Les États-Unis n’ont pas tiré toutes les leçons de la guerre en Irak

Vingt ans après, voici cinq enseignements que l'Amérique devrait retenir.

Slate – Il y a vingt ans, dès le 20 mars 2003, les États-Unis envahissaient l’Irak en étant dotés de renseignements erronés, d’un programme inadéquat et avec l’objectif démesurément ambitieux de construire une nouvelle nation irakienne, dont les contours suivraient les spécifications américaines.

Le résultat? Plus de mille milliards de dollars perdus, des milliers de soldats tués et blessés, des centaines de milliers d’Irakiens morts, un revers majeur dans la guerre contre Al-Qaïda, des dégâts irréparables à la réputation de l’Amérique et de vilains accrocs dans le tissu social et politique américain. Ces séquelles durables ont servi de mise en garde pour de futures interventions militaires dans la région.

Mais les États-Unis ont-ils totalement intégré les leçons de la guerre en Irak? Vingt ans plus tard, il est clair que Washington a encore des enseignements cruciaux à en tirer. En voici cinq, parmi les plus importants.

1. Une stratégie imparfaite peut être la meilleure stratégie quand même

Les États-Unis ont poursuivi une stratégie d’une imperfection frustrante en Irak pendant les dix années qui ont suivi la première guerre du Golfe (août 1990-février 1991). Cette stratégie, appelée «endiguement» («containment»), appelait des mesures économiques et militaires coercitives pour contenir le président irakien Saddam Hussein.

L’endiguement n’empêchait pas bon nombre de problèmes, notamment le fait que Saddam Hussein semblait sur la bonne voie pour obtenir des armes de destruction massive et éludait les inspections internationales. Il représentait également une menace pour sa propre population et pour la région dans son ensemble. Mais avec le recul, l’endiguement était une stratégie bien meilleure que de tenter de le renverser militairement dans l’espoir de donner naissance à un Irak stable et démocratique.

2. En politique étrangère, les décisions sont souvent moins rationnelles qu’elles en ont l’air

Il est fort probable que les principales personnalités de l’équipe de sécurité nationale de George W. Bush –le vice-président Dick Cheney, le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld, le président Bush lui-même– ne se voyaient pas comme des hommes susceptibles de se laisser facilement influencer par leurs émotions. Mais avec le recul, il apparaît clairement qu’ils l’ont été.

Si la politique intérieure, les intérêts bureaucratiques, les luttes intestines et les personnalités individuelles façonnent les décisions de politique étrangère, l’atmosphère émotionnellement chargée après le 11-Septembre, et tout particulièrement la peur intense d’une nouvelle attaque terroriste d’envergure, ont gravement interféré avec leur faculté de réfléchir aux questions cruciales. Et l’une des plus importantes consistait à savoir si Saddam Hussein était capable d’utiliser des armes de destruction massive contre les États-Unis ou d’en fournir à des terroristes.

Avec les idées plus claires, il apparaît évident que Saddam Hussein n’aurait rien eu à gagner et tout à perdre à utiliser ce type d’armes contre les États-Unis, que ce soit de façon préventive ou en les donnant à des terroristess’il en avait eu en masse, bien sûr. Mais la terreur omniprésente après les attentats du 11-Septembre, empêchant d’avoir les idées bien nettes, a conduit de nombreux législateurs à conclure que le danger était réel.

3. L’unilatéralisme est dangereux

L’administration Bush n’avait pas entièrement renoncé au multilatéralisme dans la période qui avait précédé la guerre. Elle avait œuvré à obtenir une autorisation légale par le biais des Nations unies pour attaquer l’Irak et lorsqu’elle s’est jetée dans la guerre, elle l’a fait avec une coalition d’alliés et de partenaires.

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Chris Chivvis — Traduit par Bérengère Viennot — Édité par Émile Vaizand

Source : Slate (France)

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