
Slate – «Il manque peut-être des infrastructures de boxe au Mali, pourtant le pays a sa championne de boxe. Elle s’appelle Marine Fatoumata Camara», introduit la présentatrice de l’émission «Label Matinale», diffusée sur la chaîne africaine LabelTV, en septembre 2020. L’athlète rejoint ensuite le plateau en visioconférence. Les présentateurs la couvrent d’éloges avant que l’interview ne débute.
Presqu’un an auparavant, le 29 août 2019, les Jeux africains battent leur plein à Rabat, au Maroc. La finale de boxe anglaise dans la catégorie féminine des poids plume (moins de 57 kilos) s’achève. Après s’être hissée jusqu’en finale, Marine Camara s’incline face à la représentante du Botswana. Mais déjà, la Franco-Malienne entre dans l’histoire comme la première boxeuse à avoir représenté le Mali sur la scène internationale, et rapporte au pays sa première médaille en boxe féminine.
La carrière de cette Francilienne, âgée de 24 ans à l’époque, prend une nouvelle dimension. «Je n’en étais pas consciente tout de suite. J’ai commencé à réaliser un peu avant la finale, lorsque tout le monde –le ministère des Sports, la fédération de boxe, le Comité olympique malien– m’a appelée pour me féliciter pour mon parcours, rembobine-t-elle. Cette fois-ci, je montais sur le ring pour défendre les couleurs d’un pays et marquer son emplacement sur la carte du monde de la boxe.»
Dans les colonnes du média du Comité international olympique, elle raconte la liesse qui a suivi sa médaille d’argent: «Cet été, je suis allée au Mali pour la première fois depuis un bon moment et j’ai rencontré des gens dans les rues qui m’interpellaient par mon nom. J’ai même rencontré des gens qui ont construit une salle de sport à mon nom, et je reçois des messages tous les jours du genre: “Quand viens-tu? Nous suivons ta carrière.”»
De mémoire, Marine se rappelle avoir toujours eu envie de s’engager avec l’équipe malienne. Mais l’absence de section féminine lui semblait un obstacle insurmontable. «Je voulais rendre fier mon père», explique cette fille d’une mère française et d’un père malien. Elle est inspirée par le parcours de Mohammed Diaby, boxeur franco-malien qui s’est lui aussi illustré en gagnant l’argent aux Jeux africains de 2012, décrochant une qualification aux Jeux olympiques de Londres. Il était alors devenu le premier et unique boxeur malien à parvenir à ce niveau, avant de voir son rêve olympique stoppé à la suite d’un contrôle positif à un test antidopage.
«Marine nous a prouvé que ça valait le coup d’investir sur la boxe féminine»
Au tournoi international de Sétif, en Algérie, Marine rencontre en 2017 des officiels du Comité olympique national malien (CNSOM) et de la fédération de boxe nationale (FemaBoxe). Elle boxe alors pour le club municipal de Villeneuve-le-Roi/Ablon (Val-de-Marne), dans lequel elle a commencé le sport à 14 ans.
Cette première rencontre avec les officiels maliens se concrétise deux ans plus tard, quelques mois avant les Jeux africains. Marine termine alors son master à l’université Paris-Dauphine, et se retrouve à un carrefour de la vie. «À ce moment-là, je me rends compte que je n’ai pas ma place en équipe de France, qui préfère une autre boxeuse dans ma catégorie. C’est soit les études, soit le Mali», se rappelle-t-elle. Son coach de l’époque lui négocie une place dans la sélection nationale malienne. Dans la foulée, elle participe à plusieurs tournois internationaux, jersey floqué MLI, et se hisse à la quinzième place mondiale.
Rémi Yang — Édité par Louis Pillot
Source : Slate (France) – Le 02 avril 2024
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