Partant de la parole de Dieu Tout-Puissant (O vous qui avez cru, entrez tous dans la paix ! Et ne suivez pas les traces de Satan. Il est en effet un ennemi déclaré pour vous), [Al-Baqara : 208].
Et en réponse aux défis existentiels auxquels toute l’humanité est confrontée, défis sanitaires et économiques jusqu’aux défis sécuritaires : guerres et tensions qui traversent de nombreuses régions du monde,
Soucieux de la nécessité d’une intégration des efforts, chacun à partir de son site et s’appuyant sur son cercle d’influence, pour contribuer à restaurer la conscience morale de l’humanité, afin de redonner force aux valeurs de miséricorde, de secours, et au sens de la coopération et de la bienveillance,
Conscients de l’importance de s’attaquer aux impulsions de guerre et aux réflexes destructeurs qui peuvent traverser certaines âmes, avant qu’ils ne se matérialisent en actions concrètes anéantissant des peuples et des pays,
En s’appuyant sur les résultats accumulés par la Conférence africaine au cours de ses sessions précédentes grâce à cet espace unique qu’elle a offert et qu’elle continuera à offrir aux ulémas, aux savants et aux chercheurs pour diffuser un message de paix et de coopération à travers le continent Africain,
La troisième session de la « Conférence Africaine pour la Paix » s’est tenue à Nouakchott sous le signe « Entrez tous dans la paix » du 17 au 19 janvier 2023, sous le haut patronage de Son Excellence Monsieur Mohamed Ould Cheikh Ghazouani, Président de la République Islamique de Mauritanie et avec le généreux et fidèle soutien des Émirats Arabes Unis et sous la supervision de Son Éminence Shaykh Abdallah Bin Bayyah, Président de la Conférence Africaine pour la Promotion de la Paix, Président du Forum de la Paix d’Abu Dhabi.
Des centaines de participants, dont des chefs d’état/présidents de république, des ministres, des représentants d’organisations internationales, des responsables d’organisations islamiques, des ambassadeurs et des représentants d’agences gouvernementales, de centres et d’organismes internationaux, des muftis, des savants, des juges, des penseurs/intellectuels, des universitaires, des professionnels des médias et autres, ont participé à la Conférence. Des milliers de personnes ont suivi également les séances, sessions et travaux de la Conférence via des plateformes électroniques et des sites sur les réseaux sociaux.
La Conférence s’est ouverte par un discours exhaustif de Son Excellence M. Mohamed Ould Cheikh Al-Ghazwani, Président de la République islamique de Mauritanie, dans lequel il a déclaré : « La défense de la paix, de la sécurité et de la stabilité ne peut être efficace et efficiente que par une forte immunisation des esprits des individus et de la conscience des sociétés, face aux discours qui font l’apologie de la violence sous toutes ses formes. Cela nécessite un travail inlassable pour consolider les valeurs de tolérance, d’ouverture, de justice et de fraternité, qui constituent l’essence de notre sainte religion, l’Islam, et de toutes les religions monothéistes».
Son Excellence Shaykh Abdullah Bin Bayyah, Président du Forum de la paix d’Abu Dhabi, a prononcé un discours de cadrage à l’ouverture de la cérémonie, et Son Excellence M. Muhammadu Buhari, Président de la république fédérale du Nigéria, a prononcé un discours important. Les allocutions de la séance d’ouverture se sont poursuivies avec un discours de Son Excellence le Président de la République de Guinée-Bissau prononcée en son nom par Son Excellence Soares Sambo, le Vice-Premier Ministre de la République de Guinée-Bissau, et des allocutions enregistrées du Président de la République du Niger, Son Excellence M. Mohamed Bazoum, et du Président du Rwanda, Son Excellence M. Paul Kagame. Ensuite, il y a eu les discours de Son Excellence Houssein Ibrahim Taha, Secrétaire Général de l’Organisation de la coopération islamique, Son Excellence Dr. Mohamed Mokhtar Jumaa, Ministre égyptien des Awqaf, et de Son Excellence Rachad Houssein, Ambassadeur pour les libertés religieuses au Département d’État américain.
Cette année, la Conférence Africaine a consacré un prix appelé « Prix de la Paix en Afrique» dont la première édition a été décernée à Son Excellence M. Muhammadu Buhari, Président de la République Fédérale du Nigeria, en l’honneur des efforts de Son Excellence et de la République du Nigéria dans la diffusion de la culture de la paix sur le continent, la création de médiations et le soutien aux négociations.
La cérémonie de clôture de la Conférence s’est déroulée en présence de Son Excellence Monsieur Mohamed El-Amin Ould Abeye Ould Cheikh El-Hadhrami, Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique de la Mauritanie, et Son Éminence Cheikh Ahmed Nour El-Helou, Mufti de la République du Tchad, qui ont tous les deux prononcé un discours.
