En Côte d’Ivoire, les titulaires d’un doctorat peinent à trouver un emploi

Selon un collectif de « docteurs non recrutés », 3 000 détenteurs du diplôme le plus élevé de l’université sont au chômage, alors même que les établissements publics sont en déficit d’enseignants chercheurs.

Le Monde – L’année universitaire s’achève en Côte d’Ivoire, et la même question s’impose à tous les diplômés : que faire ? Le 10 mai, le petit monde de la recherche s’est réjoui de la décision du ministre de l’enseignement supérieur, Adama Diawara, d’ouvrir 700 nouveaux postes à destination des détenteurs d’un doctorat. Soit 25 postes de plus que ce qui avait été prévu. Une mince victoire mais une victoire tout de même pour le Collectif des docteurs non recrutés de Côte d’Ivoire (CDNR-CI), qui portait le plaidoyer auprès gouvernement.

En décembre 2022, il avait organisé une marche en direction de la primature, dans le quartier du Plateau, pour protester contre les faibles possibilités d’embauche dans le public. Les forces de l’ordre avaient alors raflé 46 personnes, jugées une semaine plus tard pour « troubles à l’ordre public » et condamnées, pour la quasi-totalité d’entre elles, à quatre mois de prison avec sursis. Aux racines de la colère de ces diplômés chômeurs, ce paradoxe étonnant : les établissements publics sont en déficit d’enseignants-chercheurs alors que les diplômés, eux, peinent à trouver un emploi.

En 2014, un rapport du ministère de l’enseignement supérieur estimait que la Côte d’Ivoire avait un besoin de 5 000 titulaires de doctorats. Aucune réévaluation n’a été faite par la suite, mais le pays s’est depuis doté de trois nouvelles universités… sans que les embauches suivent. Selon le CDNR-CI, 3 000 diplômés sont actuellement au chômage. Le ministre Adama Diawara en dénombre pour sa part 1 919.

« Cette crise est systémique et structurelle, explique Bogui Diakra, porte-parole du collectif. Elle provient d’abord d’une mauvaise application du système LMD [licence-master-doctorat]. » Ce système, destiné à uniformiser les diplômes dans le monde, est entré en vigueur en Côte d’Ivoire pendant l’année académique 2012-2013. Des écoles doctorales devaient être mises en place concomitamment pour réguler le flux de doctorants entrants, de manière à éviter le trop-plein de diplômés en bout de chaîne.

« Malheureusement, cette mesure n’a pas pu voir le jour jusqu’à présent, regrette Bogui Diakra. Le nombre pléthorique d’étudiants formés dans ces conditions et l’absence de recrutements réguliers et suffisants ont naturellement créé une explosion record du nombre de docteurs chômeurs en Côte d’Ivoire. »

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(Abidjan, correspondance)

Source : Le Monde – (Le 31 mai 2023)

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