
Courrier international – “En choisissant de frapper au Qatar, un État du Golfe qui mène les négociations de cessez-le-feu et de libération des otages israéliens à Gaza” et “qui abrite la plus grande base militaire américaine de la région”, Israël a “fait sauter une nouvelle digue”, analyse l’Orient-Le Jour.
L’État hébreu a annoncé mardi 9 septembre avoir ciblé des responsables du Hamas dans des frappes à Doha, mais le mouvement islamiste palestinien a assuré que les négociateurs visés avaient survécu, tout en faisant état de six morts dans l’attaque.
“L’attaque n’a pas réussi à éliminer les hauts dirigeants du Hamas, mais elle a en tout cas détruit l’un des rares canaux permettant d’arrêter le conflit”, note l’éditorialiste du Washington Post David Ignatius, qui estime qu’il s’agit là d’une “rare erreur tactique israélienne”.
Selon le journaliste, “les responsables qataris”, qui jouent un rôle de médiateur dans le conflit, “ont été choqués par l’attaque et se sont sentis trahis. Des sources qataries m’ont confié qu’Israël et les États-Unis leur avaient promis le mois dernier que les responsables du Hamas ne seraient pas ciblés sur leur territoire. Cette promesse s’est révélée vide.”
“Le pays a subi un coup énorme. Les Qataris s’étaient attachés à consolider leur position d’allié indispensable des États-Unis au Moyen-Orient. Doha avait su gagner la faveur du président américain Joe Biden et semblait également avoir séduit Trump”, remarque le Times of Israel.
“Il n’y a plus de diplomatie”
Le journaliste de la BBC Jeremy Bowen rappelle que, “ces dernières décennies, le Qatar avait tenté de se forger une position de ‘Suisse du Moyen-Orient’, en devenant un lieu où même les ennemis pouvaient conclure des accords”. Les efforts de paix menés par l’envoyé du président Trump, Steve Witkoff, “étaient certes en train d’échouer gravement” ces derniers mois, souligne-t-il, “mais aujourd’hui ils sont en ruines. Pour reprendre les mots d’un haut diplomate occidental : ‘il n’y a plus de diplomatie’”, conclut le journaliste.
Le ciblage inédit du Qatar par Israël représente également “un choc pour les autres États du Golfe, inquiets d’être pris pour cible à leur tour, alors que Tel-Aviv ne semble plus avoir de frein pour frapper à sa guise tout pays de la région, y compris les alliés des États-Unis”, analyse L’Orient-Le Jour. La frappe israélienne “remet ainsi en question les leviers que l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Qatar pensaient détenir sur Donald Trump, en lui promettant des milliers de milliards de dollars d’investissements lors de sa visite dans le Golfe en mai dernier. En effet, soit le président américain ne s’est pas opposé au raid, soit Israël s’est estimé en position d’agir sans l’en informer au préalable”.
À la Maison-Blanche, “des justifications floues”
Mardi soir, “les justifications de la Maison-Blanche demeuraient floues”, observe Le Temps, “après une journée d’explications contradictoires du président et de son administration”.
La porte-parole de la Maison-Blanche, Karoline Leavitt, a affirmé que, sous instruction de Donald Trump, Steve Witkoff avait informé Doha avant les événements. Ce que le Qatar, dont un membre des forces de sécurité a été tué dans l’attaque, a immédiatement réfuté. Tout en condamnant la frappe israélienne, Karoline Leavitt a par ailleurs affirmé qu’“éliminer le Hamas, qui a profité de la misère de ceux qui vivent à Gaza, constitue un but louable”.
Un peu plus tard, Donald Trump a, lui, critiqué l’attaque israélienne. “Je ne suis pas ravi” et “je suis très mécontent”, a dit le président américain pendant un bref échange avec la presse, niant qu’Israël l’avait prévenu.
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