Après la séance d’ouverture, les travaux de la conférence ont commencé pour couvrir une période de trois jours, les 17, 18 et 19 janvier 2023, au cours desquels les participants, dans leurs séances plénières et leurs ateliers, ont commencé à élaborer une réflexion sur les moyens à mettre en œuvre afin d’atteindre la paix et surmonter les divers obstacles et handicaps pour concrétiser le slogan: « Ô vous qui avez cru, entrez tous en paix (Al-Baqara, 208). Parmi les grands thèmes abordés, nous citons :
- La géographie des crises sur le continent africain ;
- Dialogue et rapprochements : Racines et applications sur le terrain;
- Correction et rationalisation des concepts;
- Paix dans le patrimoine/héritage africain ;
- Le rôle des institutions éducatives dans la promotion de la paix ;
- Développement dans un contexte de paix, problèmes des jeunes et immigration clandestine.
En marge du forum, s’est également tenu le sommet « Jeunes et femmes africaine: Artisans de la Paix », qui s’est tenu sous le patronage de la Première Dame, Dr. Marieme Mint Mohamed Fadel Ould Dah, avec la participation d’un groupe de responsables et de leaders de la jeunesse de différentes régions du monde.
Les participants au troisième forum de la Conférence Africaine pour la Promotion de la Paix 2023, après avoir échangé sur les questions étudiées, rappelant la spécificité de la conjoncture régionale et mondiale qui se profile, sont parvenus aux conclusions suivantes:
- I) Résultats:
1- Cette conférence tire sa spécificité de l’importance de son sujet, de la qualité de ses participants et de la circonstance temporelle dans laquelle elle se tient ; et ceci dans une conjoncture régionale et internationale mouvementée qui accroît le niveau des défis auxquels sont confrontés les habitants du continent africain en particulier et de l’humanité en général.
2- Les crises et tensions actuelles ont confirmé que la paix est un tout indivisible, et que toute violation de celle-ci aura partout des répercussions sur l’humanité.
3- Le choix de la parole d’Allah, Gloire à Lui, «Ô vous qui avez cru, entrez tous ensemble dans la paix» comme devise de cette conférence vient du fait que ce noble verset est un commandement divin appelant tous les croyants à entrer dans la paix dans une très belle métaphore, représentant la paix comme une maison spacieuse et chaleureuse pouvant accueillir tous les humains et protégeant contre les impulsions de destruction inhérentes à l’humain lorsqu’il succombe à certaines tentations.
4- Notre continent a plus besoin que d’autres à l’heure actuelle d’une chose indispensable, à savoir sortir du cycle de la violence et arrêter les guerres en cours; la recherche de la paix est devenue une nécessité absolue, et un devoir urgent. C’est pourquoi nous appelons à la paix non pas comme une possibilité, mais plutôt comme une chose indispensable. La paix est à la fois l’approche et le but ultime.
5- Les conflits qui ont eu lieu ont alerté sur l’importance du dialogue pour résoudre les problèmes humains afin que le langage, au lieu des armes, et la parole au lieu du fusil, soient un outil pour trancher les conflits et résoudre les différends.
6- Tout le monde s’est rendu compte que s’efforcer d’établir la paix et apporter le bien-être nécessite une prise de conscience et une alerte sur la priorité de la paix et l’urgence d’arrêter l’effusion de sang, et de travailler sur des initiatives visant à dénouer les dilemmes et à résoudre les problèmes qui causent l’instabilité dans les patries, qu’ils soient idéologiques ou politiques.
7- Le dialogue doit prendre trois dimensions: une dimension qui corrige les concepts religieux erronés comme le djihad, El Wala (la loyauté), El Baraa (le désaveu), le takfir, etc; une dimension qui implique les médiateurs de paix avec les dirigeants dans la conduite des négociations et l’établissement des réconciliations; et une dimension qui s’engage à faire du développement un objectif pour faire face à la violence et à l’extrémisme en mettant en place des projets générateurs de profit qui créent des opportunités d’emploi.
8- L’une des raisons les plus importantes de la confusion des concepts juridiques (religieux) utilisés par les discours extrémistes est la dissociation entre le discours des obligations juridiques et religieuses, et celui des obligations dictées par la réalité, c’est-à-dire la dissociation du rapport entre l’application des décisions et les exigences de l’espace et du temps, mais aussi les avantages et les bénéfices à appliquer les recommandations religieuses.
9- Nous devrions travailler sur l’enracinement de concepts religieux et la communication subtile du sens de ces concepts, les différents segments de la société doivent avoir une idée claire, appropriée et précise de ces différents éléments.
10- Il ne fait aucun doute que cet effort intellectuel et pratique doit être soutenu par un effort de développement qui travaille pour aider les personnes touchées et notamment les jeunes, par le chômage. Il faut renforcer le rôle de l’État et accroître sa présence.
11- Nous invitons les grands pays amis de l’Afrique et les organisations internationales concernées à soutenir les efforts de paix et de développement sur le continent.
12- L’aspect spirituel doit recevoir une attention suffisante face au phénomène du terrorisme et de la violence auquel nos pays sont confrontés, parallèlement à d’autres solutions matérielles utiles, en prenant soin de l’éducation spirituelle des générations émergentes et en inculquant les valeurs de miséricorde, d’humilité, de générosité et de coopération pour que la compréhension remplace la confrontation, pour que le dialogue remplace le combat, et qu’enfin la compassion remplace la cruauté.
