Si le PSG gagne, j’arrête TikTok, je me tatoue la Tour Eiffel sur le bras… et autres paris fous

Se raser le crâne, se faire tatouer une tour Eiffel étoilée ou encore se remettre avec son ex : au lendemain de la victoire du Paris Saint-Germain en finale de la Ligue des champions, des supporteurs se sont lancé des défis, avec plus ou moins de dérision, pour manifester leur attachement à leur club.

L’Epoque – Une tondeuse, un maillot de l’Olympique de Marseille (OM) et un paquet de cheveux dans les mains. Le lendemain de la finale de la Ligue des champions, remportée par le Paris Saint-Germain (PSG) contre l’Inter Milan (5-0), « Adel en Finlande », influenceur sur TikTok et Snapchat, se rase le crâne. « Si le PSG gagne ce soir, je coupe mes cheveux en live tellement je suis sûr que vous allez perdre », promettait-il dans une vidéo, un jour plus tôt. Son pari a bien été tenu. « Félicitations le PSG, on n’est plus le seul club [français], nous les Marseillais, à avoir gagné la Ligue des champions, vous l’avez mérité, et vous avez mérité que je me fasse la boule à zéro », affirme-t-il ensuite.

Avant la finale, des supporteurs de différents bords – essentiellement du PSG et de l’OM – se sont engagés auprès d’amis, d’utilisateurs de TikTok, ou juste auprès d’eux-mêmes, à relever un défi plus ou moins risqué en cas de victoire du club de la capitale. « Si le PSG gagne la LDC, j’envoie mes seins à tous ceux qui mettent un like », promettait la veille de la finale une certaine Inaya, dans un message sur le réseau social X liké 366 fois. Sam’s, lui, propose d’acheter une Rolex à Ousmane Dembélé en cas d’issue favorable. A la veille de l’affrontement, les « si » furent légion : commencer à réviser le brevet, arrêter de se lisser les cheveux, changer de prénom pour s’appeler Luis, se remettre avec son ex, modifier son caractère… Une manière de rendre encore plus mythique la confrontation avec l’Inter Milan. Pour les supporteurs parisiens, ce geste traduit leur foi en la victoire du PSG. Pour les supporteurs marseillais, c’est une façon de manifester leur foi en sa défaite.

Mohamed Henni, influenceur et supporteur de l’OM, a promis, avant la finale de la coupe d’Europe, de traverser les Champs-Elysées vêtu d’un string si le PSG raflait la coupe aux grandes oreilles. Le lendemain de la finale, l’influenceur n’a pourtant pas paradé sur « la plus belle avenue du monde » en petite tenue. « Je vais appeler [la maire de Paris] Anne Hidalgo pour voir si on peut mettre ça en place », avait-il promis.

L’influenceur a l’habitude de mettre en scène, avec humour, ses analyses et ses réactions aux matchs de football. Il s’est fait connaître en cassant des télévisions à la pioche ou à la main, après les défaites de l’OM. Le défi est un de ses gimmicks. En 2021, il annonce avant un match de coupe de France entre Marseille et l’équipe de Canet-en-Roussillon qu’il projette de traverser nu le centre-ville de la commune des Pyrénées-Orientales. « La vie de ma mère, je fais tout le centre-ville à poil en cavalant. Ce sera rapide, il fait 10 mètres… »

Un récit en deux temps

Ce comique de répétition, qui stimule les réactions des internautes, peut être un levier de visibilité. Le récit du défi se fait en deux temps : le moment de l’annonce, puis la mise en scène du passage à l’acte. Avant le match PSG-Inter Milan, un jeune homme se filme dans un ascenseur et partage une vidéo sur son compte TikTok : « Si le PSG gagne, tout le monde doit envoyer une photo de son ex dans les commentaires, c’est bon ? »

« Le pari associé à la réalisation d’une performance est une pratique qui est plus visible car, avec l’essor des réseaux sociaux, les gens vont mettre en scène ces paris, ce qui va donner des idées à d’autres, analyse Nicolas Hourcade, sociologue à l’Ecole centrale de Lyon et spécialiste du « supportérisme ». Mais ce n’est pas nouveau. Ces défis ont commencé à exister lorsque l’engagement pour un club est devenu quelque chose qui pouvait définir l’identité de certains individus. En France, c’est à partir des années 1970-1980 que l’on voit apparaître des groupes de supporteurs très engagés. »

