Mauritanie – Expédients coûteux… mais manifestement sans lendemain

Le Calame – On s’en doutait un peu, pour ne pas dire que cela ne faisait aucun doute : l’aide française au développement est une arme diplomatique en Afrique. Pas que française, au demeurant, mais c’est bien aujourd’hui la France qui est sur la sellette dans les rapports de l’AFD avec le pouvoir en Mauritanie, dernier régime du Sahel à n’avoir pas tourné le dos à l’ex-colonisatrice. En cause, les vingt-deux millions d’euros balancés par ladite agence au profit théorique du mirifique programme de l’Aftout ech-Chargui, ce fameux projet-phare d’adduction d’eau potable au bénéfice tout aussi théorique de cent cinquante mille personnes du Sud mauritanien et dont l’ONG mauritanienne Transparence Inclusive avait, il y a un an déjà, dénoncé le total fiasco, ainsi que nous l’évoquions dans l’éditorial du N°1375 (14/02/2024) de notre journal.

La « nouveauté », si l’on peut dire, c’est que l’on sait aujourd’hui à quel point l’AFD s’est, en cette aventure, distinguée dans l’irrespect de ses propres règles de contrôle, décaissant l’intégralité des fonds prévus avant même la fin officielle du chantier, négligeant de réclamer la moindre pénalité de retard, après avoir accordé des rallonges substantielles pour des « améliorations »… déjà inscrites dans le cahier initial de charges ! Certes, la campagne « Publish what you fund », qui publie chaque année un indice évaluant la transparence des organismes d’aide au développement dans le Monde a déjà épinglé l’Agence française, en la classant à une peu glorieuse 35ème place sur cinquante mais on se demande tout de même au nom de quels « principes » – humanistes ? – la patrie des droits de l’Homme et du Citoyen a laissé pour sa part passer ces étranges « manquements »…

D’aucuns subodorent une complicité à tout le moins passive avec le système – très actif, lui – de corruption en Mauritanie et, un cran tout de même en dessous, au Sénégal, puisque les deux sociétés qui ont surtout bénéficié de ces « indulgences » sont respectivement dirigées par un mauritanien et un sénégalais : BIS TP, par le décidément sulfureux Zeïne El Abidine ould Cheikh Ahmed – mais néanmoins toujours président de l’Union Nationale du Patronat Mauritanien (UNPM)… – et la Compagnie Sahélienne d’Entreprises (CSE) par Oumar Sow qui s’évertue aujourd’hui à se dégager de projets extérieurs à son pays et en conséquence difficilement contrôlables (c’est le moins qu’on puisse dire en ce concerne ceux engagés en Mauritanie). Et qu’ont donc en commun ces deux hommes si apparemment différents ? On ne voit guère que leur proximité avec le chef de l’Etat de leur pays respectif, durant le projet Aftout ech-Chargui : Mohamed Ghazouani, pour le premier, et Macky Sall, pour le second. Variablement francophiles, certes, mais tout aussi attentifs à recueillir le beurre de la mamelle hexagonale… Et c’est avec de tels coûteux expédients que la France entend se refaire une santé au Sahel ?

 

 

 

 

Ahmed ould Cheikh

 

 

 

Source : Le Calame (Mauritanie)

 

 

 

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