Climat : l’Afrique source de solutions ?

Très vulnérable au changement climatique, l’Afrique a besoin du soutien financier des pays riches, c’est un fait. Mais elle dispose aussi de nombreux atouts, qui lui permettent de se présenter comme une région riche en opportunités.

Jeune Afrique – À rebours de sa forte vulnérabilité au changement climatique, l’Afrique n’émet que peu de gaz à effet de serre. Sa diplomatie climatique s’est appesantie sur le financement de l’adaptation. Rien de plus normal.

Pour autant, la manière dont les Africains évoquent ce sujet doit évoluer. Les pays du continent devraient adopter la posture, bien plus valorisante, d’apporteurs de solutions.

 

Stratégie préventive

 

L’ « atténuation » dont il est question désigne la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Vu sous cet angle, demander au continent qui pollue le moins de la planète de réduire ses émissions paraît assurément paradoxal. À l’inverse d’autres régions, la stratégie d’atténuation, en Afrique, devrait être davantage préventive (éviter les futures émissions) que curative (décarbonation).

Avec une population estimée à 4 milliards de personnes d’ici à la fin du siècle, l’Afrique devrait se pencher sur deux secteurs stratégiques : l’énergie et l’agriculture.

Quelque 600 millions d’Africains n’ont pas accès à l’électricité ; 1 milliard d’entre eux ne disposent pas d’une source d’énergie propre pour faire la cuisine. Si l’on y ajoute les besoins que requièrent la création de chaînes de valeurs et le développement industriel, la demande énergétique africaine devient exponentielle. Le continent valorisera-t-il son potentiel en énergies renouvelables ou commettra-t-il les mêmes erreurs que d’autres pays, qui ont conduit au cataclysme écologique planétaire ?

L’économie africaine est entravée par l’utilisation des énergies fossiles dont l’achat est une saignée continue en devises. Le coût élevé du kWh rend le made in Africa peu compétitif sur le marché international. Résultat, l’Afrique demeure une région d’extraction de ressources et d’exportation de matières premières.

Bonbonnes de carbone

 

Ici peut-être plus qu’ailleurs, une transition énergétique juste et ordonnée s’impose. L’objectif est moins la décarbonation que la promotion d’un développement propre.

Tout faux-pas – à savoir l’utilisation massive d’énergies polluantes – peut faire glisser le monde vers une situation dramatique, tant sur le plan écologique que sur le plan économique et social.

L’utilisation des terres est une autre source d’émissions. Comment nourrir les futures générations sans davantage détruire les forêts, dégrader les terres, surexploiter les sols et les eaux ?

Prévenir les émissions de gaz à effet de serre, c’est aussi prêter une attention particulière aux forêts du bassin du Congo, dont les tourbières sont de gigantesques bonbonnes de carbone. Compte tenu de leur niveau de pauvreté, est-il raisonnable de demander aux populations de surveiller la bonbonne (pour sauver la planète) alors qu’elles ont du mal à subvenir à leurs besoins quotidiens ?

Dans le cadre de l’Accord de Paris, les pays doivent développer leur plan de transition écologique. Se tourner vers le soleil, le vent, l’hydro-électricité et, surtout, l’hydrogène. Retourner à bon compte la chaleur du soleil, destructrice d’aliments, en chambre froide. Transformer le vent, le soleil et l’eau en hydrogène vert, cette énergie du futur !

 

Transition aisée

 

Par ailleurs, de par sa superficie, l’Afrique est dotée d’importants puits de carbone, de millions d’hectares de forêts, de savanes et d’espaces pastoraux. Une fois restaurées, les terres dégradées, en plus de stocker du carbone, fournissent d’autres services, telles que l’alimentation et la résilience face aux sécheresses.

Enfin, le continent doit transformer sa pauvreté énergétique en avantage : n’ayant que peu de centrales à énergies fossiles (actifs nocifs à déclasser), il lui est plus facile d’engager une transition énergétique.

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Ibrahim Thiaw

Secrétaire général adjoint des Nations unies et Secrétaire exécutif de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (CNULCD)

Source : Jeune Afrique

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