Zango, le champion est surtout un «homme intègre» / Par Tijane BAL

Kassataya C’est un peu une médaille française. Un commentateur de France TV dixit après le sacre, hier, de Zango. Réplique de Maryse-Ewanjé-Epée, légende du saut en hauteur féminin français, désormais commentatrice: Non, c’est une médaille burkinabé. Laissons-là au Burkina qui n’en a pas beaucoup.

Echange en apparence anodin mais peut-être non dénué d’insinuations. Il est habituel de voir rappeler, voire marteler que tel ou tel athlète africain vit et s’entraîne en France. Surtout quand le succès lui a souri comme hier puisque Zango avait décroché la médaille d’or au triple saut. Il n’y a rien de singulier à voir des athlètes s’entraîner hors de chez eux au gré de leur parcours personnel et/ou professionnel.

L’heptatlonienne Esther Turpin vit et s’entraîne aux USA. La médaille d’or de l’heptatlon, la Britannique Katarina Johnson Thompson, s’est entrainée un moment en France. On sait que la grande Marie-Joe Perec avait, au tournant de sa brillante carrière, rejoint à L.A. la bande du coach de légende John Smith. Le triple sauteur Benjamin Compaoré s’entraîne désormais en Espagne. Métis et d’origine burkinabé par son père, Compaoré est français. Cela fait la différence.

Encore que…Bien que vivant dans le Nord de la France (à Béthune) et s’entraînant au Club Artois-Athlétisme, Zango est burkinabé et représente les couleurs de son pays. Ce critère aurait d’ailleurs dû être suffisant. Le drapeau devrait suffire. Zango aurait été hollandais, allemand ou américain, le débat n‘aurait pas été posé dans les mêmes termes.

Dans ces pays, les conditions d’entraînement sont a minima identiques. C’est donc de représentation et un peu d’«imaginaire» qu’il s’agit En réalité, la différence d’appréciation tient, semble-t-il, à un sous-entendu. Celui-ci, pas toujours discret d’ailleurs, tient à l’idée que, malgré leur talent, les sportifs africains auraient eu un succès moindre à partir de chez eux.

Il y a plusieurs années, Nicolas Sarkozy (pas encore président) avait dit de Yannick Noah, pourtant français et métis qu’il devait à la France ce qu’il est devenu. Concernant le même Noah, Raymond Barre était allé beaucoup plus loin évoquant «ce que la France est capable de faire en matière de civilisation». (Dans un autre registre, Omar Sy a eu droit à une réflexion similaire de la part de Marion Maréchal Le Pen).

A ceux qui, il est vrai curieusement, soutenaient que l’équipe de France de foot avait remporté le Mondial grâce à des « Africains », un célèbre commentateur avait répliqué que les mêmes sans le staff médical, l’encadrement, les équipements auraient eu des résultats moindres. Ce qui est vraisemblablement juste. Sauf qu’à une affirmation approximative qui, paradoxalement, rejoignait la rhétorique de disqualification de l’extrême droite, avait répondu une objection déplacée. Débat vicié dans les deux cas.

Tijane BAL pour Kassataya.com

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