Présidentielle américaine : la « kamalamania » ramène l’enthousiasme dans le camp démocrate

La campagne numérique de la vice-présidente des Etats-Unis, Kamala Harris, inonde les réseaux sociaux d’images et de symboles incarnant la probable candidate démocrate à la Maison Blanche, et alimente un engouement populaire, en partie auprès des jeunes.

Le Monde – Un cocotier a envahi Internet. Il s’agit d’un émoji, l’un de ces petits symboles qui témoignent de l’humeur du moment. Depuis dimanche 21 juillet et le débarquement subit de Kamala Harris dans la course à la Maison Blanche, après le renoncement de Joe Biden, il est devenu le signe de ralliement des démocrates revigorés par la candidature – et l’allégresse – de la vice-présidente des Etats-Unis.

L’histoire du cocotier est un peu sans queue ni tête, comme nombre des emballements qui surgissent sur YouTube. Son point de départ est une anecdote racontée par Kamala Harris, elle-même. Le 10 mai 2023, la vice-présidente inaugure à la Maison Blanche une commission chargée de promouvoir l’égalité des chances dans l’éducation. Sa mission est de s’intéresser aux enfants, explique-t-elle, non seulement en milieu scolaire, mais dans leur « contexte » familial.

Contexte ? Elle s’anime. Le mot lui rappelle une expression que sa mère employait souvent, en bougonnant contre la jeunesse : « Vous pensez que vous venez de tomber d’un cocotier ? Vous existez dans le contexte de tout ce dans quoi vous vivez et ce qui est venu avant vous, » interpelle Kamala, en imitant la voix de sa mère. Se rendant compte, peut-être, de l’incongruité de ce cocotier en pleine Maison Blanche, la vice-présidente part d’un rire en cascade, d’une voix qui va crescendo et se termine en fou rire.

Personne n’aurait prêté attention à cette cérémonie, typique de l’ordinaire peu glorieux des doublures présidentielles, si la « war room » des républicains qui suit Kamala Harris dans le moindre de ses (faux) pas n’en avait fait un clip destiné à illustrer la « bizarrerie » de la vice-présidente. Le mot bizarrerie revient souvent sur la chaîne conservatrice Fox News pour qualifier l’ancienne sénatrice de Californie, fille d’un économiste jamaïcain et d’une chercheuse indienne. Ici, l’euphémisme semble souligner que ses références ne sont pas tout à fait celles du pays « anglo », où on dit plutôt « tomber du camion de navets » que du cocotier.

Allégeance à la « coconut army »

 

Avant même le renoncement de Joe Biden, les amis de Kamala Harris avaient entrepris de retourner l’anecdote à son avantage. Depuis dimanche, c’est une légion qui s’est levée dans les rangs démocrates. Militants, associations, tous affichent une palmeraie ou peu s’en faut sur leurs réseaux sociaux. Et postent un selfie proclamant leur allégeance à la « coconut army ».

Le sénateur de Hawaï, Brian Schatz, a posté une photo qui le montre en haut d’un cocotier. « Madame la vice-présidente, nous sommes prêts à aider », a-t-il tweeté. Le gouverneur du Colorado, Jared Polis, a ajouté l’émoji du palmier à son profil. Il a démenti chercher à se placer parmi les vice-présidentiables potentiels. « S’ils font un sondage et qu’il se révèle qu’ils ont besoin d’un juif homosexuel de 49 ans presque chauve, ils ont mon numéro », a-t-il plaisanté sur la chaîne CNN.

Dans la bataille pour façonner l’image de Kamala Harris auprès de l’opinion, les républicains croyaient avoir pris de l’avance. Depuis des années, ils présentent l’ancienne procureure générale de Californie comme manquant de sérieux, inapte à gouverner, trop prompte à éclater de rire – « crazy Kamala », comme l’a surnommée Donald Trump, sans grande originalité, l’adjectif « folle » lui venant à propos de la plupart de ses opposantes.

Sur sa chaîne YouTube, Fox News conserve une collection de moments de discours ou d’interviews qui permettent de la tourner en dérision, enfilés sur des clips comme le rang de perles devenu la marque de la candidate. On y trouve les formules un peu philosophiques, qui laissent l’auditeur à sa réflexion, comme lorsqu’elle appelle à considérer « ce qui peut être », une fois le moment présent « allégé de ce qui a été ».

Ou ses considérations sur « le passage du temps ». Car il est vrai qu’il y a « une profonde signification dans le passage du temps ». Ou encore sur le diagramme de Venn, un graphe qui montre les relations entre différents ensembles. Kamala Harris l’avoue avec gourmandise : « J’aime les diagrammes de Venn. » Elle aime « ce quelque chose au sujet des trois cercles et l’analyse de l’endroit où se trouve l’intersection ».

Dès le début, son entourage a montré qu’elle assume toute bizarrerie passée et à venir. A peine arrivée à son QG de campagne dans le Delaware, lundi, la candidate a trouvé un diagramme de Venn, concocté par son équipe. Cercle 1 : Biden QG ; cercle 2 : Kamala QG. A l’intersection : « Obliger Trump à répondre de ses actes. »

Rire remixé façon DJ

 

En vingt-quatre heures, la campagne numérique baptisée « Harris for president » a réussi à retourner les attaques au profit de la candidate. La jeunesse TikTok s’est emparée du rire-gloussement et l’a copié, multiplié, remixé façon DJ. Les mèmes ont pris leur envol. Les filles s’identifient : « I’m so Kamala » (« Je suis tellement Kamala »). Le pas de danse de la « VP » , accompagnant une fanfare scolaire en 2023, a été détourné cent fois, dont une bonne part en vert fluo, la couleur tendance du moment.

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  (San Francisco, correspondante)

 

 

 

Source : Le Monde

 

 

 

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