En Algérie, l’incarcération d’un journaliste provoque la sidération

Belkacem Houam, du quotidien arabophone « Echorouk », a été placé en détention à la suite d’un article sur les exportations de dattes.

 Le Monde  – Peut-on encore faire du journalisme en Algérie ? Des professionnels du secteur se posent la question après l’incarcération surprise, jeudi 8 septembre, de Belkacem Houam, du quotidien arabophone Echorouk, suite à un article portant sur le renvoi des dattes « deglet nour » (notamment en France) en raison de la présence d’un pesticide interdit dans l’Union européenne.

 

L’article, paru mercredi, rapportait des critiques d’exportateurs, non cités nommément, à propos de la gestion de l’usage des pesticides par les autorités. Il indiquait également qu’une décision d’arrêt « immédiat » des exportations des dattes avait été prise par le ministère du commerce. Celui-ci a réagi le jour même, dénonçant un article « basé sur des informations injustifiées, dénuées de tout fondement et attentatoire à l’économie nationale et à la richesse que recèle le pays ». Il a annoncé dans la foulée qu’il allait prendre « toutes les mesures nécessaires à l’encontre de l’auteur de l’article et du journal concerné, dont les poursuites judiciaires devant les juridictions compétentes ».

Le journal « Echorouk » a fait l’objet d’un refus d’impression à l’imprimerie d’Etat

Les mises au point du ministère du commerce et, plus tard, du ministère de l’agriculture semblaient suffisantes pour clore le sujet, mais les choses vont s’emballer de manière inattendue. Alors que le journal Echorouk faisait jeudi l’objet d’un refus d’impression à l’imprimerie d’Etat, Belkacem Houam, convoqué par la justice, était placé en détention préventive à la prison d’El Harrach, à Alger.

De trois à trente ans de prison

La nouvelle a provoqué la sidération générale. « Jamais un journaliste ne doit aller en prison pour cela », s’indigne le site d’information Twala, tandis que Khaled Drareni, représentant de Reporters sans frontières (RSF) en Afrique du Nord, appelle à la libération du journaliste en rappelant que la Constitution algérienne dispose que « le délit de presse ne peut être sanctionné par une peine privative de liberté ». « C’est l’intégrité physique du professionnel du média qui, désormais, est immédiatement en jeu », écrit Ihsane El-Kadi, directeur de Radio M et de Maghreb Emergent, condamné en juin à six mois de prison ferme pour un article d’opinion sur la place du mouvement islamo-conservateur Rachad sur l’échiquier politique.

 

Belkacem Houam est poursuivi en vertu d’une loi « relative à la lutte contre la spéculation illicite ». Promulguée en décembre 2021, durant la crise du Covid-19, celle-ci incrimine notamment « la diffusion de nouvelles ou d’informations fausses ou calomnieuses propagées sciemment dans le public afin de provoquer une perturbation du marché et une hausse subite et non justifiée des prix ». Il encourt une peine allant de trois à trente ans de prison. Tétanisés par la nouvelle, des journalistes ont appelé à un rassemblement à la maison de la presse Abdelkader-Safir de Kouba, à Alger, mercredi 14 septembre.

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Source : Le Monde
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