
Une interpellation intervenue le 14 août sur fond de purge au sein de l’état-major des forces armées maliennes.
– La situation des espions français en poste en Afrique est de plus en plus menacée, même quand ceux-ci sont dûment déclarés comme tels auprès des autorités locales. Après avoir dû gérer, toute l’année 2024, avec le Burkina Faso la libération de quatre agents de la direction générale de sa sécurité extérieure (DGSE), la France est, de nouveau, confrontée à l’arrestation, au Mali, d’un officier de renseignement affecté à l’ambassade de France.Comme indiqué, mercredi 20 août, par le site Internet du mensuel Jeune Afrique, Bamako a placé un agent français de la DGSE, Yann V., en détention. Les autorités maliennes assurent qu’il est soupçonné d’avoir « mobilisé des responsables politiques, des acteurs de la société civile et des militaires, dont les généraux de brigade Abass Dembélé et Nema Sagara » dans le cadre d’une présumée conspiration.
Une dizaine d’officiers et de hauts gradés maliens sont également interrogés par la Sécurité d’Etat (SE), les services secrets maliens. Ce groupe de personnes aurait eu pour projet de destituer le pouvoir en place. En 2024, le Niger avait proféré des accusations similaires à l’égard de Paris et de ses agents.
Cet espion français était présent sur le sol malien sous sa véritable identité et accrédité comme agent diplomatique. Il bénéficie, à ce titre, de l’immunité réglementée par la convention de Vienne de 1961, ratifiée par le Mali depuis 1968. Affecté à l’ambassade de France en qualité de deuxième secrétaire, ce militaire de carrière était en poste depuis un an. Les autorités maliennes ont dévoilé son visage et diffusé son nom complet, ce qui est également contraire à la réglementation internationale.
« Faire respecter la convention de Vienne »
Selon une source diplomatique française, à Paris, jointe par Le Monde, jeudi, Yann V. était enregistré comme agent de la DGSE auprès des autorités maliennes. Il figurait parmi les personnes contacts dans le cadre de la coopération antiterroriste entre le Mali et la France.
En dépit des tensions politiques existant entre Paris et Bamako à la suite des putschs de 2020 et 2021, puis de l’expulsion de l’ambassadeur de France à Bamako, Joël Meyer, début 2022, les deux pays ont, en effet, poursuivi un dialogue sur le terrain sécuritaire. Les quatre agents de la DGSE arrêtés au Burkina Faso en décembre 2023, puis libérés en décembre 2024, étaient des « missionnaires » non accrédités en qualité de diplomate même si leur mission s’inscrivait également dans le cadre d’une coopération.
Une semaine après l’arrestation de cet agent de la DGSE, le Quai d’Orsay dialogue avec son homologue malien estimant, selon la même source diplomatique française, qu’il ne peut être « question de négocier », ajoutant, « il s’agit de faire respecter la convention de Vienne, le socle des relations internationales ». L’immunité diplomatique interdit, notamment, toute arrestation ou détention dans un pays tiers et la divulgation de l’identité. Ce statut garantit une protection physique absolue. Les autorités maliennes pouvaient, si elles le désiraient, le déclarer persona non grata et demander son expulsion. Selon Jeune Afrique, l’intéressé n’avait reçu, jusqu’au mercredi 20 août au soir, aucune visite dite « consulaire », à savoir celle d’un membre de l’ambassade ou d’un représentant officiel.