
Agence de Presse Africaine – Appelés à se prononcer sur la loi interpretative de l’amnistie de 2024, les juges constitutionnels sénégalais estiment que cette loi, proposée par un député du pouvoir et adoptée par l’Assemblée nationale, est inconstitutionnelle et rétroactive.
Le Conseil constitutionnel du Sénégal a censuré ce mercredi l’article premier de la loi n°08/2025 du 2 avril 2025, qualifiant cette dernière d’inconstitutionnelle. Cette loi, présentée comme « interprétative », visait à restreindre le champ d’application d’une précédente loi d’amnistie (n°2024-09 du 13 mars 2024) en excluant de son bénéfice les faits liés aux manifestations politiques « sans lien avec l’exercice d’une liberté publique ou d’un droit démocratique. »
Dans sa décision (n°1/C/2025), le Conseil a estimé que la loi attaquée introduisait une « règle nouvelle » en permettant la poursuite de faits déjà amnistiés, violant ainsi le principe constitutionnel de non-rétroactivité des lois pénales plus sévères (article 9 de la Constitution).
Les juges ont souligné que cette restriction revenait à appliquer rétroactivement une disposition plus sévère, interdite par la Constitution et la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.
Crimes imprescriptibles et engagements internationaux
Le Conseil a également relevé que la loi violait les engagements internationaux du Sénégal, notamment la Charte africaine des droits de l’Homme et des Peuples, en incluant dans le champ de l’amnistie des crimes imprescriptibles au regard du droit international (torture, traitements inhumains, etc.).
« Le législateur ne saurait priver de leur portée les principes relatifs à la sauvegarde de la dignité humaine », a-t-il affirmé, rappelant la valeur constitutionnelle des instruments internationaux ratifiés par le Sénégal.
Cette décision fait suite à un recours introduit par 24 députés, dénonçant une loi « discriminatoire » rompant l’égalité devant l’amnistie. Le gouvernement et l’Assemblée nationale défendaient quant à eux le caractère purement interprétatif du texte, destiné à clarifier des « ambiguïtés. »
La décision, définitive et sans appel, sera publiée au Journal officiel. Elle marque un revers pour les autorités et conforte les critiques sur les tentatives de restreindre l’amnistie accordée lors des crises politiques récentes.
Source : Agence de Presse Africaine (APA)
Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source www.kassataya.com