Le retour de la Chine sur la scène internationale

Après trois ans d’isolement, le pays a rouvert ses frontières mais le manque de transparence sur la vague actuelle de Covid pourrait inciter les voyageurs à la prudence.

 Le Monde – La Chine rouvre ses portes : après trois ans d’une politique zéro Covid stricte incluant la fermeture des frontières, le pays a mis fin aux quarantaines obligatoires à l’arrivée sur le territoire chinois, dimanche 8 janvier. La mesure, annoncée le 26 décembre 2022, est une étape-clé dans la réouverture du pays au monde : trois ans d’isolement ont coûté cher à son économie, à son image et à sa population. Beaucoup de Chinois vivant à l’étranger ont été coupés de leur famille pendant trois ans. Dimanche, plusieurs scènes de retrouvailles familiales ont été filmées par les médias locaux.

Pour les Chinois, il s’agit d’un retour à la normalité, avec la possibilité de voyager sans restrictions sanitaires. Pour le pays et ses dirigeants, c’est un retour sur la scène internationale après trois ans de repli. Pour l’économie mondiale enfin, 2023 devrait voir le retour de la Chine à sa place de deuxième puissance économique, capable de stimuler la demande.

Le retour des échanges devrait toutefois prendre quelques mois. Cette étape va faciliter les voyages des citoyens chinois et des détenteurs de visas d’affaires ou les visites familiales ; mais la Chine ne délivre pas encore de visas de tourisme et d’études. Dimanche matin, à l’aéroport de Pudong, à Shanghaï, les journalistes étaient aussi nombreux que les proches qui attendaient des voyageurs. Les vols sont encore rares et chers, remettre en place des connexions prendra des semaines aux compagnies aériennes.

 

Par ailleurs, beaucoup de Chinois n’ont plus de papiers en cours de validité : ces trois dernières années, il fallait une raison impérieuse pour obtenir le droit de quitter le pays et, donc, pour obtenir ou renouveler un passeport. Enfin, la Chine est actuellement aux prises avec une vague de Covid-19 massive, qui pousse les citoyens à la prudence. Même au sein du pays, les voyages sont réduits : lors du week-end du Nouvel An, seulement 52 millions de voyages ont eu lieu à travers la Chine, soit 58 % de moins qu’en 2019.

« Un monde plus méfiant »

La Chine avait fermé ses frontières en mars 2020, quand elle avait réussi à reprendre le contrôle sur la circulation du virus sur son territoire, en mettant sous cloche Wuhan et toute la province du Hubei. Du jour au lendemain, plus de visas ou presque pour les étrangers : seuls ceux qui étaient déjà en Chine pouvaient les renouveler. Pendant les trois années qui ont suivi, seuls des visas de travail et d’affaires ont été délivrés au compte-gouttes, et les voyageurs qui arrivaient en Chine étaient soumis à des quarantaines de deux à trois semaines, parfois jusqu’à six semaines, du fait de l’empilement des mesures par différentes localités. Résultat, les vols internationaux ont chuté de 98 %, au plus fort de la politique zéro Covid.

Les dirigeants chinois eux-mêmes se sont isolés. Xi Jinping n’a pas quitté son pays entre janvier 2020 et septembre 2022, date à laquelle il a effectué une première visite à l’étranger à Samarcande, en Ouzbékistan, pour une réunion de l’Organisation de coopération de Shanghaï. Le dirigeant chinois a ensuite fait son grand retour sur la scène internationale lors du G20 à Bali, en Indonésie, mi-novembre, l’occasion de rencontrer pour la première fois Joe Biden depuis son élection il y a plus de deux ans, et de reprendre contact avec la plupart des dirigeants du G20.

 

Mais le monde où revient la Chine n’est plus le même : « Les Chinois vont retrouver un monde beaucoup plus méfiant, sinon hostile, du moins de la part des pays développés. On est engagés dans une guerre froide, géostratégique, technologique et idéologique avec la Chine. Cela va avoir des conséquences sur les relations humaines et économiques entre les partenaires européens et américains, et chinois », explique Jean-Pierre Cabestan, professeur de sciences politiques à l’université Baptiste de Hongkong. Si le constat s’applique surtout aux pays du Nord, les relations avec les pays en développement devront aussi passer par une phase d’ajustement : « Pour le Sud, c’est peut-être moins vrai, ces pays ont souvent besoin de l’aide, des prêts, des projets d’infrastructure chinois pour se développer. Ce retour va favoriser une reprise des contacts, notamment une relance des projets des “routes de la soie”. Même si ceux-ci ont réduit leur voilure ces dernières années, du fait de la situation économique en Chine », nuance M. Cabestan.

 

Manque de transparence

Signe de cette défiance, la décision de nombreux pays du Nord d’imposer aux voyageurs arrivant de Chine des tests PCR, de peur de voir arriver des nouveaux variants. La Chine a quasi arrêté de partager le séquençage des variants présents sur son territoire, un manque de transparence qui rappelle l’attitude reprochée à Pékin au début de la pandémie. Depuis, la fermeture du pays et l’absence d’échanges directs entre chercheurs, diplomates, chefs d’entreprise, mais aussi touristes, n’ont pas permis d’atténuer certains stéréotypes négatifs.

 

La Chine semble avoir pris conscience des dommages causés, au moins pour la sphère économique : fin 2022, plusieurs délégations d’hommes d’affaires et de responsables locaux, des provinces du Hubei (centre) et du Zhejiang (au sud de Shanghaï), du Jilin (nord) ou de la métropole de Shenzhen, se sont rendues en Europe, en Afrique, au Japon et en Corée du Sud notamment, pour renouer des liens économiques.

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Source : Le Monde

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