L’Inde, nouvelle puissance démographique

Le MondeEnquêteAvec 1,417 milliard d’habitants, la population du sous-continent supplante désormais celle de la Chine et devrait continuer de croître jusqu’en 2060, pour atteindre 1,7 milliard. Une situation qui place le pays devant de multiples défis.

L’ONU a fixé l’annonce à la mi-avril. Mais des instituts démographiques indépendants, comme le World Population Review, assurent que le dépassement est déjà intervenu dès 2022. L’Inde est désormais le pays le plus peuplé de la planète et le restera au moins jusqu’à la fin du siècle, avec 1,417 milliard d’habitants, contre 1,412 milliard pour la Chine. Les suivants sur le podium de la démographie mondiale, les Etats-Unis avec 338 millions d’individus, ou l’Indonésie (275 millions) et le Pakistan (234 millions) sont à peine plus grands que l’Etat de l’Uttar Pradesh, dans le nord de l’Inde, le plus peuplé du pays.

Le sous-continent compte plus d’habitants que l’Europe entière ou les Amériques. Il fait figure de géant, même si la taille exacte de sa population n’est pas précisément connue, car le gouvernement indien, contrairement à la tradition depuis plus d’un siècle, n’a pas effectué de recensement décennal depuis 2011 – officiellement en raison de la pandémie de Covid-19. L’opposition soupçonne le premier ministre, Narendra Modi, de différer ce recensement, indispensable pour l’ajustement des politiques et dépenses publiques, après les élections générales prévues au printemps 2024, afin d’éviter la diffusion de statistiques qui mettraient au jour l’état réel du pays en matière de pauvreté, de castes, d’alphabétisation ou encore d’emploi.

La population de l’Inde a augmenté de plus de 1 milliard de personnes depuis l’indépendance en 1947 et va continuer de croître jusqu’en 2060, pour atteindre 1,7 milliard, alors même que le pays a commencé sa transition démographique dans les années 1980. Son indice synthétique de fertilité (2 enfants par femme) se situe désormais légèrement en dessous du seuil de renouvellement (2,1 enfants par femme). L’évolution est très lente car l’Inde n’a pas eu recours, contrairement à la Chine, à une politique coercitive. Le pays ne l’aurait pas supporté, après le traumatisme de la campagne de stérilisation forcée imposée par Indira Gandhi et son fils Sanjay lors de l’état d’urgence en 1976. Dans des camps, 8 millions d’hommes avaient alors subi des vasectomies.

C’est un pays extrêmement jeune, masculin et inégalitaire qui prend le relais de la Chine à la tête de la population mondiale : 40 % de la population a moins de 25 ans, l’âge médian en Inde est de 28 ans, contre 38 ans aux Etats-Unis et 39 ans en Chine. Les adultes de 65 ans et au-delà ne représentent que 7 % de la population indienne, contre 14 % en Chine et 18 % aux Etats-Unis.

Dans un centre de coaching pour préparer les grandes écoles à Kota, au Rajasthan (Inde), le 25 mars 2023.

Croissance du travail informel

Cette situation place l’Inde face à un périlleux défi : soit le pays est capable de créer des emplois pour le million de jeunes entrant chaque mois sur le marché du travail, et il bénéficiera du fameux « dividende démographique » en matière de capacité de production, soit la croissance des emplois ne décolle pas et la situation risque de devenir un désastre démographique. Pour l’heure, le marché est très loin de répondre aux besoins.

 

Alors que l’économie indienne créait 7 millions d’emplois, dans les années 2000-2010, elle n’en génère plus que de 3 millions à 4 millions, en raison notamment d’un secteur informatique moins pourvoyeur d’emplois. Il y a une perte gigantesque de main-d’œuvre, avec seulement 40 % de la population indienne en âge de travailler et actifs. Résultat : le travail informel continue de croître. Il représente plus de 80 % des emplois, sans protection sociale, sans retraite, sans soumission à l’impôt.

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 (New Delhi, correspondante)

Source : Le Monde

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