Iran/Israël : de l’alliance secrète à la guerre ouverte

Retour sur plus de 2000 ans de relations, de l’Antiquité à nos jours. On l’oublie souvent mais, il n’y a pas si longtemps, Israël et l’Iran ont – discrètement – entretenu d’excellents rapports, et Tel-Aviv a même soutenu Téhéran pendant la guerre contre l’Irak (1980-1988)…

The Conversation   – Le 13 juin 2025, Israël lance une attaque contre la République islamique d’Iran, qui réagit rapidement. Depuis, les interrogations se multiplient : légalité des actions israéliennes, avenir du programme nucléaire iranien, ampleur de l’implication des États-Unis après leurs frappes du 21 juin, effets du cessez-le-feu annoncé par Donald Trump le surlendemain, conséquences à court et à moyens terme sur le devenir du régime islamique lui-même…

Ce nouvel épisode guerrier rappelle, une fois de plus, que les logiques géopolitiques peuvent se renverser en fonction des régimes, des idéologies et des perceptions de la menace. L’histoire des relations entre l’Iran et Israël, marquée par une alternance de périodes de proximité et d’hostilité, en témoigne tout particulièrement.

Une mémoire commune : références historiques et symboliques

« Cyrus rendant les vases du temple de Jérusalem », gravure de Gustave Doré, 1866. The Miriam and Ira D. Wallach Division of Art, Prints and Photographs : Picture Collection, The New York Public Library

Les relations entre Iraniens et Juifs remontent à l’Antiquité. L’un des épisodes les plus glorifiés par l’identité iranienne est la libération des Juifs de Babylone en 538 av. J.-C. par Cyrus II le Grand. Ce geste, consigné dans la Bible et gravé sur le célèbre « Cylindre de Cyrus », est aujourd’hui encore cité comme une preuve d’ouverture et de tolérance.

Cette mémoire est mobilisée par Benyamin Nétanyahou lui-même : dans une interview le 17 juin 2025, il déclare que « Cyrus a libéré les Juifs, et aujourd’hui l’État juif pourrait libérer les Perses », avant de réaffirmer cette idée symbolique deux jours plus tard à l’hôpital Soroka de Beersheba, qui venait d’être frappé par un missile iranien.

Au fil de l’histoire, d’autres épisodes renforcent ce lien, comme l’alliance ponctuelle entre Juifs et Sassanides lors de la conquête perse de la Palestine en 614.

La conquête arabo-musulmane (VIIe siècle) modifie la situation des Juifs vivant en Iran, puisqu’ils vont être soumis au statut de dhimmi et feront l’objet, à des degrés divers, de multiples restrictions et discriminations jusqu’à la révolution constitutionnelle (1906) qui reconnaît enfin leur égalité devant la loi.

Avant 1979 : convergences stratégiques

C’est surtout sous la dynastie Pahlavi, avec Mohammad Reza Shah, à la tête de l’Iran de 1941 à 1979, que les relations entre l’Iran et Israël prennent une tournure stratégique.

Si l’Iran ne reconnaît pas officiellement Israël, probablement pour ne pas heurter le clergé chiite, des liens diplomatiques et militaires se nouent discrètement. L’État hébreu est autorisé à ouvrir une représentation à Téhéran, les échanges économiques se multiplient et la coopération militaire se développe.

Le diplomate iranien Reza Saffinia arrive à la maison du président d’Israël Chaim Weizmann à Rehovot le jour de Yom Ha’atzmaut (jour de la déclaration d’indépendance d’Israël), 1950. National Photo Collection of Israel

La convergence repose sur une communauté d’intérêts. Tous deux alliés des États-Unis, les deux pays redoutent la montée du panarabisme. Côté israélien, David Ben Gourion, premier ministre de 1948 à 1954, puis de 1955 à 1963, défend la doctrine de « l’alliance des périphéries » : il s’agit de renforcer les relations avec des puissances musulmanes non arabes comme l’Iran ou la Turquie. Côté iranien, l’objectif est de prendre à revers les voisins arabes hostiles.

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Professeure émérite, Université Libre de Bruxelles (ULB)

 

 

 

 

Source : The Conversation 

 

 

 

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