Chers « mourabitounes», j’aurais préféré vous appeler autrement. D’un nom moins guerrier, plus tranquille qui fasse davantage équipe, Collectif. «Yaadiibé» par exemple. Les compagnons en haalpulaar mais la langue importe peu.
La guerre, on l’a trop présente dans la vraie vie ! De plus, un nom conquérant, chargé d’histoire de surcroît, comporte l’inconvénient de se retourner quand la mission échoue. L’on sait ce qu’on pense, ce qu’on dit et ce qu’il advient des conquérants défaits. Mais passons.
Vous savez à quel point nous vous souhaitons de belles et pacifiques conquêtes, en victoires, en qualifications, en finales et, au final, la conquête ultime, le Graal : la coupe. Il y va de la santé et de la salubrité nationale. Oui !. Rien que cela ! Réalisez que vous êtes le seul symbole national à spontanément «construire du commun» dans le pays ? Vos sorties sont des parenthèses enchantées, un souffle. Vous arrivez à faire tenir ensemble du disparate. Vous reliez des archipels qui, d’habitude, au mieux, s’ignorent. Pas une mince affaire que tout cela !
D’ailleurs, la charge n’est-elle pas pesante ? A vous seuls, vous faites ce qui, en temps normal, est dévolu à trois « instances» : famille, école…armée. Vous bâtissez la cohésion et l’esprit publics. Normal que, comme dans la chanson, vous ressentiez le poids du fardeau sur les épaules. Vos compétitions sont nos compétitions. Vos victoires font notre enthousiasme et, il faut le dire, nos débordements. Vos non victoires génèrent nos compréhensibles mais compréhensifs regrets. Il arrive, soyons honnêtes, qu’elles fassent dégénérer les choses. Les spécialistes disent que ça va de mieux en mieux. Hier en fut une belle illustration. Alors, merci pour tout.
La prochaine fois, c’est dit, vous resterez plus longtemps. Et la fois d’après, encore plus longtemps. « Essayer, échouer, toujours échouer mais qu’importe : essayer et échouer mieux ». Jusqu’à la réussite promise.
En attendant, j’ai tenu à vous faire cette lettre. Je me suis fait aider pour la rédiger. Je vais vous épargner le sempiternel : l’essentiel, c’est de participer et la condescendante bienveillance qu’elle charrie. Vous n’en êtes plus là et nous n’en sommes plus là avec vous. Je préfère dire que vous êtes des «magnifiques perdants».
A ceux qui, contre tout réalisme, vous voyaient beaucoup plus loin et plus « tard» dans cette compétition, je me permettrais de rappeler que « les objectifs surestimés entraînent toujours des désillusions». Non sans quelque mesquinerie, je dirais de vos adversaires d’hier, nos frères angolais dont tous conviennent qu’ils ont «vaincu sans avoir raison» de vaincre « qu’ils ont réussi mais dans quel état». Ce fut déjà le cas avec les frères burkinabé.
Quant à vous, vous n’avez aucune raison de perdre espoir. Ne serait-ce que parce qu’il n’y a aucune raison d’insulter l’avenir. Surtout quand il semble prometteur. Alors « à qui ne veut désespérer, il faut placer son regard loin». Vous avez notre confiance. « On ne croit que ceux qui croient en eux».
Pour conclure, j’ai tenu à partager avec vous cette réflexion : « Fort heureusement, chaque réussite est l’échec d’autre chose». Et si on inversait la phrase pour faire que chaque échec soit la réussite d’autre chose ?
Tijane BAL pour Kassataya.com