La promesse capillaire est un motif récurrent. En 2024, à la suite d’un montage photo publié par le rappeur Gradur, Daniel Riolo, chroniqueur sportif, annonce sur le plateau de l’émission « After Foot », sur RMC, qu’il se fera la coupe du joueur parisien Bradley Barcola si le Paris Saint-Germain gagne la coupe d’Europe. Le chroniqueur s’était précédemment attaqué aux tresses du joueur, qui auraient selon lui un impact négatif sur ses performances sportives. « On ne me fera pas croire qu’un joueur peut être performant à très haut niveau avec les trucs qu’il a, qui lui tombent sur la tronche. Ce n’est pas possible. Qu’on ne me dise pas que ça ne gêne pas », avait-il déclaré sur les ondes de RMC, le 17 mars 2024. « C’était un pari positif. Un peu comme les mecs qui disent : je fais le tour de l’église à poil », explique au Monde l’éditorialiste. Après la victoire, samedi 31 mai, du PSG, il n’est pas passé chez le coiffeur. « Je l’aurais fait s’ils avaient gagné l’année dernière, pas cette saison », se défend l’intéressé.

L’excentricité du défi peut être indexée sur la confiance des supporteurs dans leurs pronostics sportifs, ou le degré de soutien pour leur club. « En général, la passion rythme la vie des supporteurs qui font cela et fait partie de leur identité », affirme Nicolas Hourcade. Depuis la victoire du club de la capitale, le salon de tatouage House By NGU, situé à Paris (11e), a vu défiler une soixantaine de supporteurs du PSG venus se faire tatouer une tour Eiffel étoilée et la date du match sur la peau. « On savait qu’on allait gagner, donc il n’y avait pas vraiment de défi. On ne connaissait juste pas le score », affirme Mory Nguyen, 30 ans, un des tatoueurs du salon, qui a revu le match plusieurs fois après le coup de sifflet final.

« Excès masculin »

Le défi est souvent pensé comme une performance. « Ce sont des paris masculins où l’on va mettre le corps en jeu. Ils sont liés à une forme de sociabilité et d’excès masculins, affirme M. Hourcade. Le pari marque aussi une rupture, qui montre qu’on va au-delà de soi-même, que l’on fait quelque chose d’extraordinaire. D’une manière ou d’une autre, on met en jeu son corps, soit parce qu’on va le modifier, soit parce qu’on va lui demander quelque chose d’exceptionnel », poursuit le sociologue.

A défaut d’engager la survie de leur chevelure, d’autres mettent en jeu la crédibilité de leur parole. Une semaine avant la finale, Quentin Houët, surveillant dans un collège de Seine-et-Marne et supporteur de l’Olympique lyonnais, discute avec un petit groupe de collégiens. Fans du PSG, ces élèves de 4e n’ont aucun doute sur la victoire de leur club. Si Paris gagne, le jeune homme de 25 ans s’engage à acheter une canette et des bonbons à chacun des cinq élèves. Le lundi matin, ces derniers viennent naturellement lui réclamer la dose de sucre qui leur est due. « Je n’ai qu’une parole, il faut la tenir », dit Quentin Houët. Le jour d’après, il revient les bras chargés de canettes et de bonbons. Une façon, pour lui, de préserver la relation de confiance qui le lie à ce groupe d’élèves.

La victoire du PSG peut être envisagée, par ses supporteurs, comme un moment de basculement collectif et individuel, avec un avant et un après. Comme après le jour de l’An, celle-ci peut être un déclencheur de bonnes résolutions. « Si Paris gagne, wallah, je m’engage à me mettre au régime », annonce un utilisateur de TikTok. « Si Paris gagne, je supprime TikTok », promet une autre, dont le compte est, à ce jour, toujours actif.

Le défi est également un outil de diplomatie entre supporteurs rivaux. Après avoir promis à plus d’un million d’utilisateurs de TikTok de se tondre les cheveux en cas de victoire parisienne, Kenzozenostwitch, un autre supporteur de l’OM, s’exécute en filmant son rasage à la tondeuse. Certains tifos parisiens l’acclament. Tenir son pari est une manière de reconnaître la victoire du club adverse. « Supportrice parisienne, je te déroule le tapis rouge. Respect », commente une fan du PSG. Un autre supporteur, lui aussi déplumé après un pari, réagit : « J’ai fini chauve aussi, alors que j’étais pour le PSG. » Parfois, la boule à zéro permet de remettre les compteurs à zéro.

 

 

 

 

 

 

Source : L’Epoque –  (Le Monde)

 

 

 

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