Les restitutions postcoloniales au coeur d’un documentaire à la Berlinale

AFPDans le documentaire « Dahomey », en lice pour l’Ours d’or de la Berlinale, la réalisatrice franco-sénégalaise Mati Diop aborde la question de la restitution des œuvres d’art volées à l’Afrique par les anciennes puissances coloniales.

A Paris, le roi Ghézo n’est plus un simple numéro. Il prend vie devant la caméra de Mati Diop qui raconte le retour au Bénin de cette statue et d’autres oeuvres pillées par la France pendant l’époque coloniale. Dans le documentaire « Dahomey », en lice pour l’Ours d’or de la Berlinale, la réalisatrice franco-sénégalaise de 41 ans aborde l’épineuse question de la restitution des oeuvres d’art volées à l’Afrique.

Un mouvement amorcé ces cinq dernières années par les anciennes puissances occidentales, dont la France, l’Allemagne et la Belgique. Pour raconter l’histoire de 26 oeuvres pillées en 1892 par les troupes coloniales françaises au royaume du Dahomey, dans le centre-sud du Bénin actuel, composé alors de plusieurs royaumes, Mati Diop fait parler en voix off la statue anthropomorphe du roi Ghézo.

Dans la langue du Bénin, le fon, il se plaint de ne plus porter de nom, seulement un numéro, « le 26 », dans les réserves du musée du Quai Branly à Paris. Il décrit son arrachement à sa terre, sa vie en exil, puis son récent rapatriement dans un musée de Cotonou, la capitale du Bénin.

Pour cette narration, « il était particulièrement important que la statue s’exprime dans une langue du Bénin et non le français, la langue du colonisateur », souligne cette « Afrodescendante », comme elle se décrit elle-même, qui est née et a grandi à Paris.

« Trucs »

 

Les présidents français Emmanuel Macron et béninois Patrice Talon, à l’origine de cette restitution qui a eu lieu le 10 novembre 2021, n’apparaissent pas dans le film. Pour Mati Diop (Grand Prix à Cannes en 2019 pour « Atlantique », la plus haute distinction après la Palme d’Or), il ne s’agissait pas de célébrer cette initiative politique.

Au contraire, la fille du musicien Wasis Diop voulait souligner que le retour de ces 26 trésors était très peu « par rapport aux 7.000 oeuvres encore captives au musée du Quai Branly ». La deuxième partie du film se penche sur la réception de ces statues dans un pays totalement transformé depuis leur départ et qui les avait partiellement oubliées.

Dans un débat entre étudiants béninois, l’un d’entre eux explique qu’il a grandi avec les dessins animés de Tom et Jerry et n’avait aucune connaissance de l’existence de ces « trucs ». « ‘Dahomey’ nous pousse à nous interroger sur toute l’histoire transmise depuis l’enseignement primaire, secondaire et universitaire » au Bénin, constate Gildas Adannou, étudiant de l’université d’Abomey Calavi, auteur et réalisateur de 29 ans, dans un entretien à l’AFP.

« Travail de transmission »

 

Mati Diop aimerait que son film soit « vu dans un maximum de pays africains ». « Il faut le montrer aux premiers concernés », dit à l’AFP celle qui est aussi la nièce du réalisateur sénégalais Djibril Diop Mambéty, réalisateur de « Touki Bouki » – film majeur du cinéma africain récompensé à Cannes par le prix de la critique internationale en 1973. « J’ai envie qu’il soit montré dans les universités, dans les écoles, Il y a un vrai travail de transmission à faire », ajoute Mati Diop.

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AFP

Source : VOA Afrique (Etats-Unis) – Le 19 février 2024

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