Pourquoi les Arabes sont si nostalgiques des années 1970

Une époque de joies simples et de grandes libertés.

Slate – Une vague de nostalgie du passé, et plus particulièrement des années 1960 et 1970, gagne les réseaux sociaux dans les pays arabes, où le même topo revient : des clichés, souvent en noir et blanc, montrant des groupes de filles joyeuses en jupe –ou habillées moderne–, sont publiés aux côtés de photos récentes, où l’on voit des filles en voile (simple ou intégral, décoré ou sobre). Le tout est destiné à illustrer la prétendue régression que connaissent les sociétés arabo-islamiques en matière de libertés et d’émancipation.

 

Nostalgie, quand tu nous tiens

 

D’autres retirent de leurs archives personnelles ou familiales des paysages de villes plus propres, ou des tribunes de stade de football où les gens paraissent plus disciplinés. Cette nostalgie a toujours existé. Elle peut être personnelle, quand elle renvoie à des souvenirs d’enfance par exemple, mais aussi collective ou historique, quand toute une génération, frustrée ou désabusée par son présent, se cherche des gloires dans un passé lointain.

Comment expliquer le fait que les gens paraissent, sur les vieilles photos, plus joyeux et plus apaisés?

 

On a toujours reproché aux Arabes de se réfugier dans des histoires épiques et romantiques quand il fallait tirer les leçons de leurs déboires. La résurgence, au lendemain de la défaite de juin 1967 face à Israël, du salafisme islamique promettant de ressusciter «l’âge d’or» de l’islam, avec ses victoires et conquêtes, en est un exemple édifiant.

Il faut dire que l’apparition des moyens de communication modernes et surtout du net, avec ses extraordinaires capacités de stockage, de recherche et de partage, a davantage développé cette nostalgie, tout en offrant à chacun, sur les réseaux sociaux, la possibilité de commenter n’importe quelle image mise en ligne.

 

Plus joyeux et plus sages

 

Dans les espaces de débat, c’est toujours l’occasion de poser des questions de fond : pourquoi nos sociétés ont-elles sombré dans l’obscurantisme au lieu de suivre la marche de l’histoire ? Qu’est-ce qui a poussé objectivement les femmes arabes à effectuer un tel revirement dans leurs habitudes vestimentaires ? Pourquoi avant, à l’époque où les filles dans la rue n’étaient pas du tout voilées, y avait-il moins de cas de harcèlement qu’aujourd’hui, alors qu’on compte une nette majorité de femme portant le voile ? Comment expliquer le fait que les gens paraissent, sur les vieilles photos, plus joyeux et plus apaisés, alors qu’ils n’avaient pas un meilleur niveau de vie, ni de meilleurs moyens de distraction qu’aujourd’hui ?

Sur Facebook, une photo montrant un bus plein à craquer dans Le Caire des années 1970, porte cette légende: «Pourquoi sommes-nous si nostalgiques du passé, alors que les conditions de vie étaient pénibles? […] La réponse est dans la photo même: parce que les gens s’aimaient et se supportaient, malgré la pauvreté», peut-on lire dans un commentaire.

 

À chacun sa Belle Époque

 

Si certains le font par nostalgie d’une époque qu’ils ont vécue ou imaginée («La nostalgie est le désir d’on ne sait quoi», dixit Saint-Exupéry) et qu’ils qualifient ces années-là, sans hésitation, de «Belle Époque» (en arabe, «azzaman al-jamil»), d’autres, plus intéressés, en font un tremplin pour clouer au pilori des régimes politiques usés qui ont ruiné des pays pourtant promis à jouer dans la cour des grands. C’est dans ce sens qu’on aime par exemple rappeler le cas de l’Algérie qui était, jusqu’au milieu des années 1970, classée au même niveau socio-économique (développement humain, PIB…) que des pays comme la Turquie ou l’Espagne.

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Mussa Acher — Édité par Thomas Messias

 

 

 

Source : Slate (France)

 

 

 

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