Dégâts des eaux, inondations, flaques d’eau géantes, routes transformées en lacs, circulation encombrée, travailleurs bloqués à la maison… comme pour compléter le bilan présidentiel, la pluie qui s’est abattue la semaine dernière sur la capitale Mauritanienne montre Nouakchott sous un jour peu glorieux.
Malgré le caractère cyclique du phénomène, les populations de Nouakchott se retrouvent toujours piégées dès que le ciel se met à déverser quelques gouttes de pluie. C’est que cette capitale construite ex nihilo à la veille de l’indépendance semble n’avoir jamais été programmée pour faire face aux moindres perturbations.
A titre d’exemple, il n’existe aucun système de drainage ou de récupération des eaux de ruissellement. Situation que déplore au micro de KASSATAYA, M. Hamzat Ould Amar, le jeune Directeur Général de l’ONAS, l’organisme créé en 2009 pour gérer les problèmes d’assainissement en Mauritanie. Au milieu des années 1960, un réseau d’assainissement avait été aménagé pour couvrir l’ensemble de la capitale à l’époque (l’actuel centre-ville). Mais il ne s’agissait que d’un système de récupération et de traitement des eaux usées. En 1976, une extension avait été faite pour les quartiers Ilot K, Ksar et Tevragh Zeina. Mais faute de raccordement au réseau existant l’extension n’a jamais été fonctionnelle. Résultat, dans les quartiers où le sol est peu poreux, les habitants n’ont comme seuls recours que les camions citernes et… l’évaporation.
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Les différents services se renvoient la balle. « Ce n’est pas de la compétence de Communauté Urbaine de Nouakchott » confie à KASSATAYA un haut responsable de cette institution joint mardi. S’agissant de l’assainissement, poursuit la source, « l’Etat a créé un Office National de l’Assainissement qui doit s’occuper des canalisations et du reste. Quant au ministère de l’intérieur, il est chargé de l’exécution d’un plan d’assistance aux populations sinistrées. Le plan ORSEC est en principe mis en œuvre à travers la Wilaya et la Protection Civile (les pompiers). La CUN n’intervient qu’en appoint notamment avec ses deux camions-citernes. »
De leur côté, les sources au sein de l’Etat approchées par KASSATAYA font une autre lecture de la situation. « L’Etat construit les routes mais c’est la Communauté Urbaine de Nouakchott qui doit s’occuper de l’assainissement. »
Les responsabilités sont à chercher à plusieurs niveaux selon M. Ould Amar. D’abord le changement climatique qui touche le monde entier. Ensuite les autorités successives qui n’ont pas pris des mesures préventives. Enfin les populations qui manquent souvent de civisme. En attendant des mesures sur le long terme, l’ONAS pare au plus pressé. Huit camions-citernes sont à pied d’œuvre « 24h/24 pour pomper l’eau. Nous avons privilégié les accès aux bâtiments publics, les hôpitaux, les mosquées, les marchés… Sur ce plan, nous avons couvert 80% de nos objectifs. Nous couvrirons l’ensemble des quartiers de Nouakchott mais nous ne pouvons pas dire quand » confie M. Ould Amar.
Dans l’urgence, le réseau des eaux usées a été mis à contribution pour évacuer les eaux de pluie. « Nous sommes obligés d’agir ainsi : Nouakchott est la capitale du pays, sa vitrine pour le monde et c’est la ville qui accueille le tiers de la population nationale. Qu’à Dieu ne plaise, si nous nous retrouvons avec une épidémie, c’est tout le pays qui sera touché dans les 72 heures »
Et pour le plus long terme ? « Des études ont été conduites pour doter la capitale d’un réseau d’assainissement plus complet. Il couvrirait l’ensemble de la ville et comprendrait un système de récupération et de traitement des eaux pluviales. Le financement a été obtenu et l’appel d’offre sera lancé avant la fin de l’année ou au tout début de l’année 2014. Il faudra ensuite compter deux ans de travaux avant la livraison prévue en 2016 au plus tard. » Sous réserve de dépasser le stade du vœu pieux.
En attendant, et face à la défaillance de la puissance publique (sic), chacun fait comme il pleut. Les plus téméraires des Nouakchottois qui ne peuvent pas rester confinés chez eux s’arment de bottes quand ils le peuvent. D’autres relèvent le boubou et le seroual -un pantalon bouffant- et se résolvent à affronter les dangers d’une eau stagnante devenue verdoyante. Ils ne se doutent sans doute pas que certains habitants vident le contenu de leurs fosses dans la rue, sous prétexte que l’Etat procédera à l’évacuation des eaux stagnantes. Situation qui inquiète le Directeur Général de l’ONAS au point de lancer un appel aux citoyens : « Nous interviendrons pour évacuer les eaux mais nous ne savons pas quand. Vous mettez vos vies en danger ainsi que la santé de tous les citoyens. »
Quelques jours seulement après sa « Rencontre avec le peuple » à Néma, le président Ould Abdel Aziz devra ajouter cette tache à son bilan : quand il pleut à Nouakchott, c’est le calvaire. Certains citoyens ironisent sur l’impossibilité dans laquelle ils se trouvent de pouvoir vaquer à leurs occupations comme par exemple se rendre dans un bureau de vote si les élections devaient être organisées en pleine saison des pluies. Pas sûr que ceux-là ne se le rappellent pas au moment de jeter leur bulletin dans l’urne.
Abdoulaye DIAGANA pour www.kassataya.com
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