dieu les interminables visioconférences : en diplomatie, rien ne vaut le contact direct. L’activité aérienne des leaders politiques et de leurs ministres a repris ses droits dans le monde post-Covid avec une frénésie de voyages à faire s’emballer les compteurs d’empreinte carbone. Les circuits, cependant, ont changé. Un nouveau hub émerge, autour duquel gravite une bonne partie de cette frénésie : Pékin. – A
Depuis qu’elle a rouvert après trois ans de politique zéro Covid, la capitale chinoise est l’endroit où il faut être. Comme pour rattraper le temps perdu, du premier ministre de Singapour, Lee Hsien Loong, au président français, Emmanuel Macron, du chef du gouvernement malaisien, Anwar Ibrahim, au président brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva, sans oublier les nombreux entretiens bilatéraux en marge du G20 à Bali (Indonésie) en novembre 2022, on accourt du monde entier pour voir Xi Jinping, le tout-puissant maître de la Chine. Dernier en date, le président du Gabon, Ali Bongo, est arrivé à Pekin mardi 18 avril.
Les Européens ne sont pas les moins pressés. Le chancelier allemand, Olaf Scholz, a coiffé tout le monde au poteau en novembre 2022, suivi de Charles Michel, le président du Conseil européen, puis du président du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez. Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, a accompagné M. Macron ; deux de ses vice-présidents, Josep Borrell et Frans Timmermans, n’ont dû renoncer au voyage ces derniers jours que parce qu’un test positif au Covid-19 les empêchait de partir. La cheffe de la diplomatie allemande, Annalena Baerbock, elle, a pu s’envoler, deuxième émissaire de Berlin en six mois. Et le premier ministre polonais qui critique cette assiduité européenne oublie sans doute que son président, Andrzej Duda, était venu lui aussi parler commerce avec Xi en février 2022, alors que les forces russes se pressaient aux portes de l’Ukraine.
Ils sont tous là – sauf les Américains. Avorté en février à cause de la controverse sur les ballons « espions » chinois, le voyage à Pékin d’Antony Blinken, le secrétaire d’Etat, n’a toujours pas été reprogrammé. Et, pendant qu’il participait sagement avec ses collègues du G7 à une réunion au Japon, lundi, bien d’autres choses se passaient sous les radars occidentaux. Sergueï Lavrov, le ministre russe des affaires étrangères, débarquait à Brasilia en jeans et baskets. Une façon, peut-être, de montrer à quel point il s’y sent à l’aise. Il y a en tout cas été très bien accueilli, notamment par Lula, tout juste rentré de Pékin et d’Abou Dhabi. A l’Institut Rio Branco, l’académie diplomatique de Brasilia, il a comparé la « propagande » des Européens à celle de Goebbels. Le Brésil était la première étape d’une tournée de M. Lavrov en Amérique latine.
Le Brésil est de retour
Le même jour, le nouveau ministre de la défense chinois, Li Shangfu, réservait à Moscou son premier voyage à l’étranger. Ce n’est qu’un ministre, mais pas n’importe lequel ; le Kremlin a donc donné tout le relief possible à sa visite, jusqu’à le faire recevoir par le président russe, Vladimir Poutine, pour un entretien qui n’avait pas été annoncé au préalable. Message au reste du monde : l’amitié sino-russe, « plus forte encore que pendant la guerre froide ».
A l’évidence, ce n’est pas qu’une question de rattrapage. En trois ans, secoué par les effets de la pandémie puis de la guerre russe en Ukraine, le monde a changé ; les routes de la diplomatie de ces derniers mois en illustrent les nouvelles dynamiques.
Source :
Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source www.kassataya.com
Les opinions exprimées dans cette rubrique n’engagent que leurs auteurs. Elles ne reflètent en aucune manière la position de www.kassataya.com