France – Où sont les journalistes racisés dans les rédactions ?

Racisme systémique, soupçons de militantisme et tradition «colorblind» à la française… Le manque de journalistes non blancs doit urgemment être combattu.

Slate – Lundi 27 novembre 2023, le gratin du milieu journalistique était réuni à Vichy pour la cérémonie du prix Albert-Londres, qui récompense les meilleurs grands reporters francophones. Chaque année, ce sont trois journalistes, dans trois catégories différentes (presse écrite, audiovisuel et livre), qui reçoivent ce prix d’exception, véritable tremplin dans le métier. C’est une consécration, une mention honorifique qui vous suit et anoblit votre travail toute votre vie. Sans compter les opportunités financières qui en découlent. Bref, remporter un Albert-Londres, c’est la classe.

Lorsque l’on parcourt la liste des lauréats du prix presse écrite depuis 1985, date de la création officielle de cette catégorie, une chose nous frappe. Où sont les personnes racisées? En trente-huit ans d’existence, seuls deux journalistes non blancs ont reçu ce graal. Une preuve de plus, s’il en fallait une, du manque alarmant de personnes «issues de la diversité» –expression fourre-tout et qui suggère que la normalité est donc blanche– au sein des rédactions françaises.

Alors quoi? N’y-a-t-il pas de journalistes racisés en France? Cela semble étonnant. La récente création de l’Association des journalistes antiracistes et racisé·e·s (AJAR), avec plus de 200 adhérents, prouve bien le contraire. Ils existent, écrivent, tournent, produisent, mais sont rarement mis en avant.

Car en France, ce qui prévaut, c’est le principe d’exceptionnalité, celui qui a mis à la tête du JT de France 2 en 1998 Rachid Arhab, premier Maghrébin à occuper ce poste. Lui-même évoque ce concept dans le documentaire L’Arabe dans le poste sur TMC. «J’avais peur d’être une statuette, le type qui a réussi et du coup personne d’autre ne pouvait réussir, car c’est l’exception», confie-t-il.

C’est d’ailleurs la question que pose Gurvan Kristanadjaja, journaliste à Libération: «Est-ce que tu peux citer une figure du journalisme français qui est racisée?» On botte en touche. Harry Roselmack, peut-être? «Instinctivement, je ne vois personne d’autre. C’est bien plus difficile d’en citer en France qu’aux États-Unis, lance-t-il. Toutes les figures qui émergent ici sont issues du même sérail. Tu n’as pas de représentativité alternative.»

En minorité ou seul

 

En France, les statistiques ethniques sont interdites par la loi. De ce fait, il est impossible de savoir exactement quelle est la part des personnes racisées dans les rédactions. Le sentiment général reste que, certes, il y a des journalistes non blancs, mais qu’ils représentent une large minorité, ou qu’ils sont parfois seuls. La rédaction de Slate.fr n’y échappe pas.

Ce qu’on entend souvent, c’est que la situation s’est améliorée, que le milieu, à l’origine très opaque, s’est ouvert ces dernières années. Mais, poursuit Gurvan Kristanadjaja, «quand on se croise sur le terrain, on se rend bien compte qu’il y a un problème. On a l’impression que plus haut, au niveau des dirigeants, il y a une forme de déni, que c’est une situation qui ne doit pas être urgemment changée.»

Lundi 27 novembre 2023, le gratin du milieu journalistique était réuni à Vichy pour la cérémonie du prix Albert-Londres, qui récompense les meilleurs grands reporters francophones. Chaque année, ce sont trois journalistes, dans trois catégories différentes (presse écrite, audiovisuel et livre), qui reçoivent ce prix d’exception, véritable tremplin dans le métier. C’est une consécration, une mention honorifique qui vous suit et anoblit votre travail toute votre vie. Sans compter les opportunités financières qui en découlent. Bref, remporter un Albert-Londres, c’est la classe.

Lorsque l’on parcourt la liste des lauréats du prix presse écrite depuis 1985, date de la création officielle de cette catégorie, une chose nous frappe. Où sont les personnes racisées? En trente-huit ans d’existence, seuls deux journalistes non blancs ont reçu ce graal. Une preuve de plus, s’il en fallait une, du manque alarmant de personnes «issues de la diversité» –expression fourre-tout et qui suggère que la normalité est donc blanche– au sein des rédactions françaises.

Alors quoi? N’y-a-t-il pas de journalistes racisés en France? Cela semble étonnant. La récente création de l’Association des journalistes antiracistes et racisé·e·s (AJAR), avec plus de 200 adhérents, prouve bien le contraire. Ils existent, écrivent, tournent, produisent, mais sont rarement mis en avant.

