
Au moins sept personnes ont été tuées et des « dizaines » d’autres blessées « par des éléments des forces de l’ordre et des miliciens », d’après plusieurs organisations de défense des droits humains au Togo, à l’issue de manifestations contre le pouvoir de Faure Gnassingbé entre le 26 et le 28 juin à Lomé.
–Les manifestants étaient descendus dans les rues de la capitale togolaise à la suite d’appels lancés sur les réseaux sociaux et relayés par des comptes de Togolais de la diaspora pour protester contre la vie chère, les arrestations d’opposants et la récente réforme constitutionnelle. Grâce à la nouvelle Loi fondamentale, promulguée en mai 2024, le Togo a basculé dans un régime parlementaire dans lequel M. Gnassingbé concentre, en tant que président du conseil, les pouvoirs exécutifs sans limitation de mandats. Agé de 59 ans, il dirige le pays depuis 2005, année de la mort de son père Gnassingbé Eyadéma, lui-même au pouvoir depuis 1967.
Jeudi 26 juin, Lomé faisait figure de ville morte. Nombre de commerces étaient restés fermés et les habitants se cloîtraient chez eux. Selon l’organisation NetBlocks, qui surveille les restrictions d’accès à Internet à travers le monde, les accès à TikTok, Facebook ou encore Telegram avaient été restreints par les autorités.
Dans plusieurs quartiers populaires, tel celui de Bè, des affrontements violents ont opposé des forces de l’ordre à des dizaines de manifestants, qui avaient par endroits érigé des barricades auxquelles ils ont mis feu. Les policiers ont fait usage de gaz lacrymogènes pour les disperser et, selon les organisations de la société civile et de défense des droits humains, mené une « répression sauvage, brutale, et meurtrière ».
Des accusations dont se défend le gouvernement, qui a salué dimanche « le professionnalisme de [ses] forces de sécurité » et dénoncé « des tentatives de récupérations malheureuses » à la suite du « repêchage de corps » dans des lagunes de Lomé. « Trois corps ont été récupérés. Leurs autopsies ont montré qu’ils étaient morts de noyade, à un moment où il y avait de fortes pluies et des crues », affirme au Monde un ministre sous couvert de l’anonymat, qui dément la présence de « miliciens armés » aux côtés des forces de l’ordre. Pas de quoi convaincre les opposants : selon eux, des manifestants ont pu se noyer en essayant de fuir la police.
Promesse de fermeté
« Comme en 2017 et 2018, les autorités togolaises ont eu recours à un usage excessif de la force contre des manifestants qui a conduit à des violations présumées des droits humains. Une enquête indépendante sur ces morts et sur les accusations visant les forces de défense et de sécurité est aujourd’hui nécessaire », estime Fabien Offner, chercheur pour Amnesty international sur le Togo.
Les 5 et 6 juin, de premières manifestations avaient eu lieu à Lomé après l’arrestation, fin mai, du rappeur Aamron, critique du pouvoir de Faure Gnassingbé. Au moins une cinquantaine de personnes, principalement des jeunes, avaient alors été arrêtées. Après ce mouvement de protestation, France 24 et Radio France internationale (RFI) ont été accusées d’avoir relayé des « propos inexacts et tendancieux » par les autorités togolaises et ont été suspendues trois mois. Quant à Aamron, il a été libéré le 21 juin de l’hôpital psychiatrique où il avait été interné.
Fragilisé par ces nouvelles contestations en moins d’un mois, le gouvernement promet la fermeté. « Elles sont lancées depuis l’étranger par des activistes et des influenceurs qui cherchent à créer le chaos pour remettre en cause l’ordre institutionnel. Notre responsabilité est de préserver l’ordre public et la paix civile. Tous ceux qui se livrent au vandalisme répondront de leurs actes devant la justice », assure le ministre précité.
Source :
Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source www.kassataya.com