Hommage à Baaba Maal / Par Mouhamadou Sy dit Pullo Gaynaako

Faudrait-il dire la genèse de cet acte suprême ? Devrait-on donner le détail du tiraillement interne que cela était, et continue d’être, entre l’envie irrésistible de louer « l’Esprit » que tu es et la pudeur de taire ce que celui-ci touche au plus profond de nous ?

Devrait-on déterrer, du fond de nos âmes, le berceau de nos enfances pour en scruter le tissu émotionnel filé par le maître du Yeelaa ? Irons-nous fendre le temps pour revivre le tumulte de nos lointaines adolescences ? Revoir les Aguyaaji nous transformer et nous assister, dans une intimité absolue, lors de ces moments intermittents de joie et d’endurance, de doute et d’enchantement.

À ces moments où, lorsque vint la nuit, les dingire d’antan laissent la place à ces sables étendus au bord de ce long fleuve qui jaillit de ton chant, et qui plonge ses bras dans les recoins les plus secrets des foyers. Nous irions alors à la rencontre de ces vagues qui déferlent au rythme de Caa-Yoo et de Jamma Jenngii, ou encore de Ndunngu ruumii. Nous entendrions le murmure des ombres s’y confondre dans une harmonie divine.

Faut-il dire le mal des solitudes amères de nos temps et décrire les souvenirs de ce monde ancestral que ta voix y déverse ? Ressentir le duel entre Sammba Dogataa et Konko Buubu dans une continuité inarrêtable. Goûter aux gloires que nous font revibrer les airs de Taaraa, de Muudo Hormo et de Laam Tooro ! Yoo cewɗi njaadu e karlaaɗi ! Que Baaba actionne ce gosier à la plus envoûtante des fréquences et nous conte les aventures d’Oumarel qui, au retour triomphal de Maayel Dibooli, alla se couvrir d’honneur au front de Sansanding ! Que revive la bravoure d’Abdoul Bookar ! Que Minuit nous renseigne sur la tragédie du mandé !

Faut-il dévoiler l’itinéraire de l’exilé et révéler son abreuvoir intarissable ? Mi yeewnii ! So aɗa yilloo mi, giɗo ! Ɓiɓɓe leydi ngummee !

Et si nous parlions plutôt du Baaba quotidien, de notre intime lointain, dont l’œuvre nous égaie et nous inspire ?

Baaba Maal est en effet un intime de chacun de nous du fait de ce que son œuvre suscite en nous, de l’endroit qu’elle touche dans nos âmes, des émotions qu’elle génère, des maux qu’elle soulage, de l’espoir qu’elle fait naître. Plus qu’une voix du peuple, Baaba est un guérisseur d’âmes doublé d’une muse. Oui, le daande maayo est éminemment artistique.

Mais les génies du fleuve se recueillent devant la divine voix du grand maître des ondes vocales quand ils entendent l’écho de Ndella oolel, de Delliyaa, ou de Njillu du fond des lugge et jiriile, sièges des redoutables forces de l’onde douce.

Baaba Maal est culture, Baaba Maal est inspiration, Baaba Maal est espoir pour des générations. Joyeux anniversaire et longue vie !

 

 

 

Mouhamadou Sy dit Pullo Gaynaako

 

 

 

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