En Guinée, les voix critiques au général Mamadi Doumbouya sont réduites au silence

Enlèvements, tortures, disparitions… Les personnes engagées contre le pouvoir militaire en place depuis septembre 2021 subissent de plus en plus la répression du régime.

Le Monde – En Guinée, le conseil de l’ordre des avocats a décidé lundi 23 juin de boycotter pendant deux semaines les audiences, mais aussi de se retirer des institutions nationales dont font partie ces membres après l’enlèvement de MMohamed Traoré. L’avocat avait été secouru, samedi matin, à Bangouyah, à une vingtaine de kilomètres au nord de Conakry, la capitale, par l’un de ses confrères. Il est depuis caché dans un lieu tenu secret, « extrêmement affaibli ».

« Je l’ai retrouvé le dos totalement recouvert de plaies. On lui a dit que c’est un avertissement, que la prochaine fois on lui ôtera la vie », témoigne Faya Gabriel Kamano, le bâtonnier de l’ordre des avocats de Guinée. M. Traoré avait été enlevé dans la nuit, chez lui à Conakry, devant sa femme et ses enfants. Selon son épouse, ses ravisseurs étaient en civil mais l’un d’eux portait un pantalon de gendarme.

L’ancien bâtonnier de l’ordre des avocats de Guinée est connu pour ses positions critiques envers les militaires au pouvoir depuis 2021, dirigé par Mamadi Doumbouya. Il avait démissionné le 13 janvier du Parlement de transition, au motif qu’un gouvernement civil aurait déjà dû succéder aux militaires. Le 15 juin, réagissant à la décision des autorités de confier les élections à une administration qu’il estime « totalement politisée et partisane », en lieu et place d’une commission électorale indépendante, il ironisait : « A cette allure, il vaudrait mieux faire comme le Mali et le Niger en se passant d’élections qui vont coûter de l’argent pour des résultats connus à l’avance. »

« Les autorités sont paranoïaques »

L’avocat n’est pas le premier à subir de telles violences, rappelle Alseny Sall, porte-parole de l’Organisation guinéenne de défense des droits de l’homme (OGDH) : « Le mode opératoire est similaire à celui employé contre l’activiste Abdoul Sacko en février. Lui aussi avait été enlevé chez lui en pleine nuit, torturé et abandonné à plusieurs dizaines de kilomètres de Conakry. »

A la différence de MM. Traoré et Sacko, le journaliste Habib Marouane Camara et l’ancien secrétaire général du ministère des mines Saadou Nimaga, disparus respectivement le 17 octobre et le 3 décembre 2024, ne sont jamais réapparus. Foniké Menguè et Billo Bah, deux militants du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), kidnappés le soir du 9 juillet 2024, non plus. Leurs proches n’ont aucune information sur leur sort. « Le point commun de ces personnes enlevées, c’est que ce sont des voix critiques de la junte », pointe Alseny Sall.

Ibrahima Diallo, un autre cadre du FNDC, avait passé, entre 2022 et 2023, près d’un an en prison avec ses deux camarades, après avoir lancé un appel à manifester pour le retour à l’ordre constitutionnel. Il avait ensuite décidé de fuir au Sénégal par la route, après avoir été plusieurs fois empêché de prendre l’avion à l’aéroport de Conakry. Il vit désormais en exil en Europe, comme d’autres cadres du FNDC.

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Source : Le Monde

 

 

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