es opérations de maintien de la paix (OMP) des Nations unies en Afrique sont-elles à bout de souffle ? Alors qu’au – LMali, la Minusma s’est vu sèchement indiquer la sortie par la junte le 16 juin, une réflexion est en cours, à New York, sur les évolutions à apporter à un modèle régulièrement contesté dans les pays où les casques bleus sont déployés. A peine une semaine après l’injonction malienne, Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies, relevait ainsi devant les étudiants de Sciences Po Paris que « les opérations de maintien de la paix où il n’y a pas de paix à maintenir n’ont pas vraiment beaucoup de sens ».
A ce jour, la moitié des douze OMP en cours se déroulent en Afrique : en Centrafrique, au Mali, en République démocratique du Congo (RDC), au Sahara occidental, au Soudan du Sud et à Abyei, une zone contrôlée par le Soudan mais réclamée par le Soudan du Sud. Ces missions mobilisent plus de 72 000 casques bleus sur les 86 000 personnels militaires, policiers et civils déployés sous le drapeau de l’ONU à travers le monde.
Nées dans un contexte de guerre froide, elles ne sont plus adaptées à l’évolution des crises sur le continent, marqué par la prolifération des cellules djihadistes et des groupes politico-militaires défendant des agendas intra-étatiques. Désormais, les gouvernants africains semblent privilégier l’intervention de paramilitaires privés, avec lesquels ils définissent le mandat – comme le russe Wagner, qui intervient ou est intervenu en Centrafrique, au Mali, en Libye, au Soudan ou au Mozambique –, ou des forces d’un Etat en vertu d’un accord bilatéral.
Confronté à ces nouvelles concurrences et à la lassitude des bailleurs de fonds, Antonio Guterres a ainsi estimé, le 22 juin à Paris, qu’il était temps de « repenser notre approche de la paix et de la sécurité » et de mettre en place une « nouvelle génération d’opérations d’imposition de la paix et de lutte contre le terrorisme menées par des organisations régionales », en particulier en Afrique. Cette évolution figure au menu du nouvel agenda pour la paix qu’il a lancé fin 2022 en vue d’amorcer « une refonte du multilatéralisme ».
La fin d’un cycle, où les OMP dites « intégrées » englobaient les dimensions sécuritaire, humanitaire et politique, est entamée.
Le bouc émissaire idéal
Du Mali à la RDC, en passant par la Centrafrique et le Soudan du Sud, les missions ont échoué à assurer ce qui est pourtant au cœur de leur mandat : la protection des civils. La tuerie perpétrée en novembre 2018 à Alindao, en Centrafrique, où 112 personnes ont été assassinées malgré la présence de soldats de la paix sur place, en est un symbole.
Tout comme le massacre d’Ogossagou, village du centre du Mali où au moins 160 personnes ont été tuées, en mars 2019, sans que les casques bleus n’interviennent à temps. Quatre ans plus tard, la menace djihadiste s’est étendue vers le sud du Mali et chez les Etats voisins. La junte a trouvé dans les quelque 15 000 casques bleus un bouc émissaire idéal. Sa volonté de les voir plier bagage après dix ans de présence a été concrétisée le 30 juin par le Conseil de sécurité. La propagation de l’insécurité, si elle incombe pour une bonne part aux autorités maliennes, révèle aussi les limites d’une opération onusienne pensée comme une mission d’aide à la reconstruction de l’Etat en complément de la force antiterroriste française « Barkhane », déployée à partir de 2014 dans le nord. Une fois cette dernière chassée, en août 2022, le dispositif onusien est inévitablement devenu bancal.
Au Soudan du Sud, le désaveu a là encore été cinglant pour la mission des Nations unies, la Minuss, quand, en décembre 2013, des combats ont éclaté au sein de l’armée, conduisant des dizaines de milliers de civils à se réfugier sur les bases de l’ONU.
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