Cisjordanie occupée : l’armée israélienne reste passive face aux violences des colons

Des extrémistes juifs ont mené, dimanche, une expédition punitive dans la ville d’Howwarah, après qu’un Palestinien a tué deux habitants d’une colonie. Elle a eu lieu sous le regard d’une base de l’armée toute proche.

Le Monde  – Rarement des colons israéliens avaient perpétré de telles violences. En toute impunité, au moins des dizaines d’entre eux ont mené, dimanche 26 février au soir, durant plusieurs heures, une expédition punitive contre la ville d’Howwarah et contre des villages voisins, dans le nord de la Cisjordanie.

Armés pour certains, ils ont incendié des voitures, des commerces et des habitations à l’entrée nord de la ville, en représailles après la mort de deux colons, tués dans la journée.

Selon les autorités de santé palestiniennes, un habitant du village voisin de Zaatara a été tué. Trois résidents d’Howwarah ont été blessés par des jets de pierres et des coups de barre de fer, selon Sawfat Ozril, membre du conseil municipal. Une centaine d’habitants ont été soignés après avoir inhalé des gaz lacrymogènes.

Ces représailles ont eu lieu sous le regard d’une base de l’armée toute proche. Son incapacité à les empêcher signale un dangereux écroulement de la chaîne de commandement. Elles décrédibilisent aussi les mesures de « déconfliction » annoncées quelques heures plus tôt par les principaux responsables de sécurité israéliens et de l’Autorité palestinienne. Washington se félicitait de les avoir réunis à Akaba dans un rare sommet, conduit sous le patronage de la Jordanie et de l’Egypte.

 

Poudrière

 

La première cible des colons, Howwarah, est un petit centre commerçant, peu politisé. Entre ces collines serrées, la route 60, « l’autoroute des colonies », ne peut contourner le bâti palestinien. Roulant depuis le sud et Jérusalem, les colons n’ont d’autre choix que de le traverser pour rejoindre leurs implantations dans le nord de la Cisjordanie. Dimanche, un Palestinien a ouvert le feu sur l’une de ces voitures, à bout portant, tuant deux frères âgés de 20 et 22 ans.

Une telle attaque était crainte de longue date. Depuis plus d’un an, l’armée israélienne a contribué à faire d’Howwarah une poudrière. Elle a pris part à une campagne lancée par des colons pour retirer tout drapeau palestinien le long de la route. Elle a protégé des descentes régulières de colons contre des commerçants, demeurées largement impunies. Les soldats se déploient régulièrement dans la ville, située au sud d’une intersection hautement militarisée, qui ferme l’accès à la grande cité palestinienne de Naplouse.

Dimanche, des soldats ont escorté des Palestiniennes âgées à l’écart des flammes. Mais ces images, diffusées par l’armée, ne peuvent masquer le fait qu’elle a laissé les colons se mobiliser, puis descendre sur la ville. Dans l’après-midi, des appels à la « vengeance » avaient rapidement circulé en ligne.

Le numéro deux du conseil régional israélien local, BenZion Davidi, estimait qu’« Howwarah doit être rasée aujourd’hui (…). La dissuasion doit être rétablie immédiatement, il n’y a pas de place pour la pitié ». Une députée de la coalition au pouvoir, Limor Son Har-Melech (Force juive), présente à Howwarah, exhortait l’Etat à « ne pas publier de condamnations et d’appels au calme, tandis que nos morts gisent devant nous ».

Le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, a demandé aux colons de « ne pas se faire justice » eux-mêmes. Cette expression, contestable, assimile des violences indiscriminées à un acte d’autodéfense. Elle a été reprise par Bezalel Smotrich, ministre au sein du ministère de la défense et ministre des finances, le principal représentant des colons au sein du gouvernement. Auparavant, celui-ci avait appelé l’armée à frapper « sans pitié, avec des chars et des hélicoptères ». Il exigeait une réponse « qui fasse comprendre que le maître de maison [Israël] est devenu fou ». Jeudi, ce civil s’est vu confier une large part de l’administration de la Cisjordanie occupée.

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(Jérusalem, correspondant)

Source : Le Monde

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