En Côte d’Ivoire, le gouvernement hausse le ton face à la grève des enseignants

Aux syndicats, qui réclament depuis des mois l’instauration d’une prime équivalente à celle accordée aux autres fonctionnaires, les autorités ont répondu par une dizaine d’arrestations.

 Le Monde – En Côte d’Ivoire, le bras de fer engagé entre les autorités et les enseignants, en grève sur l’ensemble du territoire, se durcit. Aux syndicats, qui réclament depuis plusieurs mois l’instauration d’une prime d’incitation trimestrielle comprise entre 150 000 et 400 000 francs CFA (entre 229 et 610 euros) – comme celle accordée aux autres fonctionnaires ivoiriens en 2008 –, les autorités ont répondu par l’arrestation, mardi 8 avril, d’une dizaine de membres du directoire des intersyndicales grévistes. Relâchés quelques heures plus tard, ces derniers dénoncent une manœuvre d’intimidation pour décourager le mouvement de grève, dans un climat social tendu à sept mois de l’élection présidentielle du 25 octobre.

Les syndicalistes arrêtés s’étaient réunis à Abidjan pour assister au procès d’un de leurs camarades, Ghislain Dugarry Assy, interpellé dans la nuit du 2 au 3 avril à son domicile. Une arrestation musclée, selon la fille du syndicaliste, dont le témoignage, évoquant une porte d’entrée « défoncée » et une maison « saccagée », a fait le tour des réseaux sociaux.

Selon nos informations, Ghislain Dugarry Assy a été présenté vendredi devant un juge d’instruction et placé sous mandat de dépôt. Poursuivi pour deux chefs d’accusation (« coalition d’agents publics » et « entrave au fonctionnement des services publics de l’Etat »), il a été transféré au Pôle pénitentiaire d’Abidjan. Au moins trois instituteurs auraient également été arrêtés, deux à Bouaflé et un autre à Bouaké, d’après les syndicats.

La mobilisation des 3 et 4 avril a été suivie par plus de 80 % des 154 000 enseignants que compte le pays, selon les organisations syndicales. Un chiffre évalué à seulement 22 % par le gouvernement, qui a haussé le ton ce week-end pour dissuader les enseignants de poursuivre la grève.

Samedi, la ministre de la fonction publique, Anne Désirée Ouloto, a assuré dans un communiqué que « tout enseignant qui ne ser[ait] pas à son poste de travail à compter du lundi 7 avril à 7 heures ser[ait] considéré comme démissionnaire et traité comme tel », qualifiant le mouvement de grève d’« illégal » et « inopportun ». Evoquant une « prise en otage » du « droit des enfants » à l’éducation, elle a assuré lundi sur sa page Facebook que le gouvernement restait néanmoins « ouvert au dialogue structuré et institutionnalisé ».

« Ils ne peuvent pas tous nous virer »

Face aux grévistes, les autorités peuvent invoquer la loi sur la grève de 1992, promulguée sous la présidence de Félix Houphouët-Boigny aux débuts du multipartisme, qui encadre strictement les libertés syndicales : le gouvernement doit délivrer un récépissé après le dépôt d’un préavis de grève pour que celle-ci puisse avoir lieu, ce qui n’a pas été le cas pour les enseignants. Les organisations syndicales ont par ailleurs signé en 2022 une trêve sociale avec le gouvernement, en vigueur jusqu’à 2027, qu’elles se sont « engagées à ne pas rompre par des grèves ».

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Source : Le Monde – (Le 08 avril 2025)

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