Corrections de copies : les annotations des enseignants aident-elles les élèves à mieux écrire ?

Entre conseils et questions, encouragements et remontrances, les annotations sur les copies font partie du quotidien scolaire. Mais comment les élèves en tirent-ils parti ?

The Conversation  – Les copies à corriger sont le lot du métier d’enseignant. Le but n’est pas seulement de noter, ni toujours de corriger à proprement parler, mais plutôt d’évaluer la production de l’élève et de lui faire un retour sur ce qui est réussi et ce qu’il faut améliorer.

Les enseignants annotent les copies, parfois de manière laconique, mais le plus souvent, à grand renfort de soulignements, de biffures, de commentaires entre les lignes, en marge, en tête de copie ou à la fin. Ils ont à cœur de fournir des appréciations détaillées, même lorsque les travaux ne sont pas notés.

Comme les bulletins scolaires, ces appréciations ont jalonné notre parcours et font partie de nos souvenirs d’élèves : encouragements, conseils, questions, mais parfois aussi remontrances et autres moments douloureux – comme les dictées pleines de rouge avec des notes catastrophiques, les « mal dit », « inutile », « indigne d’un élève de 6e ».

La docimologie, qui étudie les épreuves d’examens et en particulier les systèmes de notation, a bien mis en évidence les difficultés liées à l’évaluation des travaux des élèves, les biais en jeu, les facteurs de divergence. Les recherches menées sur les annotations des copies par les enseignants apportent des éclairages complémentaires. Elles permettent de s’interroger sur un geste ordinaire qui pourtant ne va pas de soi. Elles invitent à réfléchir à la lecture que l’enseignant fait des écrits de ses élèves et à celle que les élèves vont faire des traces laissées par l’enseignant sur leur copie.

Annoter les copies : pour qui, pour quoi ?

 

Dans les activités de production écrite, la question des annotations a été étudiée de près, notamment dans la recherche E-Calm qui réunit des écrits scolaires du CP à l’université, incluant des textes annotés par les enseignants et les versions successives d’un même texte réécrit par l’élève. L’un des enjeux de ce corpus était de voir dans quelle mesure les annotations des enseignants sont prises en compte par l’élève lorsqu’il retravaille son texte. Les observations ont été couplées à des entretiens avec des élèves et des enseignants.

La comparaison de copies qui ont nécessité plusieurs séances d’écriture (versions 1 et 2 des textes), montre que 60 % des interventions entraînent une réaction de l’élève, mais parmi elles ce sont surtout des pointages d’erreurs sur des graphèmes incorrects ou manquants (comme la marque du pluriel dans les chaînes d’accord).

Globalement, les élèves modifient peu leurs textes à partir des annotations et, lorsqu’ils le font, c’est à la surface du texte, de manière relativement mécanique. Dans des entretiens menés avec une vingtaine d’élèves de 6e et de 3e, ils déclarent d’ailleurs ne pas vraiment les regarder.

Une classe en train d’écrire sous la surveillance d’une enseignante
Globalement, les élèves modifient peu leurs textes à partir des annotations des enseignants et, lorsqu’ils le font, c’est à la surface du texte, de manière relativement mécanique. Shutterstock

 

C’est peut-être d’abord aux enseignants que les annotations sont utiles. À l’échelle de la copie, elles permettent de pointer des manquements ou des réussites, et à l’échelle du devoir donné à la classe, de voir où en sont les élèves. Elles fonctionnent donc comme un système de mesure, et en entretien, les enseignants affirment les rédiger au fil du texte et y voir un outil pour leur pratique.

Leurs observations vont leur servir à planifier la suite de leurs enseignements. Par exemple, si un enseignant observe des difficultés dans la manière d’introduire des dialogues, il y consacre un point dans sa préparation de la correction collective et aménagera une séance sur cette question.

Certains enseignants se disent tentés de renoncer aux annotations car ce qui prime pour eux, c’est le fait d’échanger avec les élèves à la suite du devoir et les faire retravailler ce qui mérite de l’être. Et pourtant, ils continuent. Les entretiens mettent en avant le poids de cette tradition : que diraient les collègues ? Que penseraient les parents, si les copies étaient rendues sans annotations ?

Le geste d’annotation est donc le lieu d’une certaine inertie. Des devoirs d’écriture datant de 1907 à 1976 ont été analysés. Une différence de taille est qu’on trouve dans la première partie du XXe siècle des commentaires portant sur la morale qui peu à peu disparaissent. À part ça, le geste demeure inchangé et du XIXe siècle à aujourd’hui, les annotations dans les rédactions d’élèves concernent pour l’essentiel la conformité aux normes de la langue : il faut écrire un français correct.

La place centrale de l’orthographe dans les corrections

 

Pour corriger un écrit d’élève, un enseignant a toute une myriade de marques à sa disposition, qui varient fortement à la lecture des copies corrigées. Par exemple, l’oubli de la marque du pluriel dans le cadre de l’accord d’un groupe nominal peut être traité de diverses manières : soulignement de la fin du mot pour pointer l’absence du -s, ajout du -s, commentaire en marge (avec, ou non, soulignement en sus), sous différentes formes (ordre donné à l’élève « Ajoute la marque du pluriel ici », interrogation « N’as-tu pas oublié une marque du pluriel ici ? », assertion « Il manque la marque du pluriel »), code avec abréviations (« orth » pour « orthographe », « acc » pour « accord »), etc.

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Source : The Conversation 

 

 

 

 

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