Ce jour-là, c’était l’effervescence au campement en pleine transhumance.
Le pilon battait tambour dans le petit mortier en bois d’acacia. Après cette danse effrénée, les feuilles séchées de baobab n’était plus qu’une fine poudre verte, la « takya » était prête.
Dans la petite marmite, la viande de zébu agrémentée d’épices de Nioro du Sahel et de « takya » était à point.
L’autre marmite de pâte de mil, bien installée sur le fourneau rempli de braises, sifflait comme pour donner le coup d’envoi d’un ballet bien rodé.
« El aïch » était prêt.
Chaud, chaud ! La garniture venait se loger dans le creux au milieu du haut plat émaillé.
Ha ! Il manquait quand même ce petit quelque chose.
Avec du « dhin », ce beurre obtenu à partir du lait de vache caillé, baratté et cuit sur fond de céréales, « El aïch » serait encore plus succulent.
C’était évident, il en fallait.
On avait beau secouer le petit beurrier en peau d’agneau, pas une goutte.
Alors vite, l’appel a été lancé dans les « khaimas» à la recherche de cet or liquide.
La maman de notre très jeune ami pris une « gadha » en bois d’acacia, y versa plusieurs verres à thé, étalon de mesure, d’un beurre limpide sans impureté.
Elle confia à son jeune garçon, cette belle responsabilité de convoyeur de goût.
Quelques minutes plus tard, il se présenta sous les regards ébahis des convives son trophée sur la tête.
Mission accomplie.
Des gouttes dorées perlaient sur le visage et le long du corps du petit garçon.
Il était très bon ce thé au beurre.
Il avait un goût particulier de sable blond, un goût lumineux comme si un soleil s’y était perdu. Ce goût authentique des grands espaces, de liberté.
En effet, la calebasse était bien sur la tête dans le mauvais sens, à l’envers, vide.
Et un, et deux, et trois…Glou-glou. C’était sa potion magique.
Tant mieux, aucune séquelle, notre jeune ami était parti en courant réguler son trop plein d’énergie. Il était quand même délicieux ce »El aïch ».
Il y a des gens comme ça…
Elbane Hamady
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