Pourquoi les faits divers passionnent-ils ?

The Conversation – Meurtre d’une fillette dans les Vosges, corps de femme découpé dans un parc parisien, affaire Pierre Palmade … Ce type d’informations suscite émoi, compassion ou réprobation, mais engendre surtout un flux médiatique de grande ampleur. Certains parlent d’overdose, de médias qui courent après l’audience ou de voyeurisme, mais c’est oublier le grand intérêt du public pour les faits divers.

Or, ces derniers sont extrêmement nombreux : selon les statistiques du ministère de l’Intérieur, l’année 2022 a connu près de 1 000 homicides, plus de 3 000 morts par accident de la route, près de 200 000 violences intrafamiliales, près de 100 000 violences sexuelles, sans compter les vols (plus d’un million), les dégradations (plus de 500 000), les mises en cause pour trafic de stupéfiants (près de 300 000) ou les escroqueries (près de 500 000). La plupart de ces faits divers sont rarement rapportés, ou alors dans de courts articles de la presse locale. Mais certains « émergent » plus que d’autres et, répercutés par de nombreux médias, ils prennent une dimension sociale qui fascine le public. Pourquoi un tel engouement ?

Ces faits divers ont une fonction socioculturelle qui permet aux humains de « faire société ». Ils correspondent en cela aux mythes grecs, eux-mêmes emplis de meurtres, incestes et viols, ou aux contes de Perrault et de Grimm, plus dans le symbolique. Le fait divers résume l’enjeu de la vie en société, il est le reflet des dérives possibles de l’être humain en communauté. Un fait divers donne à voir un animal social perturbé par ses pulsions, tiraillé entre ses passions et sa raison. Et comme nous le sommes tous, il ne peut que nous passionner.

 

Comment les faits divers ont envahi la société

 

À partir du milieu du XIXe siècle, la presse industrielle à grand tirage, l’alphabétisation croissante et la sécularisation des sociétés européennes créent un « marché » du fait divers journalistique qui prend la place des mythes et contes d’antan. L’affaire Troppmann, un tueur en série de Pantin, feuilletonnée en septembre et octobre 1869 par Le Petit journal est emblématique de l’irruption du fait divers qui passionne les foules et permet d’augmenter les tirages.

Ce « marché » est amplifié aux XXe et XXIe siècle par la multiplication des canaux d’information (radio, télévision, Internet, réseaux sociaux). Le fait divers est devenu un genre journalistique à part entière, décliné sur tous les supports d’information. Ainsi, l’émission Affaires sensibles par Fabrice Drouelle est présente sur France Inter depuis 2014 et sur France 2 depuis 2021, tandis que Hondelatte raconte, animée par Christophe Hondelatte, est diffusée quotidiennement sur Europe 1 depuis 2016. La chercheuse Claire Sécail a montré comment la télévision s’est emparée massivement des faits divers depuis une vingtaine d’années. Livres, documentaires et films viennent compléter le panorama.

 

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Source : The Conversation – (Le 27 avril 2023)

Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source www.kassataya.com

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