Le Sénégal, bon élève de la parité en politique, mais peut mieux faire

Plus de 44 % des sièges de l’Assemblée nationale élue en juillet seront occupés par des femmes. Des progrès contrebalancés par les réalités du pouvoir et les forces d’inertie sociales.

 Le Monde – Le Sénégal fait franchir un nouveau palier à la représentation politique des femmes en Afrique de l’Ouest avec une proportion record de députées dans le Parlement récemment élu qui siège pour la première fois lundi 12 septembre. Mais il reste du chemin à parcourir sur la voie de l’égalité dans un pays où attitudes et lois patriarcales sont profondément enracinées.

Plus de 44 % des sièges de l’Assemblée nationale élue en juillet seront occupés par des femmes, la proportion la plus haute dans un Parlement en Afrique de l’Ouest. Des progrès contrebalancés par les réalités du pouvoir et les forces d’inertie sociales.

 

Aminata Touré a été première ministre pendant dix mois entre 2013 et 2014 et a occupé le poste de présidente du Conseil économique et social qui a fait d’elle l’un des plus hauts personnages de l’Etat. Elle entre au Parlement pour le parti présidentiel et fait observer qu’en politique, les pionnières rencontrent toujours résistance et suspicion. « On vous a beaucoup plus à l’œil, ils ne vous pardonnent aucune erreur, précise-t-elle à l’AFP. Je crois que toutes les femmes de pouvoir vous diraient la même chose. »

Sur les 165 mandats parlementaires, 73 ont échu à des femmes. Le pays, volontiers considéré comme un Etat de droit et un îlot de stabilité dans une région agitée, se classe au 4rang en Afrique et au 18rang mondial pour la parité hommes-femmes au Parlement, devant la Suisse, la France, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis, selon l’Union interparlementaire, une organisation basée à Genève.

Une loi de 2010 exige la « parité absolue »

En dehors du Sénégal, sur les 111 postes de parlementaires ou de ministres pourvus en Afrique de l’Ouest et au Sahel entre décembre 2021 et juin 2022, seuls 15 l’ont été par des femmes, indique un rapport récent de l’ONU.

Au Sénégal, une loi de 2010 exige la « parité absolue » entre les sexes dans toutes les institutions électives, avec des listes de candidats alternant hommes et femmes. Comme les têtes de liste sont presque toujours des hommes et le nombre de candidats élus sur une même liste est souvent impair, la représentation féminine reste inférieure à 50 %, explique une porte-parole de l’Assemblée nationale.

 

Au-delà de la représentation politique, le Sénégal arrive au 130rang sur 189 dans un classement de l’ONU sur l’égalité des genres. La forte présence à l’Assemblée nationale « permet aux femmes d’avoir leur mot à dire », sur le budget et sur leurs préoccupations, souligne l’ancienne cheffe de gouvernement Aminata Touré. La part que le nouveau Parlement fera à ces préoccupations est incertaine.

Le Sénégal n’a criminalisé le viol qu’en 2020. Le Protocole de Maputo, une initiative de l’Union africaine qui vise à élargir l’accès à l’avortement et que le Sénégal a ratifiée en 2005, attend toujours d’être pleinement retranscrit dans la loi nationale. L’avortement n’est autorisé au Sénégal que pour sauver la vie d’une femme enceinte. En 2020, un quart de la population carcérale féminine était emprisonné pour des faits liés à l’avortement, selon l’ONG Africa Check.

« Il y a tellement de choses à faire »

L’âge légal du mariage est de 16 ans pour les filles, 18 pour les garçons. « Il devrait être porté à 18 ans pour que les filles puissent continuer d’aller à l’école et qu’elles soient sur un pied d’égalité avec les garçons en termes de droits », précise Maimouna Yade, responsable de l’organisation de femmes JGEN. « Il y a tellement de choses à faire », dit Mame Diarra Fam, nouvelle parlementaire d’opposition. Elle évoque les violences faites aux femmes, l’éducation des filles et l’accès aux soins.

Les défenseurs des droits reconnaissent les avancées réalisées ces dernières années, comme la loi sur la parité ou la loi de 2013 permettant aux Sénégalaises mariées à des étrangers de transmettre leur nationalité à leurs enfants, un droit dont jouissaient déjà les Sénégalais. La loi criminalisant le viol a « largement été poussée » par des femmes députées, souligne la militante Maimouna Yade.

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Source : Le Monde  avec AFP – Le 09 septembre 2022
 
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