Olivier Dubois : du Mali au Niger, dans les coulisses de sa libération

« Le Monde » a pu identifier des intermédiaires qui ont permis la libération du journaliste français, le 20 mars, après presque deux ans de captivité au Sahel.

Le Monde  – A Paris comme à Niamey, un seul maître-mot : en dire le moins possible. La libération du journaliste français Olivier Dubois, le 20 mars au Niger, après presque deux ans de captivité au Sahel, est l’aboutissement d’une « manœuvre portée par le Niger », lâche une source à l’Elysée, manifestement soucieuse de ne pas apparaître en première ligne. Il ne faut pas « découvrir la machine », explique une source haut placée à Niamey.

Il s’agit autant de conserver dans l’ombre les intermédiaires que d’éviter les inévitables questions gênantes : quelles ont été les contreparties offertes aux ravisseurs en échange de la libération du Français, enlevé le 8 avril 2021 à Gao, au nord-est du Mali, et de Jeffery Woodke, un humanitaire américain détenu depuis octobre 2016 ? Une rançon a-t-elle été versée ? Ces interrogations n’ont pas encore trouvé réponse mais Le Monde est en mesure de retracer certains détails des négociations.

 

Selon nos informations, pour extraire Olivier Dubois des mains du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, la filiale sahélienne d’Al-Qaida), plusieurs intermédiaires maliens sont intervenus sur le dossier. Le Haut Conseil islamique (HCI) malien, une instance religieuse très influente dirigée par cheikh Chérif Ousmane Madani Haïdara, a eu des rencontres avec les diplomates de l’ambassade de France à Bamako, mais « cela est resté officieux et n’a pas été très loin », explique un cadre du HCI qui fédère les organisations musulmanes du pays.

Parallèlement, un autre canal est ouvert, celui d’Abdoul Karim Ag-Matafa, un cadre de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), la coalition d’ex-rebelles touaregs et arabes du nord du Mali, qui dispose de bons contacts au sein de la mouvance djihadiste. Mais ces réseaux ne parviennent pas à faire avancer les discussions avec le GSIM.

Les espoirs se concentrent sur un personnage central du nord du Mali : Ahmada Ag-Bibi. Ce Touareg Ifoghas réputé pour ses liens avec Iyad Ag-Ghali, le chef du GSIM, mais aussi avec les services de renseignement maliens et algériens, est sollicité. Il avait contribué aux libérations de l’otage française Sophie Pétronin et de l’opposant malien Soumaïla Cissé, obtenues en échange de 190 djihadistes emprisonnés à Bamako et de 2 millions d’euros en octobre 2020. Joint par Le Monde, l’intéressé assure n’être « mêlé ni de près ni de loin à ces discussions » et avoir appris la libération des deux otages « à la radio ». Cependant, plusieurs sources confirment son implication dans le dossier, mais pas nécessairement jusqu’à son dénouement.

« Sérieuse accélération »

Les négociations sont d’autant plus compliquées qu’après le putsch qui met le colonel Assimi Goïta au pouvoir à Bamako, le 24 mai 2021, les relations entre la France et le Mali se détériorent. En quelques mois, l’opération « Barkhane » doit quitter le pays et l’ambassadeur de France, Joël Meyer, est expulsé. Est-ce ce qui pousse Paris à privilégier le Niger et son président Mohamed Bazoum comme médiateur ?

« Un canal a longtemps été maintenu entre les services français et maliens jusqu’au moment où la relation est devenue trop dégradée. Mais il n’y a pas eu de vases communicants. Le Niger a été saisi dès le départ car il ne fallait négliger aucune option », corrige une source élyséenne. D’autant qu’à Bamako, le colonel Goïta aurait refusé de libérer des prisonniers djihadistes en échange de l’otage français, comme l’exigeait le GSIM.

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Source : Le Monde 

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