
Une fois encore la marche était trop haute. Comme il y a trois ans à Saitama, dans la périphérie de Tokyo, l’équipe de France masculine de basket-ball doit se contenter du deuxième rang dans l’ordre protocolaire olympique. Médaille d’argent autour du cou, alors que le palais omnisports de Paris-Bercy (rebaptisé Accor Arena) entonnait une Marseillaise en leur honneur, les Français ont vu les Américains grimper sur la plus haute marche du podium.
Pour la cinquième fois d’affilée (et la 17e fois de leur histoire), les Etats-Unis remportent le tournoi olympique de basket. Et même si les Bleus leur ont livré une bataille acharnée (87-98), samedi 10 août, ils ont cédé, sous les coups de boutoirs de Stephen Curry, le meilleur shooteur de l’histoire.
« Les Etats-Unis sont toujours la meilleure équipe du monde, convient le capitaine français Nicolas Batum, pour qui cette finale était synonyme de fin de carrière avec les Bleus. C’est pour ça qu’on les surnomme la Dream Team ou les Avengers. Mais peut-être qu’ils vont finir par perdre un jour. »









Les larmes de Victor Wembanyama après le match en disent long sur la déception des Français. Ils avaient rêvé du plus grand exploit des sports collectifs tricolores : battre en finale une équipe dominant à ce point son sport, nul ne l’a réalisé dans le sport français. Comme si les Bleus des frères Lebrun battaient l’invincible équipe de Chine de tennis de table en finale olympique (ils se sont arrêtés cet été en demi-finale). Mais le rêve s’est envolé, évaporé notamment par le coup de chaud de Stephen Curry, intenable en fin de rencontre (24 points).
Le « show incroyable » de Stephen Curry
« On s’attend à ce que [les Français] fassent le match de leur vie, parce qu’ils auront l’adrénaline d’évoluer devant leurs fans, et qu’ils surfent sur la vague de leurs deux derniers matchs », anticipait la star des Golden State Warriors vendredi. Le meneur américain, qui disputait ses premiers Jeux olympiques – et sans doute les derniers, à 36 ans – insistait sur le fait que lui et son équipe ne prendraient pas les Bleus de haut : « Nous aussi, on s’attend à jouer très bien. »
Il a mis ses paroles à exécution. Incandescent dans les ultimes minutes, le meilleur shooteur de l’histoire s’est chargé d’éteindre Bercy, inscrivant douze points dans les trois dernières minutes avec une facilité déconcertante. « Steph a proposé de prendre les choses en main. Et puis il a sorti ce show incroyable », s’éberluait même le sélectionneur américain, Steve Kerr, pourtant accoutumé au phénomène – qu’il entraîne à San Francisco.
Sur son dernier tir, qu’« il met couché par terre », constate le coach français Vincent Collet, Stephen Curry mime « Bonne nuit » à la salle, actant la fin de la partie. Maladroit en débuts des JO, le meneur a haussé son niveau en demi-finale (34 points) et en finale pour propulser Team USA vers l’or.












« Leur talent incroyable a fini par faire la différence », reconnaît Vincent Collet. A l’opposé, si les Bleus n’ont jamais lâché prise, recollant à six longueurs lorsque les Américains prenaient de l’avance, portés par l’état d’esprit nouveau découvert depuis les quarts de finale, ils ont trop commis d’erreurs pour rivaliser jusqu’au bout. « Face à eux, il faut livrer le match parfait, insiste le sélectionneur tricolore. Et là on a fait un grand match, mais entaché de quelques erreurs. »
Maladroits, et coupables d’oublis au rebond, les Français ont offert de nombreuses munitions aux « Avengers », fatales lorsque la star LeBron James mène la contre-attaque. A 39 ans, l’homme aux chaussures dorées et la barbe poivre et sel a été désigné meilleur joueur du tournoi que son équipe de superstars a moins survolé qu’anticipé – ce qui n’a guère empêché quelques démonstrations de suffisance.
S’il a été dominé l’espace d’un instant par Guerschon Yabusele, auteur d’un dunk majuscule au-dessus de lui – symbole du tournoi de haut vol de l’intérieur français –, la star des Lakers empoche une troisième médaille d’or olympique après Pékin et Londres.




Avec Wembanyama, les Bleus peuvent rêver en grand
« Quand j’étais jeune basketteur, en benjamins, je rêvais de jouer un France-Etats-Unis en finale », confiait Vincent Collet en 2021, avant sa première finale olympique – comme coach. Récidiviste trois ans plus tard, le technicien tricolore a fait de « cette deuxième opportunité », en terres françaises de surcroît, « le plus grand moment de [sa] carrière ». Devant le titre européen conquis en 2013 par la génération Tony Parker, estimait-il jeudi. E
Samedi, pour ce qui devrait être son ultime sortie sur le banc des Bleus, il a une nouvelle fois sorti de sa besace quelques tours dont il a le secret. Après avoir donné des accents d’Euroligue (la meilleure compétition d’Europe) à son équipe pour abattre le Canada et l’Allemagne, en s’appuyant beaucoup sur la triplette Yabusele-Cordinier-Lessort, Vincent Collet a davantage opposé des « corps NBA » aux puissants Américains. Comme Rudy Gobert (Minnesota Timberwolves) ou Bilal Coulibaly (Washington Wizards), très peu utilisés lors des deux matchs précédents, mais rapidement placés sur le terrain. Et Victor Wembanyama, bien entendu.












« Ce type de joueur fait toujours un très grand match dans le tournoi. Donc comme il n’en reste qu’un, c’est pour samedi », augurait Vincent Collet au sortir de la demi-finale. A la peine offensivement depuis trois rencontres – mais compensant en défense notamment –, Victor Wembanyama a malmené les stars NBA toute la partie. Auteur de 26 points, il a largement contribué à maintenir les Bleus à portée de tir des Américains. C’est lui qui a ramené son équipe à trois points à trois minutes du terme ; avant le show Stephen Curry.
Pour l’équipe de France, une nouvelle fois en argent et parvenue à « renverser la table » – les mots du sélectionneur – en cours d’un tournoi mal embarqué, une page va se tourner, avec le départ de Vincent Collet et de ses grognards, Nando De Colo – auteur d’une finale remarquable – et Nicolas Batum. « Place à la nouvelle génération, à eux d’écrire leur histoire », souffle le capitaine.
Victor Wembanyama confirme, lui qui, pour sa première compétition avec les Bleus en est devenu le leader incontesté : « On a des diamants dans ce pays, donc on a toutes nos chances. Si ce n’est pas cette année, ce sera la prochaine. » Il n’a pas échappé au phénomène du basket mondial que la prochaine édition des Jeux olympiques, en 2028, sera à Los Angeles. Après avoir vu les Américains célébrer leur titre sur le sol français, lui et son escouade auront à cœur de leur rendre la pareille. Pour grimper, enfin, sur la première marche d’un podium olympique.








Source : Le Monde
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