
So Foot – Le printemps est arrivé, le soleil a (enfin) pointé le bout de son nez un peu partout en France et, surtout, on connaît les demi-finalistes de la Ligue des champions version 2024-2025. Ce sera Arsenal, le PSG, l’Inter et le Barça. Des clubs puissants, riches et que l’on peut légitimement attendre à ce niveau. En gros, ce n’est pas l’Ajax 2019. Une fois que l’on a posé cette évidence, il reste ce qui s’est dessiné et décidé sur les terrains, une sorte de fraîcheur et une forme de récompense.
Dehors Manchester City et son équipe sur le déclin, dehors le Real Madrid et sa mystique irrationnelle. Dehors les totems figés, les clubs qui avancent en costard avec leur aura pour seule arme. Dehors ces équipes si lisses qu’on en oublierait presque qu’elles ont un entraîneur. Cette saison, le foot a gagné. Celui qui se pense, se bosse, se partage et se construit.
Cette Ligue des champions, c’est celle des idées, différentes mais similaires à la fois ; celle des clubs qui ont compris que le foot se jouait ensemble et que l’équipe reste au-dessus de tout le reste.
Des coachs et des styles
Cette année, ceux qui restent n’ont pas attendu les quarts pour se réveiller. Ils n’ont pas bluffé une soirée pour s’inviter à la table. Non, ils ont bossé. Longtemps. Ils ont tissé un fil rouge, semaine après semaine, parfois dans l’ombre, souvent sous-estimés ou même moqués. Arsenal condamné à rester derrière Liverpool ou Manchester City en championnat ; le PSG et ses démons en C1 ; le Barça incapable de tourner la page de son glorieux passé récent ; l’Inter loin derrière son rival rossoneri dans l’histoire du tournoi. Ces quatre équipes ont cherché leur style, leur cap, un nouveau souffle. Elles l’ont trouvé pour imposer leur loi.
Chacun à sa manière. Certains asphyxient l’adversaire jusqu’à l’étouffer. D’autres préfèrent la dissection tranquille, clinique, avec ballon. Certains adaptent leur visage au contexte, jamais au hasard. D’autres tracent leur route avec les mêmes principes, quoi qu’il en coûte. Avec ce point commun : une obsession du collectif. Une foi totale dans le travail. Dans la répétition. Dans la justesse. Une équipe, c’est d’abord une bande de joueurs qui savent exactement ce qu’ils ont à faire et pourquoi ils le font. La passe décisive de Marcus Thuram pour le moment de grâce de Lautaro Martinez à l’aller, c’est un mélange de talent et de confiance, rendu possible par la force d’une équipe et le discours d’un entraîneur.
Ces coachs se ressemblent, dans leur quête sacrée. Luis Enrique et Hansi Flick sont les bâtisseurs d’un projet presque secondaire, dans des clubs où il n’est pas simple de s’imposer ; Mikel Arteta et Simone Inzaghi sont en recherche d’une légitimité totale, le premier devant encore tuer le père spirituel Guardiola et le second pour se faire son propre nom à côté de son renard de frangin.
Les efforts des plus forts
Alors oui, il y a du pressing et des kilomètres parcourus sans compter, des combinaisons millimétrées bossées, des transitions éclairs qui punissent, comme sur les pions d’Achraf Hakimi ou Nuno Mendes cette semaine, des lignes qui avancent ensemble, parfaitement calées, et qui piègent Dortmund (8 hors-jeu). Mais il y a surtout une idée claire : briller ensemble. Il y a des types qui courent pour les autres, qui ferment les angles pour leurs potes, qui jouent simple quand il faut ou qui décident de prendre les choses en main, avec leur instinct et leur spontanéité, comme ont pu le faire Désiré Doué ou Khvicha Kvaratskhelia pour calmer Emiliano Martinez. Il y a des entraîneurs qui n’exhibent pas leur ego, mais leur vision. Des gars qu’on prenait pour des profs de tableau noir, et qui sont devenus des poètes du rectangle vert.
Et parfois, il y a ce petit détail. Ce coup de pied arrêté bossé dans le silence d’un jeudi matin, qui devient décisif en avril en permettant de signer un doublé inimaginable face au tenant du titre. Ce piston qui fait un appel que personne ne verra dans les highlights, mais qui libère l’espace pour l’éclair. Ce geste précis, pas spectaculaire, mais essentiel. Le genre de chose qu’on ne remarque que quand on sait ce que ça coûte.
La Ligue des champions ne couronne pas seulement les CV, elle récompense les meilleures idées. Il y a toujours les éclairs de génie, un geste hors du temps, une virgule de Lamine Yamal, son insouciance. Ces instants de talent accompagnent l’équipe plus qu’ils ne viennent la sauver, ce sont des petites cerises déposées sur un beau gâteau. Ils bonifient le travail collectif et ne masquent aucune médiocrité. Chaque demi-finaliste respire le taf, la cohérence, la maturité. Même ce PSG ultra-riche, à la masse salariale dingo, aux dépenses faramineuses, et qui semble pourtant avoir enfin compris comment se construit une équipe de foot.
La C1 reste l’arène des géants, des tout puissants, mais il n’est pas interdit de bien travailler quand on a les moyens. Il n’est pas interdit de défendre une idée du foot quand on peut se payer des joueurs à 100 millions d’euros. On ne connaît pas encore l’identité du futur vainqueur, mais ceux qui poseront leurs mains sur la coupe aux grandes oreilles le 31 mai prochain, à Munich, l’auront mérité.
Célien Vauthier
Source : So Foot
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