rapide des Européens. « Nous devons nous préparer au pire », a souligné Ursula von der Leyen.

Il n’est pas question d’envoyer des soldats italiens, a déclaré Giorgia Meloni, à la sortie de Lancaster House, le palais où avait lieu la réunion. La dirigeante d’extrême droite italienne, qui, jusqu’à présent, a montré un constant soutien à l’Ukraine, a estimé que le plan franco-britannique avait « encore besoin d’être discuté ». Celle qui entretient des rapports très cordiaux avec l’administration Trump a surtout insisté sur la nécessité d’éviter « tout risque de division de l’Occident ». « Nous essayons de faire bouger les choses. Et nous avons besoin de l’Italie, d’une Italie forte qui agit aux côtés de la France, de l’Allemagne, dans le concert des grandes nations », a observé Emmanuel Macron, dans un entretien au quotidien italien Il Foglio.

Les dirigeants espagnol, polonais ou allemand – le chancelier sortant, Olaf Scholz, a fait le déplacement à Londres – sont aussi restés discrets. Tout comme le ministre des affaires étrangères turc, Hakan Fidan, également convié dans la capitale britannique. La présence de ce dernier au sommet était significative, la Turquie disposant de la deuxième armée, derrière les Etats-Unis, au sein de l’OTAN, et étant l’un des principaux pourvoyeurs de drones à l’Ukraine.

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  (Londres, correspondante) et

 

 

Source : Le Monde

 

 

 

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