Football : le montant des transferts des joueurs africains augmente

Age, statut du club, exposition sur les réseaux sociaux… Plusieurs critères interviennent pour évaluer le prix d’un joueur, ce qui permet aux meilleurs footballeurs africains d’évoluer « dans les cinq plus grands championnats européens ».

Le Monde – Le Camerounais Bryan Mbeumo n’est pas le joueur le plus connu de la planète, mais il est, depuis mardi 22 juillet, le footballeur africain le plus cher de l’histoire. Pour le recruter, Manchester United a versé 81 millions d’euros à Brentford, son ancien club. D’autres transferts, dont ceux de l’Egyptien Omar Marmoush, de l’Eintracht Francfort à Manchester City, pour 75 millions d’euros, en janvier, du Nigérian Victor Osimhen, acheté 75 millions d’euros par les Turcs du Galatasaray Istanbul à Naples, et de Yoane Wissa, l’attaquant de Brentford et des Léopards de la République démocratique du Congo, débauché de Brentford par Newcastle United pour 63 millions d’euros dans les dernières heures du mercato estival, le 1er septembre, rappellent que l’écart avec les Européens ou avec les Sud-Américains a tendance à se réduire.

Le Marocain Achraf Hakimi (PSG) est ainsi valorisé à 80 millions d’euros et le Nigérian Ademola Lookman (Atalanta Bergame) à 60 millions d’euros. « Les meilleurs joueurs africains évoluent presque tous dans les cinq plus grands championnats européens, ils y sont titulaires et performants. Cela explique qu’ils aient une valeur importante », assure Moustapha Diop, président de l’Association des agents de football du Sénégal. D’autres critères interviennent par ailleurs pour évaluer le prix d’un joueur. « Il y a l’âge, le statut du club où il évolue, son poste – un attaquant est souvent plus cher même si la valeur d’éléments défensifs augmente –, s’il est international et pour quel pays, poursuit Moustapha Diop. Plus un joueur est exposé, plus il prend de la valeur. » Parmi les plus cotés apparaissent essentiellement des joueurs représentants les meilleures sélections africaines (Algérie, Maroc, Egypte, Sénégal, Côte d’Ivoire, Cameroun, Nigeria).

Certains des footballeurs africains les mieux valorisés sont nés en Afrique, et y ont, pour plusieurs d’entre eux, effectué une partie de leur formation et même commencé leur carrière professionnelle. L’agent français Bruno Satin, excellent connaisseur du continent, en explique les raisons. « En Afrique, je voyais des joueurs très doués avec un gros potentiel. Mais ils valaient dix ou vingt fois moins cher que des joueurs brésiliens, à niveau égal. Il y a donc des académies, au Mali, en Côte d’Ivoire ou au Sénégal qui ont fait en sorte d’améliorer la formation des joueurs, pour leur permettre, quand ils arrivent en Europe, d’être rapidement opérationnels. »

Des carrières européennes

Les clubs européens, dont certains sont partenaires d’académies africaines – tel que le FC Metz avec Génération Foot Dakar, où a été formé Sadio Mané –, ont également renforcé le suivi des joueurs à fort potentiel, nombreux en Afrique. Depuis les années 1990, beaucoup d’académies ont vu le jour en Afrique et le phénomène s’est accéléré au XXIe siècle. Plusieurs d’entre elles : Diambars, Génération Foot, Dakar Sacré-Cœur au Sénégal, ASEC Mimosas en Côte d’Ivoire, JMG Football, Centre Salif-Keita au Mali, Kadji Sports Academy, école de football Brasseries au Cameroun, Paradou AC en Algérie ou l’Académie Mohammed VI de football au Maroc, essentiellement créées par d’anciens joueurs ou par des hommes d’affaires, ont formé de nombreux joueurs ayant ensuite percé en Europe.

Il est fréquent que des joueurs quittent leur pays pour rejoindre dans un premier temps un championnat européen moins relevé que ceux du Top 5 (Angleterre, Allemagne, France, Espagne, Italie) et s’y révèlent avant d’être recrutés par de grands clubs, en citant l’exemple du défenseur burkinabé Edmond Tapsoba.

« Il est arrivé au Portugal à 18 ans, où il a fait de bonnes performances, le Bayer Leverkusen [Allemagne] l’a acheté 20 millions d’euros [en 2020], et aujourd’hui, il en vaut plus du double. C’est la preuve que son club au Burkina Faso [Salitas FC] avait déjà bien travaillé en amont », poursuit Bruno Satin. Des exemples comparables à Edmond Tapsoba sont nombreux : on peut ainsi citer l’Algérien Mohammed Amoura, le Camerounais Carlos Baleba, le Nigérian Victor Boniface ou l’Ivoirien Ousmane Diomande. La valeur de ces joueurs oscille entre 32 et 50 millions d’euros.

« Influence sur la vente de maillots »

L’ancien international sénégalais Ferdinand Coly n’est pas surpris par cette augmentation significative de la valeur marchande des joueurs africains. « Bien sûr, un binational vaudra souvent plus cher car il est né en Europe et y a été formé, ce qui offre certaines garanties. Mais on voit que le niveau ne cesse de s’améliorer, et en Afrique, il y a dans plusieurs pays un travail de fond au niveau de la formation. Dans tous les domaines – physique, tactique, technique, mental –, les joueurs sont plus forts et la valeur des Africains ne cessera d’augmenter. » Cela concerne également des joueurs originaires de pays plus modestes à l’échelon international, tel que le Gambien Yankuba Minteh, formé à Steve Biko FC, et qui, après des passages au Danemark et aux Pays-Bas, a été recruté en 2024 pour 35 millions d’euros par Brighton (Angleterre).

Loin de toutes considérations purement sportives, un autre critère est à prendre en compte au moment d’établir le prix d’un joueur, comme le précise Vincent Chaudel, cofondateur de l’Observatoire du sport business. « [L]a présence [du joueur] sur les réseaux sociaux et le nombre de ses followers vont déterminer sa valeur marketing. Car cela va avoir une influence sur la vente de maillots floqués à son nom, et qui va rapporter beaucoup d’argent à son club », explique Vincent Chaudel.

Le cas de Mohamed Salah, qui fait partie des dix joueurs les plus suivis de la planète, avec 66 millions d’abonnés sur Instagram, est significatif, et explique en partie pourquoi il est, à 33 ans, toujours valorisé à 50 millions d’euros. « [Mohamed] Salah coche toutes les cases, conclut Vincent Chaudel. C’est un attaquant de classe mondiale, il joue dans un grand club [Liverpool] du meilleur championnat de la planète et est international pour une grosse sélection d’un pays de 105 millions. »

 

 

 

Source :  Le Monde – (Le 02 septembre 2025)

 

 

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