13- En conclusion, nous disons à nos peuple africains, aux gouvernants et gouvernés, savants et apprenants: «Entrez tous dans la paix !», et répondez à l’appel divin pour vous engager dans la paix et soutenez ses efforts et invitez les autres à y participer.
14- Nous avons pleine confiance que notre continent africain, avec sa richesse culturelle, la multiplicité de ses affluents civilisationnels, et la diversité de ses systèmes sociaux, peut concevoir un projet intellectuel intégré pour éteindre les feux de la guerre et affronter l’extrémisme dont les incendies sont sur le point de dévorer de vastes étendues de notre continent.
II – Recommandations
Les participants ont conclu sur un certain nombre de propositions et de recommandations, que nous présentons comme suit :
- Nous appelons à introduire et à mettre en valeur des modèles positifs, et à encourager les initiatives réussies dans les domaines de la paix et de la réconciliation au niveau du continent africain.
- Nous recommandons d’adopter le dialogue comme le seul moyen de résoudre les différends et les conflits dans le monde, dialogue fondé sur la force de la logique, et non sur la logique de la force.
- Coordination avec des universités prestigieuses du continent pour réaliser une série de séminaires/rencontres et d’ateliers académiques pour approfondir la recherche scientifique sur les concepts de paix et de coexistence entre les différentes composantes de la société.
- Nous appelons à renforcer et à activer le rôle des jeunes et des femmes dans la construction de la paix locale, à contribuer à l’élaboration de politiques et à la construction de partenariats pour renforcer la stabilité des sociétés et y maintenir la paix.
- Nous recommandons d’établir et d’organiser des caravanes de la paix dirigées par des imams et des notables de différentes ethnies et tribus, pour être des messagers d’harmonie et de paix dans les régions souffrant de guerres civiles et de conflits sanglants.
- Nous saluons le modèle de tolérance et de coexistence des EAU, et nous recommandons l’importance de s’inspirer de ce modèle, dans lequel des dizaines de religions, de cultures et de spiritualités différentes et des centaines de nationalités coexistent dans la sûreté, la sécurité, l’affection et le respect.
- Nous recommandons la création d’une université pour enseigner les sciences de la jurisprudence islamique en corrigeant les concepts selon la devise « Le savoir avant l’action ».
- Nous appelons au renforcement des partenariats et de la coopération, ainsi qu’à la coordination des efforts entre les organismes et organisations travaillant dans la construction de la paix, de la tolérance et de la coexistence sur le continent.
- Nous appelons à l’attribution de subventions pour soutenir la recherche et les études dans le domaine des stratégies de promotion de la paix.
- Nous recommandons l’inclusion des valeurs de paix et de tolérance dans les programmes d’enseignement des pays africains et la coopération à cet égard avec les institutions régionales et internationales spécialisées.
- Nous proposons que les capitales africaines accueillent des ateliers tout au long de l’année sous la supervision de la Conférence africaine de la paix et en coordination avec les gouvernements et les organisations travaillant sur le terrain.
- Nous recommandons la création d’une branche de la nouvelle Alliance Globale (Hilf El Foudoul) en Afrique, comme cadre de coopération dans la diffusion des valeurs de tolérance et de paix parmi les chefs religieux et les jeunes militants des différents pays du continent.
- Nous appelons à la création d’une station de radio dans les pays africains pour diffuser des messages de paix et de sensibilisation aux principes de l’Islam tolérant, et pour les communiquer aux différents segments de la société et dans toutes les langues.
- Nous recommandons la création d’un Conseil des Femmes Pionnières de la Paix et d’un autre pour les Jeunes Africains « Artisans de la Paix ».
En conclusion, les universitaires, intellectuels et militants participant à cette conférence lancent un appel au nom de l’islam et de la fraternité humaine afin que cessent les guerres et les violences sur le continent africain pour éviter une effusion supplémentaire de sang et rétablir la sacralité de la vie humaine.
Les participants au troisième forum de la « Conférence Africaine pour la Paix » sont heureux d’exprimer leurs sincères remerciements au Gouvernement de la République Islamique de Mauritanie pour son généreux parrainage, et d’adresser leur expression de gratitude à Son Excellence M. Mohamed Ould Cheikh Ghazouani pour l’attention aimable et généreuse que les invités de cette conférence ont reçue. Les participants remercient également Son Excellence le Président Muhammadu Buhari – Président de la République Fédérale du Nigeria d’avoir honoré la conférence de sa présence ainsi que les Présidents du Niger, du Rwanda et de la Guinée-Bissau pour leur précieuse participation aux travaux de la conférence. Ils expriment leur profonde gratitude aux responsables de la Conférence africaine pour la paix pour leurs efforts remarquables en vue de faire des travaux de cette conférence un succès.
Nous prions Dieu de préserver nos pays, de répandre la sécurité et la sûreté, de corriger nos actes et de réaliser nos espoirs de paix. Dieu en est Capable, il est Miséricordieux et Tout Puissant.
Fait à Nouakchott le
19 janvier 2023.
Comité de la déclaration finale
(Reçu à Kassataya.com le 24 janvier 2023)
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