Purge – La junte malienne garde le silence après une vague d’arrestations parmi des officiers

Une quarantaine de hauts gradés soupçonnés de tentative de déstabilisation du régime ont été interpellés, selon “Tama Media”. Une purge qui intervient alors que le général Assimi Goïta, chef de la junte au pouvoir depuis 2021, s’est offert un mandat présidentiel de cinq ans, renouvelable sans limitation de durée et sans élection.

Courrier international – Y a-t-il eu une tentative de coup d’État au Mali ? Le site panafricain Tama Media pose la question, en livrant ce fait troublant : “Près de quarante officiers ont été interpellés au Mali ces derniers jours. Les arrestations se sont poursuivies dimanche 10 août avec de nouvelles interpellations. Les sources évoquent qu’au moins 37 hauts gradés ont été mis aux arrêts.”

Le pouvoir de Bamako est resté mutique sur ces arrestations en série. “Des sources proches des autorités parlent d’une opération visant des officiers accusés de vouloir perturber la transition, tandis que d’autres y voient une manœuvre pour écarter des personnalités influentes de l’armée”, poursuit ce média.

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Quant à l’identité des officiers mis aux arrêts sur fond de soupçons de tentative de renversement de la junte, les informations divergent. Tama Media avance le nom du général Abass Dembélé, ancien gouverneur de la région centrale de Mopti, et celui de la générale Nema Sagara, “l’une des figures féminines les plus importantes des forces armées maliennes”.

“Un signal fort”

La BBC dément de son côté ces deux arrestations, tout en confirmant la réalité d’une vague d’interpellations au sein de l’armée. Cette vague intervient alors que le général Assimi Goïta, chef de la junte au pouvoir depuis mai 2021, s’est offert un bail illimité au palais de Koulouba. Selon la charte de la transition révisée et promulguée le 8 juillet, il jouit d’un “mandat présidentiel de cinq ans, renouvelable sans limitation et sans élection” résume Tama Media.

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Alors que des élections avaient été promises en 2024, cette confiscation du pouvoir est “exacerbée par la répression”, qui vise notamment les anciens Premiers ministres Moussa Mara (2014-2015) et Choguel Maïga (2021-2024), ajoute la BBC. “Mara, qui s’est récemment exprimé ouvertement contre le gouvernement militaire, est en détention depuis le 1er août, tandis que Maïga fait l’objet de sanctions judiciaires.”

Ce contexte aurait-il favorisé des mouvements contestataires au sein de la troupe ? “Contrairement à son homologue burkinabè, la junte malienne n’a pas pour habitude de brandir ce type d’accusations à tout-va, ce qui rend les allégations plus crédibles aux yeux de certains observateurs”, note le site d’info guinéen Le Djely. Qui juge que “cet épisode constitue un signal fort : il révèle l’existence d’une contestation qui dément l’image d’unanimisme que le pouvoir s’efforce de vendre à coups de propagande médiatique”.

Frustrations des soldats

Une propagande qui, combinée à la mise au pas des médias nationaux, masque les revers encaissés par les armées, et les éventuelles frustrations des soldats. Dans un article intitulé “L’information de guerre sous contrôle au Sahel”, la radio internationale allemande Deutsche Welle indiquait qu’en 2024 le Niger, le Mali et le Burkina Faso avaient été “l’épicentre du terrorisme mondial” avec 3 885 décès sur 7 555 au total selon les statistiques de l’Indice mondial du terrorisme. Passant généralement sous silence leurs pertes lors des affrontements avec les groupes djihadistes, les militaires au pouvoir – à l’exception du Niger – “assurent, au contraire, reconquérir de larges pans de territoire”.

Cette vague d’arrestations compromet ce type de récit. Conduira-t-elle pour autant Assimi Goïta à changer de cap ? Le Djely s’interroge, sceptique. Et craint, a contrario, de voir le pouvoir militaire malien “s’arc-bouter sur sa position et poursuivre aveuglément une politique de fermeture”.

 

Agnès Faivre

 

 

Source : Courrier international (France)

 

 

 

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