CAN 2024 : où sont passés les supporteurs ?

Moins de 37 000 spectateurs ont assisté au match d’ouverture entre la Côte d’Ivoire et la Guinée-Bissau, samedi, dans un stade comptant 60 000 places.

Le Monde – Les autorités ivoiriennes et le Comité d’organisation de la Coupe d’Afrique des nations de football (Cocan) avaient promis « la plus grande CAN de l’histoire », alignant des chiffres à donner le tournis : 1,5 milliard de dollars (environ 1,4 milliard d’euros) investis dans la rénovation et la mise à niveau des infrastructures, des stades capables d’accueillir jusqu’à 60 000 supporteurs, plus de 5 000 demandes d’accréditation reçues (plus du double qu’au Cameroun en 2021), 1 million de visiteurs attendus dans les stades… L’ambiance promettait d’être électrique dans ce pays fou de ballon rond qui n’avait plus organisé cette compétition continentale depuis 1984.

Promesse tenue dans les rues, les maquis (restaurants) et les « fan zones ». Mais pas dans les stades, où s’alignent match après match des gradins désespérément vides. Le coup d’envoi de la compétition, donné samedi 13 janvier par un match entre la Côte d’Ivoire et la Guinée-Bissau, aurait dû remplir le fameux stade Alassane-Ouattara d’Ebimpé, nouvelle vitrine du football ivoirien. Le chef de l’Etat n’a pas manqué d’effectuer un tour de stade sous les vivats autour de la pelouse fraîchement rénovée, avant le lancement de la fastueuse cérémonie d’ouverture.

Seulement, les effectifs des spectateurs, donnés au terme de la rencontre, ont confirmé l’impression générale : le stade était à moitié rempli. 36 858 supporteurs étaient présents, selon l’annonce du speaker, sur les 60 000 places que compte l’enceinte flambant neuve. Un vide qui a entaché l’ambiance par ailleurs festive, au point que dans les gradins, les imprécations ne visaient pas l’équipe bissau-guinéenne, comme à l’accoutumée, mais les détenteurs d’un billet qui n’avaient pas daigné faire le déplacement.

Pourquoi une telle défection, alors que le Cocan avait annoncé, bien en amont de la compétition, que tous les tickets pour les matchs de la Côte d’Ivoire avaient été vendus ? Où sont passés ces quelque 23 000 spectateurs fantômes ?

Marché noir, corruption, boycott ?

 

Yacine Idriss Diallo, le président de la Fédération ivoirienne de football (FIF), a lui-même reconnu à l’issue du match ne pas pouvoir expliquer ces absences. « Est-ce que les gens ont eu peur de la pluie, de la distance, des conditions ? », s’est-il interrogé, faisant allusion à la météo incertaine et à la position du stade d’Ebimpé, en banlieue d’Abidjan, difficile d’accès au point que les recommandations officielles conseillaient de partir à midi pour être certain d’être installé avant le début du spectacle, à 18 heures. Des facteurs certes légitimes mais qui expliquent difficilement les 23 000 défections.

Sur les réseaux sociaux, les supporteurs ivoiriens frustrés crient au « TicketGate » et avancent plusieurs hypothèses : marché noir, corruption, voire un boycott orchestré pour nuire au prestige du chef de l’Etat, qui a misé très gros sur cette compétition.

Voyant pointer le scandale, la Confédération africaine de football (CAF) et le Cocan ont donné lundi de premières explications. Ils précisent d’abord que sur les 60 000 places que compte le stade d’Ebimpé, plus de 9 000 sont non exploitables, dévolues notamment au personnel stadier, aux agents de sécurité et aux équipes médicales. Les gradins peuvent en réalité accueillir 50 786 personnes, ce qui signifie que ce n’étaient pas 23 142 spectateurs fantômes qui hantaient Ebimpé, mais 13 928.

Selon leurs explications, la CAF et le Cocan n’ont donc mis en vente que 47 000 places pour le match d’ouverture, laissant pour une raison inexpliquée 3 786 places hors du commerce. Sur ces 47 000 tickets, une part a été vendue au public, une autre réservée aux entreprises et aux institutions, et une dernière octroyée à la CAF pour ses partenaires, ses sponsors et les fédérations sportives étrangères. Le détail de la répartition n’a pas été donné, mais on évoque du côté du Cocan un tiers des places réservées à la CAF, selon la convention hôte signée par la Côte d’Ivoire.

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  (Abidjan, correspondance)

Source : Le Monde

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