Rosa Duffy, un engagement pour la mémoire de la littérature afro-américaine

L’artiste Rosa Duffy déniche et met à l’honneur la littérature sur l’identité des personnes noires dans sa librairie à Atlanta aux États-Unis. Plus jeune, le manque de reconnaissance de la culture afro-américaine dans certains milieux artistiques a profondément marqué la librairie. Elle souhaite désormais que sa boutique serve à découvrir ces œuvres souvent méconnues du grand public.

RFI – Des livres, journaux et pamphlets jaunis sont entassés sur une longue table au milieu de la salle. Très peu sont à vendre. Mais libre à chacun de venir passer sa journée pour les lire. Des étagères présentent tout de même des collections à acheter, allant des classiques de la romancière Toni Morrison, première femme afro-américaine prix Nobel de littérature, à une biographie de l’homme d’État et indépendantiste ghanéen Kwame Nkrumah.

Dans sa libraire « For Keeps Books » à Atlanta, aux États-Unis, Rosa Duffy, 33 ans, collectionne, expose et vend des livres sur « l’identité noire ». « Je veux que les jeunes puissent découvrir ce qui a été écrit avant eux », explique-t-elle. Elle a ouvert sa boutique après avoir vécu à New York, où l’absence de considération de sa culture l’a profondément marquée.

À 22 ans, Rosa Duffy quitte son foyer familial d’Atlanta pour aller étudier la mode et l’art dans la capitale culturelle. Elle ne s’attend pas à subir autant de racisme. Un « racisme déguisé », raconte-t-elle. Ses cours à l’université la déçoivent. « J’avais l’impression de dépenser beaucoup d’argent pour rien. Je n’apprenais rien sur l’art noir. » La solitude touche la jeune artiste dans son petit studio de Manhattan. Impossible de s’y retrouver. Alors, elle s’engage politiquement.

« Une époque sombre »

L’étudiante s’équipe d’un pot de colle et d’une brosse, imprime des textes politiques sur des affiches pour les placarder sur les murs en brique rouge de son quartier. Le premier affiché est la Lettre à mon neveu de l’écrivain et militant James Baldwin. « Je vivais dans un espace où beaucoup de personnes pouvaient se permettre d’ignorer le racisme. Dans le sud, le racisme est plus direct, tandis que dans le nord, les gens se disent progressistes, mais j’étais surprise de voir les mêmes choses », poursuit-elle.  

La sculpture et la lecture occupent le reste de son temps. « La plupart des livres étaient limités si on voulait s’intéresser à la culture noire, surtout pour la poésie ou l’art. Il y avait seulement une petite partie sur l’ethnologie. » Il ne lui reste plus qu’à chiner ces ouvrages chez les bouquinistes. Elle finit par abandonner l’université et travaille dans des restaurants. Une scène la marque encore. Quelques jours après la mort d’un Afro-Américain tué par la police, son patron lui dit que la personne méritait de mourir. « C’était une époque sombre pour moi », confie-t-elle.

New York l’a fatiguée. Elle décide de retourner vivre à Atlanta, où elle ouvre en 2018 sa librairie sur Auburn Street. La rue est emblématique de la culture afro-américaine. Un des premiers journaux tenus par des personnes noires aux États-Unis, l’Atlanta Daily World, est né ici. À quelques rues, les chants de l’église Ebenezer, où officiait Martin Luther King, résonnent chaque dimanche matin. « La rue a toujours été un hub pour les personnes noires. Vous pouvez toujours voir le panneau de la boutique du premier barbier noir d’Atlanta, indique-t-elle. Je ne voudrais être nulle part ailleurs. »

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Edward Maille

Notre correspondant à Atlanta

 

 

 

Source : RFI

 

 

 

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