Donald Trump lance, avec Vladimir Poutine, des négociations de paix en Ukraine et brise l’unité des alliés

Sans concertation avec les dirigeants européens, le président américain s’est longuement entretenu, mercredi, avec le chef du Kremlin. Il a également appelé, beaucoup plus brièvement, Volodymyr Zelensky, qui doit rencontrer vendredi, à Munich, une délégation américaine emmenée par le vice-président, J. D. Vance.

Le Monde – En diplomatie, la chorégraphie n’est jamais une affaire secondaire. Elle permet de mettre en scène des rapports de force. La façon dont Donald Trump s’est emparé de la guerre en Ukraine, mercredi 12 février, est lourde de sens : il l’approche comme un dossier bilatéral avec Moscou, dont la seule finalité est la paix, aussi fragile soit-elle.

Le président américain avait refusé jusqu’alors de commenter ses contacts téléphoniques avec Vladimir Poutine, depuis la période de transition. Il a cette fois détaillé leur échange du matin, dans un message sur son réseau Truth Social. Ensuite seulement, Donald Trump a appelé le président ukrainien, Volodymyr Zelensky. Washington déclare ainsi ouvertes les négociations de paix, déjà au cœur d’échanges confidentiels depuis plusieurs semaines.

La conversation entre Donald Trump et Vladimir Poutine a duré environ quatre-vingt-dix minutes selon le Kremlin ; il s’agit du premier contact bilatéral de ce niveau depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, en février 2022. Le président américain a cité quelques sujets abordés : l’Ukraine, mais aussi le Moyen-Orient, l’intelligence artificielle, l’énergie, le « pouvoir du dollar », et a forcément identifié la vanité de son interlocuteur comme une vulnérabilité. « Il a utilisé ma très forte devise de campagne, celle du “BON SENS” », s’est-il réjoui sur Truth SocialLes deux dirigeants ont décidé de « travailler ensemble de façon très étroite », y compris en visitant leurs pays respectifs, a précisé Donald Trump. Dans l’après-midi, le président américain a révélé qu’il pourrait rencontrer son homologue russe en Arabie saoudite, à une date inconnue.

Le ton général du message était des plus chaleureux à l’égard du président russe, visé par un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale pour crimes de guerre. « Je veux remercier le président Poutine pour son temps et ses efforts pour cet appel, et pour la libération, hier, de Marc Fogel », a conclu Donald Trump. Condamné à quatorze ans de prison en Russie pour possession de drogue, Marc Fogel a été relâché par les autorités russes, avant d’être triomphalement reçu, mardi soir, à la Maison Blanche. En retour, les Etats-Unis ont accepté de libérer Alexander Vinnik, un Russe condamné pour des crimes liés aux cryptomonnaies.

Donald Trump voit dans cet échange le début possible d’un cycle bilatéral vertueux. Vladimir Poutine, lui, démontre là son habilité, prêt à des compromis sur l’accessoire, tout en se focalisant sur l’essentiel : empêcher un développement démocratique et libéral de l’Ukraine, arrimée à l’Occident. Le président russe, contrairement à son homologue américain, n’a pas besoin d’une conclusion positive dans ces négociations. Mais la tenue de celles-ci contribue à sa décontamination diplomatique.

Des lignes rouges américaines, toutes en défaveur de Kiev

 

Après son entretien avec Volodymyr Zelensky, Donald Trump s’est contenté d’un commentaire plus court. « La conversation s’est très bien passée, a-t-il dit. Comme le président Poutine, il veut faire la paix. » Pour l’heure, le président américain n’a adressé aucun message public de soutien clair aux Ukrainiens. Il a multiplié les propos sur la nécessité de rembourser, en quelque sorte, les efforts déjà consentis par Washington, en prenant en garantie les terres rares ukrainiennes, riches en métaux.

C’est à Munich (Allemagne), le 14 février, qu’aura lieu la première étape importante des négociations. Le président ukrainien y rencontrera le vice-président américain, J. D. Vance, et le secrétaire d’Etat, Marco Rubio, en marge de la conférence annuelle sur la sécurité. Le chef de la diplomatie fait partie de l’équipe désignée par Donald Trump pour négocier avec Moscou. Le président a également cité son conseiller à la sécurité nationale, Mike Waltz, le directeur de la CIA, John Ratcliffe, mais pas le général Keith Kellogg, pourtant nommé envoyé spécial sur cette question.

Cette rétrogradation s’accompagne d’une promotion, celle de Steven Witkoff, entrepreneur dans l’immobilier, partenaire de golf de Donald Trump. Lui qui était impliqué dans les négociations sur Gaza prend aussi les commandes de celles sur l’Ukraine, sujet qu’il maîtrise aussi peu. Selon le présentateur de la chaîne conservatrice Fox News Sean Hannity, propagandiste en chef du trumpisme sur cette antenne, Steven Witkoff se serait entretenu pendant plus de trois heures, à Moscou, avec Vladimir Poutine, en marge de son déplacement pour récupérer Marc Fogel. Cette rencontre n’a pas été confirmée officiellement.

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 (Washington, correspondant)

 

 

 

Source : Le Monde

 

 

 

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