Le « Mandela de Harlem » et le « karma » de Trump

La Pressa.ca – (New York) – Grand et élancé, Yusef Salaam dépasse d’une bonne tête toutes les personnes qui se pressent autour de lui dans un restaurant de Harlem, où ce membre des « cinq de Central Park » tient une activité électorale, par une soirée d’avril.

 

À l’écart, Keith Wright, président du Parti démocrate de Manhattan, observe la scène, tout en vantant celui qui a été condamné à tort avec quatre autres adolescents de Harlem pour l’agression et le viol d’une joggeuse blanche en 1989. Retentissante à l’époque, l’affaire n’a jamais été oubliée, en raison notamment du documentaire de Ken Burns The Central Park Five (2012) et de la minisérie d’Ava DuVernay When They See Us (2019), qui ont jeté une lumière crue sur le racisme du système judiciaire américain.

Aujourd’hui âgé de 49 ans, Yusef Salaam brigue le siège de Harlem au conseil municipal de New York, qui fera l’objet d’une primaire démocrate le 27 juin prochain.

PHOTO RICHARD HÉTU, COLLABORATION SPÉCIALE

Keith Wright, président du Parti démocrate de Manhattan

 

« Yusef est probablement la chose la plus excitante qui soit arrivée sur la scène politique à Harlem depuis longtemps. » Keith Wright, président du Parti démocrate de Manhattan

 

« Il est authentique. Il est le Nelson Mandela de Harlem.

– C’est beaucoup dire, interjette son interlocuteur.

– Je l’ai dit. Il a été un prisonnier politique, à l’âge tendre de 15 ans. »

 

PHOTO BY CLARENCE DAVIS, ARCHIVES NY DAILY NEWS, FOURNIE PAR GETTY IMAGES

Escorté par des policiers, Yusef Salaam arrive au tribunal, à New York, en 1990.

 

Plus tard, dans un coin tranquille du restaurant, Yusef Salaam ne rejettera pas d’emblée la comparaison. « C’est avec beaucoup d’humilité que je reçois ces éloges, dira-t-il d’une voix douce. Car je me souviens de ce que c’était que d’être au plus bas. »

 

« Je me souviens de l’époque où Donald Trump a pris une pleine page de publicité, appelant l’État à nous tuer. Je me souviens de cela. »Yusef Salaam

 

D’un lynchage à l’autre

 

Il n’est pas le seul. Au plus fort du lynchage médiatique provoqué par l’agression et le viol de la joggeuse de 28 ans, le futur président des États-Unis avait acheté une pub dans quatre journaux locaux, dont le New York Times, pour exprimer sa haine des « braqueurs », des « meurtriers » et des « criminels » et réclamer le rétablissement de la peine de mort dans l’État de New York.

Élevé par une mère politisée, Yusef Salaam se rappelle que cette pub lui avait fait penser à Emmett Till, cet adolescent noir lynché à mort dans le Mississippi des années 1950 après avoir été accusé d’avoir sifflé une femme blanche.

« Cette publicité était en fait un appel aux instincts les plus sombres de la société. Ils étaient prêts à nous faire ce qu’ils avaient fait au jeune Emmett », dit Salaam, qui a passé près de sept ans en prison et décrit son expérience dans un livre intitulé Better, Not Bitter.

PHOTO ED JONES, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Donald Trump, à son arrivée au tribunal pénal de Manhattan, le 4 avril

 

 

L’ironie veut que Yusef Salaam doive aujourd’hui à Donald Trump d’avoir fait mousser sa campagne. Le jour de l’inculpation de l’ancien président par un grand jury de New York en lien avec l’affaire Stormy Daniels, le néophyte de la politique a résumé sa réaction en un seul mot sur Twitter : « Karma. »

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Richard Hétu
Collaboration spéciale

 

 

 

 

Source : La Pressa.ca (Canada)

 

 

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