
Le Soleil – Dans une société où la virginité est souvent perçue comme un symbole d’honneur, une pression sociale insoutenable pousse certaines femmes à recourir à des produits destinés à restaurer leur hymen. Ces produits, disponibles en ligne, ont rapidement alimenté un marché clandestin, nourri par des attentes familiales et sociétales étouffantes.
La virginité avant le mariage reste un idéal incontournable, synonyme de pureté et d’honneur. C’est dans ce cadre que des femmes comme Anta* (nom d’emprunt) et Fama*, confrontées à des attentes écrasantes, ont décidé de recourir à des produits censés restaurer leur hymen.
Anta se souvient de la pression incessante de sa tante après son mariage religieux : « Même si c’était un mariage religieux, on me disait sans cesse que je devais être vierge pour que la famille soit fière de moi », raconte-t-elle. Pour la jeune femme, ce n’était pas une question de désir personnel, mais de respect des attentes sociales et familiales.
Fama, mariée à un émigré, a vécu une pression encore plus forte. « Je ne savais pas comment lui dire que je n’étais plus vierge. Dans son milieu, c’était essentiel de garder cette virginité avant le mariage. J’avais peur qu’il me rejette », confie-t-elle. Pour ne pas risquer de perdre le respect de son mari, Fama a également eu recours à un hymen artificiel. Cette décision, guidée par la peur et l’incertitude, témoigne de l’ampleur de la pression sociale exercée sur les femmes.
Bastien Confino, journaliste à la RTS, s’est intéressé à l’hymen et à son sens culturel. La fonction de cette membrane située à lʹentrée du vagin, qui sépare la vulve de la cavité du vagin, reste méconnue et sujette à controverse même du côté des scientifiques. Il y a également une confusion dans le lien fait entre sa déchirure, l’écoulement de sang qui peut en découler et un gage de virginité. Dans ce podcast de la Radio Television Suisse (RTS), Martine Jacot-Guillarmod, médecin associée et responsable de la gynécologie de lʹadolescente au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) donne des explications médicales et sociales sur l’Hymen.
Le marché caché de l’hymen artificiel
Ces témoignages révèlent un phénomène plus vaste : le marché des produits d’hymen artificiel, désormais accessible via des plateformes comme TikTok et WhatsApp. Ces produits, vendus sous forme de pilules ou de crèmes censées « restaurer » l’hymen, s’adressent principalement à celles qui cherchent à répondre à la pression sociale. « Astuce de maison, c’est à 25 000 FCFA, mais si tu veux des comprimés, c’est à 43 000 FCFA et l’antibiotique est à 5 000 FCFA », écrit une infirmière d’origine ivoirienne vivant au Sénégal, dans un message privé qu’elle nous a envoyé pensant s’adresser à une cliente.
Ces produits sont souvent commercialisés discrètement, mais bénéficient de la large portée des réseaux sociaux. Ceux-ci deviennent des points de rencontre pour ceux qui cherchent à acheter ou vendre des solutions à des problèmes personnels ou sociaux, souvent sans vérification des effets ou des dangers.
La communication entre conjoints comme alternative
Des jeunes femmes comme Khadija et Mame Diarra, étudiantes à Sacré-Cœur, militent contre cette pression. « L’hymen ne doit pas définir une femme. C’est la personnalité qui compte », affirme Khadija. Pour elle, juger les femmes en fonction de leur hymen est dépassé et injuste. « La société doit évoluer et ne pas se focaliser sur des détails physiques », ajoute Mame Diarra, en soulignant que des événements comme des accidents peuvent faire perdre l’hymen, sans que cela soit moralement répréhensible.
Cheikh Tidiane NDIAYE
Source : Le Soleil (Sénégal)
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