Mauritanie – « Sacrifice de poulet » / Par Tijane BAL

Drôle ou affligeant ? Les deux, mon divisionnaire. C’est en tout cas un scandale au cœur d’un marché populaire. Recette de viralité maximale.

C’est plus précisément l’histoire d’une foule incrédule exhibant un voleur hagard mais pas ordinaire, le contraire même du voleur puisque l’intéressé est policier de son état. Même si son uniforme n’en atteste pas avec éclat tant il fait dépenaillé. Ni galons, épaulettes ou autre signe distinctif. D’une certaine façon, l’honneur est ainsi sauf. Notre homme aurait aussi bien pu passer pour un pompiste, un vigile, un vaguemestre… La foule n’en a cure.

Passablement excitée, elle tient son trophée. Un coup de bâton est même administré sans grande conviction. Les plus charitables recommandent de ne pas faire la police à la manière de la police avec les voleurs. Qu’a bien pu soustraire notre flic ? Rien de mirobolant, on présume mais l’histoire n’en dit pas plus. Une fois qu’on s’est délecté du spectacle inédit, on s’interroge tout de même.

Qu’est-ce qui peut bien pousser un gardien de la paix esseulé à prendre un tel risque ? Une irrésistible kleptomanie ? L’état de nécessité ? La facilité ? Un environnement délétère propice et permissif ? Une dérive systémique comme dans le film Ripoux ?

On se prend à convoquer cette distinction théorisée par un autre entre corruption-survie et corruption-profit et à se demander s’il n’y a pas dans le spectacle une dimension à la fois exutoire et transfert, si notre petit policier n’est pas devenu le temps de son infortune le symbole à portée de voix et de main d’acteurs ne fréquentant pas les marchés populaires. On doit à un grand sociologue la notion de cible par substitution. Et si notre policier à contre-emploi en était devenu une incarnation ?

 

 

 

Tijane BAL pour Kassataya.com

 

 

 

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