Guerre en Ukraine : la Russie en partie débranchée du système financier mondial

L’Union européenne a demandé au réseau Swift d’exclure sept banques russes, dont VTB, le deuxième établissement du pays. Le géant Sberbank et Gazprombank, au cœur du commerce des hydrocarbures, sont épargnés.

 Le Monde  – A l’issue de longues heures de négociations, les vingt-sept Etats membres de l’Union européenne (UE) sont finalement tombés d’accord, mercredi 2 mars, pour exclure sept banques russes du réseau Swift, la plate-forme à la base des échanges financiers internationaux. Il s’agit, à travers ce nouveau train de sanctions financières, d’affaiblir Moscou, en réponse à l’invasion de l’Ukraine, en paralysant partiellement son système bancaire et en bloquant une partie des exportations et des importations russes.

 

Le compromis final n’a pas été trouvé sans mal, et se révèle moins pénalisant pour la Russie que ne l’avaient initialement laissé entendre certains alliés occidentaux. L’UE a demandé au réseau financier Swift d’exclure les trois établissements déjà placés sous sanctions européennes de gel des avoirs depuis le 24 février, à savoir la Vnesheconombank (VEB), considérée comme le bras financier du régime du président russe Vladimir Poutine, la Promsvyazbank (PSB), institution de taille moyenne liée à l’industrie de la défense, et la Bank Rossiya, identifiée comme la banque personnelle des hauts fonctionnaires de la Fédération de Russie.

S’y ajoutent quatre institutions financières déjà sanctionnées par Washington, la principale étant la deuxième banque russe, VTB Bank, mais aussi la Bank Otkritie, détenue par la Banque centrale de Russie depuis un renflouement en 2017 (que le groupe bancaire italien UniCredit a renoncé à acheter en janvier, en raison de la crise ukrainienne), la Novikombank, spécialisée dans le financement d’entreprises de l’industrie, le pétrole et le gaz, et la Sovcombank.

 

« Des sensibilités différentes au sein de l’Union européenne »

 

En revanche, le géant Sberbank, de très loin la plus grosse banque russe, avec 47 % des dépôts bancaires du pays, et Gazprombank, branche financière du géant énergétique, au cœur du commerce des hydrocarbures, se voient épargnés. Les Vingt-Sept n’ont donc pas voulu d’une sanction extrême.

Plusieurs Etats européens, à commencer par l’Allemagne, l’Italie ou la Hongrie, tenaient à défendre leurs intérêts économiques. Berlin, notamment, refusait d’exclure l’ensemble des banques russes lui permettant d’acheter du gaz et souhaitait donc que Sberbank et Gazprombank ne soient pas exclues de Swift. « Logiquement, il y a des sensibilités différentes au sein de l’Union européenne », justifie-t-on à Bercy. Le rôle de la présidence française a été « de mettre tout son poids dans la balance pour forger un consensus, en tenant compte des intérêts des uns et des autres ». D’autres pays, dont la Pologne et les Etats baltes, auraient, en revanche, fait pression, selon l’agence Bloomberg et le Wall Street Journal, pour que davantage de banques soient concernées par la mesure d’exclusion.

Les banques russes qui seront déconnectées de Swift devront repasser en mode manuel (par fax ou par e-mail), avec, pour conséquence, une grave perturbation de leurs circuits financiers

Ce « deswifting », selon le jargon des fonctionnaires européens, aura toutefois de lourdes conséquences pour les établissements sanctionnés. Swift fournit en effet un service de messagerie à ses 11 000 adhérents, essentiellement des institutions financières, afin qu’ils puissent procéder à des paiements internationaux entre eux de manière automatisée et sécurisée. Ses atouts sont à la fois sa robustesse et sa capacité à gérer des transactions de masse. Chaque jour, une quarantaine de millions de transactions transitent par la messagerie, à travers plus de 200 pays et territoires.

Les banques russes qui seront déconnectées de Swift devront donc repasser en mode manuel (par fax ou par e-mail), avec, pour conséquence, une grave perturbation de leurs circuits financiers (délais supplémentaires de traitement des transactions, risques d’erreurs et de litiges ultérieurs). Par le passé, seules les banques de Corée du Nord et d’Iran ont été sanctionnées de la sorte. « L’exclusion des banques iraniennes de Swift a rendu en pratique la gestion des échanges commerciaux et financiers extrêmement difficile. Elle a quasiment mis fin à l’ensemble des transactions », explique-t-on à Bercy.

 

« Assurer le respect des sanctions applicables »

 

Au-delà du levier Swift, l’exclusion de la Russie du système financier international passe également par la décision des groupes américains de cartes bancaires Visa et MasterCard d’empêcher des banques russes d’utiliser leur réseau. Concrètement, les clients des banques sanctionnées ne peuvent plus payer avec leurs cartes, du moins à l’étranger, ni les utiliser pour payer des services dans des boutiques en ligne.

Les sanctions engagées par les Etats-Unis contre de grandes banques russes empêchent en effet – sauf dérogations – les entreprises américaines de poursuivre leurs relations d’affaires avec elles. MasterCard a ainsi « bloqué de multiples institutions financières » sur son réseau de paiements, indique le directeur général de l’entreprise, Michael Miebach, dans un message posté sur son site, lundi 28 février. « Nous continuerons à travailler avec les régulateurs dans les jours à venir pour respecter pleinement nos obligations de conformité au fur et à mesure de leur évolution », ajoute-t-il. Visa a également indiqué « prendre rapidement des mesures pour assurer le respect des sanctions applicables ». De plus, les cartes de ces banques ne peuvent pas être utilisées avec les services de paiement mobile Apple Pay et Google Pay.

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Véronique Chocron

 

 

 

 

Source : Le Monde 

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