Car en France, ce qui prévaut, c’est le principe d’exceptionnalité, celui qui a mis à la tête du JT de France 2 en 1998 Rachid Arhab, premier Maghrébin à occuper ce poste. Lui-même évoque ce concept dans le documentaire L’Arabe dans le poste sur TMC. «J’avais peur d’être une statuette, le type qui a réussi et du coup personne d’autre ne pouvait réussir, car c’est l’exception», confie-t-il.

C’est d’ailleurs la question que pose Gurvan Kristanadjaja, journaliste à Libération: «Est-ce que tu peux citer une figure du journalisme français qui est racisée?» On botte en touche. Harry Roselmack, peut-être? «Instinctivement, je ne vois personne d’autre. C’est bien plus difficile d’en citer en France qu’aux États-Unis, lance-t-il. Toutes les figures qui émergent ici sont issues du même sérail. Tu n’as pas de représentativité alternative.»

En minorité ou seul

 

En France, les statistiques ethniques sont interdites par la loi. De ce fait, il est impossible de savoir exactement quelle est la part des personnes racisées dans les rédactions. Le sentiment général reste que, certes, il y a des journalistes non blancs, mais qu’ils représentent une large minorité, ou qu’ils sont parfois seuls. La rédaction de Slate.fr n’y échappe pas.

Ce qu’on entend souvent, c’est que la situation s’est améliorée, que le milieu, à l’origine très opaque, s’est ouvert ces dernières années. Mais, poursuit Gurvan Kristanadjaja, «quand on se croise sur le terrain, on se rend bien compte qu’il y a un problème. On a l’impression que plus haut, au niveau des dirigeants, il y a une forme de déni, que c’est une situation qui ne doit pas être urgemment changée.»

Lundi 27 novembre 2023, le gratin du milieu journalistique était réuni à Vichy pour la cérémonie du prix Albert-Londres, qui récompense les meilleurs grands reporters francophones. Chaque année, ce sont trois journalistes, dans trois catégories différentes (presse écrite, audiovisuel et livre), qui reçoivent ce prix d’exception, véritable tremplin dans le métier. C’est une consécration, une mention honorifique qui vous suit et anoblit votre travail toute votre vie. Sans compter les opportunités financières qui en découlent. Bref, remporter un Albert-Londres, c’est la classe.

Lorsque l’on parcourt la liste des lauréats du prix presse écrite depuis 1985, date de la création officielle de cette catégorie, une chose nous frappe. Où sont les personnes racisées? En trente-huit ans d’existence, seuls deux journalistes non blancs ont reçu ce graal. Une preuve de plus, s’il en fallait une, du manque alarmant de personnes «issues de la diversité» –expression fourre-tout et qui suggère que la normalité est donc blanche– au sein des rédactions françaises.

Alors quoi? N’y-a-t-il pas de journalistes racisés en France? Cela semble étonnant. La récente création de l’Association des journalistes antiracistes et racisé·e·s (AJAR), avec plus de 200 adhérents, prouve bien le contraire. Ils existent, écrivent, tournent, produisent, mais sont rarement mis en avant.

Car en France, ce qui prévaut, c’est le principe d’exceptionnalité, celui qui a mis à la tête du JT de France 2 en 1998 Rachid Arhab, premier Maghrébin à occuper ce poste. Lui-même évoque ce concept dans le documentaire L’Arabe dans le poste sur TMC. «J’avais peur d’être une statuette, le type qui a réussi et du coup personne d’autre ne pouvait réussir, car c’est l’exception», confie-t-il.

C’est d’ailleurs la question que pose Gurvan Kristanadjaja, journaliste à Libération: «Est-ce que tu peux citer une figure du journalisme français qui est racisée?» On botte en touche. Harry Roselmack, peut-être? «Instinctivement, je ne vois personne d’autre. C’est bien plus difficile d’en citer en France qu’aux États-Unis, lance-t-il. Toutes les figures qui émergent ici sont issues du même sérail. Tu n’as pas de représentativité alternative.»

En minorité ou seul

 

En France, les statistiques ethniques sont interdites par la loi. De ce fait, il est impossible de savoir exactement quelle est la part des personnes racisées dans les rédactions. Le sentiment général reste que, certes, il y a des journalistes non blancs, mais qu’ils représentent une large minorité, ou qu’ils sont parfois seuls. La rédaction de Slate.fr n’y échappe pas.

Ce qu’on entend souvent, c’est que la situation s’est améliorée, que le milieu, à l’origine très opaque, s’est ouvert ces dernières années. Mais, poursuit Gurvan Kristanadjaja, «quand on se croise sur le terrain, on se rend bien compte qu’il y a un problème. On a l’impression que plus haut, au niveau des dirigeants, il y a une forme de déni, que c’est une situation qui ne doit pas être urgemment changée.»

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Donia Ismail — Édité par Louis Pillot

 

Source : Slate (France)

 

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